Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
Vom Netzwerk:
je
craignis qu’il ne nous fît une attaque. Cicéron présenta le document à la
lumière pour l’étudier.
    — Quand cela a-t-il été délivré ?
    — Aujourd’hui.
    — Tu sais de quoi il s’agit, n’est-ce pas ?
    — Non. C’est pour ça que je t’ai apporté cette saloperie
tout de suite. Je n’ai jamais compris un traître mot à tout ce charabia
juridique.
    — C’est une assignation pour trahison, dit Cicéron en
examinant le document avec un étonnement grandissant. C’est étrange. J’aurais
cru qu’ils te poursuivraient pour corruption.
    — Dis donc, Cicéron, il n’y aurait pas moyen d’avoir un
peu de vin, par hasard ?
    — Attends un peu. Essayons d’avoir les idées claires
pendant un petit moment pour démêler tout ça. Il est écrit ici que tu as perdu
une armée en Histria.
    — Seulement l’infanterie.
    — Seulement l’infanterie ! s’esclaffa Cicéron.
Quand cela s’est-il passé ?
    — Il y a un an.
    — Qui se charge de la partie plaignante ? A-t-on
désigné quelqu’un ?
    — Oui. Il a prêté serment hier. C’est ton petit protégé – tu
sais, ce jeune freluquet de Caelius Rufus.
    Cicéron reçut la nouvelle comme un coup. Il était de
notoriété publique que Rufus s’était brouillé avec son ancien mentor. Mais qu’il
choisît pour sa première véritable incursion dans la vie publique de poursuivre
le collègue consulaire de Cicéron – ce n’était ni plus ni moins qu’un
acte de trahison. Cicéron fut tellement pris de court qu’il dut s’asseoir.
    — Je croyais que c’était Pompée qui était le plus
décidé à te faire passer en procès ?
    — C’est le cas.
    — Alors pourquoi laisse-t-il Rufus se faire les dents
sur une affaire aussi importante ?
    — Je ne sais pas. Et ce vin, maintenant ?
    — Oublie cette saleté de vin pendant une minute.
    Cicéron roula l’assignation et s’assit un instant, la
tapotant contre la paume de sa main.
    — Ça ne me plaît pas. Rufus sait beaucoup de choses sur
moi. Il pourrait mentionner toutes sortes de détails.
    Il lâcha le rouleau sur les genoux d’Hybrida.
    — Je crois que tu devrais trouver quelqu’un d’autre
pour te défendre.
    — Mais c’est toi que je veux ! Tu es le meilleur.
Nous avions un accord, tu te rappelles ? Je te donnais une partie des
revenus et tu me protégeais des poursuites.
    — J’ai accepté de te défendre si jamais tu étais
poursuivi pour corruption. Je n’ai jamais parlé de trahison.
    — Ce n’est pas vrai. Tu manques à ta parole.
    — Écoute, Hybrida, je témoignerai en ta faveur, mais
tout cela pourrait bien être un piège – tendu par César,
probablement, ou par Crassus – et je serais stupide de m’y
précipiter.
    Les yeux d’Hybrida, bien qu’ils fussent à présent profondément
enfoncés dans la graisse, étaient toujours aussi bleus, pareils à des saphirs
sertis dans la glaise rouge.
    — Il paraît que tu as fait ton chemin. Des maisons
partout.
    — Ne cherche pas à me menacer, l’avertit Cicéron avec
un geste las.
    — Très joli tout ça, poursuivit Hybrida en désignant la
bibliothèque. Les gens savent comment tu as obtenu l’argent pour te le payer ?
    — Je te préviens : je pourrais tout aussi bien
témoigner contre toi que pour ta défense.
    Mais sa menace sonnait creux et Cicéron dut le sentir car il
se passa soudain la main sur le visage, comme s’il essayait de dissiper une
vision inquiétante.
    — Je crois que tu devrais prendre un verre avec moi,
commenta Hybrida avec un profond soulagement. Les choses semblent toujours
aller mieux après une coupe de vin.
     
    Le soir précédent le vote sur la loi agraire de César, nous
entendîmes beaucoup de bruit en provenance du forum – des coups de
marteau et des frottements de scie, des chants d’ivrognes, des acclamations,
des cris, des bris de vaisselle. À l’aube, un voile de fumée brune flottait
au-dessus de la zone située derrière le temple de Castor, où devait avoir lieu
le vote.
    Cicéron s’habilla avec soin et descendit au forum,
accompagné par deux gardes, deux membres de son personnel – moi-même
et un autre secrétaire – et une demi-douzaine de clients qui
désiraient être vus avec lui. Les rues et les ruelles conduisant à l’aire de
vote grouillaient de monde. Nombre de citoyens s’écartaient en reconnaissant
Cicéron pour le laisser passer. Mais il y en avait tout autant qui

Weitere Kostenlose Bücher