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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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promulguée. Puis il
convoqua une assemblée publique à laquelle participèrent Pompée et Crassus.
Cicéron se tenait avec les autres sénateurs et regarda Pompée se laisser
convaincre de proférer, pour la première fois de sa longue carrière, une menace
directe.
    — Cette loi est juste, affirma-t-il. Mes hommes ont
versé leur sang pour la terre romaine, et il n’est que justice qu’à leur
retour, une partie de cette terre leur revienne en récompense.
    — Soutiendrais-tu cette loi, lui demanda César non sans
fourberie, au cas où ses adversaires emploieraient la violence pour empêcher qu’elle
ne soit reçue ?
    — Si l’on vient avec l’épée s’opposer à cette loi,
répondit Pompée, je viendrai pour la soutenir en apportant même, avec l’épée,
le bouclier.
    La foule poussa un rugissement de plaisir. Cicéron ne toléra
pas d’en entendre davantage. Il se détourna et se fraya un chemin parmi les
sénateurs pour quitter l’assemblée.
    Les paroles de Pompée étaient en effet un appel aux armes.
Quelques jours plus tard, il commença à remplir Rome de ses soldats. Il paya
pour les faire venir de toute l’Italie et les installa dans des tentes à l’extérieur
de la ville ou dans des logements bon marché dans la cité même. Ils firent
entrer en fraude des armes illégales qu’ils dissimulèrent en attendant le
dernier jour de janvier, date à laquelle la loi devait être votée par le
peuple. Les sénateurs notoirement opposés à cette loi se faisaient insulter
dans la rue, et leurs maisons recevaient des pierres.
    L’homme qui orchestra cette campagne d’intimidation pour le
compte de la Bête à Trois Têtes était le tribun P. Vatinius, qui passait
pour être l’homme le plus laid de Rome. Il avait attrapé la scrofule lorsqu’il
était enfant et avait la figure et le cou couverts d’écrouelles bleuâtres. Il
avait également le cheveu rare et les jambes torses, de sorte qu’il marchait
les genoux écartés, comme s’il venait de faire une longue course à cheval ou
bien s’était souillé. Curieusement, il était doté d’un charme certain et se
moquait bien de ce qu’on pouvait dire de lui : il accueillait toujours les
plaisanteries de ses ennemis concernant son physique par d’autres, bien plus
drôles, de son cru. Les hommes de Pompée lui étaient fidèles, et le peuple
aussi. Il organisa de nombreux rassemblements publics en faveur de la loi de
César et fit même venir le consul Bibulus pour être interrogé à la tribune aux
harangues. Bibulus était pour le moins d’un caractère emporté, et Vatinius le
savait, aussi fit-il lier ensemble par ses gens des bancs de bois, pour
constituer un pont reliant les rostres au carcer . Et lorsque, comme
prévu, Bibulus dénonça la loi agraire en termes des plus violents – « Ta
loi ne passera pas cette année, pas même si vous voulez tous l’adopter ! » –,
Vatinius le fit arrêter et emmener par le pont jusqu’à la prison, comme un
otage des pirates contraint de subir le supplice de la planche.
    Cicéron assista à la plus grande partie de ces événements
depuis son jardin, emmitouflé dans un manteau pour se garder du froid de
janvier. Il se sentait très déprimé et s’efforça de rester en dehors de tout
cela. De toute façon, il ne tarda pas à avoir des problèmes plus pressants à
régler.
    Un matin, au milieu de tout ce tumulte, j’ouvris la porte et
trouvai Antonius Hybrida en train d’attendre dans la rue. Cela faisait plus de
trois ans que je ne l’avais pas vu, et je ne le reconnus pas tout de suite. La
bonne chère et le vin de Macédoine l’avaient fait beaucoup grossir tout en lui
donnant le teint plus fleuri encore, produisant l’impression qu’il avait été
tout entier recouvert d’une couche de graisse d’un rouge brouillé. Je le
conduisis dans la bibliothèque, et Cicéron sursauta comme s’il avait vu un
fantôme, ce qui, d’une certaine façon, n’était pas faux car c’était bien son
passé qui revenait le hanter – et lui réclamer vengeance. Au début de
son consulat, alors que les deux hommes venaient d’arriver à une entente,
Cicéron avait donné à Hybrida son accord écrit que, si jamais il était
poursuivi, il lui servirait d’avocat, et maintenant son ancien collègue venait
réclamer son dû. Il avait amené avec lui un esclave qui portait l’acte d’accusation,
et Hybrida le remit à Cicéron d’une main qui tremblait si violemment que

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