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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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cas, il faudra que j’y aille, déclara
Cicéron, et tout le monde s’écria aussitôt que ce ne serait pas prudent. Alors,
il faudra envoyer Tiron, conclut-il avant d’ajouter, en voyant mon expression d’horreur :
Il me faut sur place quelqu’un qui ne soit pas un soldat. J’aurai besoin d’un
compte rendu écrit par un témoin oculaire que je puisse remettre au sénat
demain. Flaccus et Pomptinus seront trop occupés à diriger les opérations.
    — Pourquoi pas Atticus ? suggérai-je – non
sans impertinence, j’en ai conscience aujourd’hui, mais heureusement pour moi,
Cicéron était trop préoccupé pour le remarquer.
    — Il sera responsable de ma sécurité à Rome, comme d’habitude,
répondit-il.
    Derrière Cicéron, Atticus m’adressa un haussement d’épaules
pour s’excuser.
    — Alors, Tiron, ajouta Cicéron, tu devras consigner
tout ce qu’ils diront par écrit, et surtout, mets les lettres à l’abri avec
leurs sceaux intacts.
     
    Nous partîmes à cheval bien après la tombée de la nuit :
les deux préteurs, leurs huit licteurs, quatre autres gardes, et enfin, très à
contrecœur, moi. Pour ajouter à mon malheur, j’étais très mauvais cavalier. Je
tressautais sur ma selle, une cassette à documents vide me cognant le dos en
rythme. Nous galopâmes sur les pavés et franchîmes la porte de la ville à telle
vitesse que je dus m’accrocher à la crinière de ma pauvre monture pour ne pas
tomber. Fort opportunément, la jument était tout à fait placide et sans nul
doute la réservait-on aux femmes et aux imbéciles car elle suivit la route qui
dévalait la colline pour s’enfoncer dans la plaine sans que j’eusse besoin de
la guider et sans se laisser distancer par les chevaux qui nous précédaient.
    C’était une de ces nuits où le ciel est en soi une aventure,
une lune brillante traçant son chemin dans un océan immobile de nuages
argentés. Sous cette odyssée céleste, les tombes qui bordaient la via Flaminia
s’éclairaient fugitivement, comme lors d’un orage silencieux. Nous gardâmes une
allure régulière pendant environ deux milles avant d’atteindre un cours d’eau.
Là, nous nous arrêtâmes et tendîmes l’oreille. J’entendais un bruit d’eau dans
l’obscurité et, en regardant devant moi, ne pouvais distinguer que les toits
plats de deux maisons voisines et la silhouette des arbres qui se découpaient
contre le ciel tourmenté. Tout près de nous, une voix masculine demanda le mot
de passe.
    — Aemilius Scaurus ! répondirent les préteurs, et
soudain, de part et d’autre de la route, les hommes de la centurie de Reate
émergèrent des fossés, la figure noircie de charbon de bois et de boue.
    Les préteurs divisèrent promptement la troupe en deux.
Pomptinus et ses hommes devaient rester où ils étaient, pendant que Flaccus
menait ses quarante légionnaires sur l’autre rive. Je ne sais pourquoi, mais il
me parut plus sûr d’être avec Flaccus, et je le suivis sur le pont. Le fleuve
était large, peu profond et très rapide sur les gros rochers plats. Je jetai un
coup d’œil par-dessus le parapet et vis les eaux bouillonner et se fracasser
contre les piles, plus de quarante pieds plus bas ; je compris alors quel
piège formidable formait ce pont, et que sauter pour éviter d’être pris
reviendrait à commettre un suicide.
    Dans la maison située sur l’autre rive, une famille dormait.
Ces gens commencèrent par refuser de nous laisser entrer, mais leur porte ne
tarda à s’ouvrir après que Flaccus eut menacé de la défoncer. Ils l’avaient
tant irrité qu’il les enferma dans leur cave. De la pièce du haut, nous avions
une vue très claire de la route, et nous nous y installâmes pour attendre. Le
plan était de laisser tous les voyageurs, de quelque direction qu’ils vinssent,
s’engager sur le pont, puis de les interroger quand ils arriveraient de l’autre
côté. De longues heures s’écoulèrent et pas une âme ne se présenta, si bien que
j’eus peu à peu la conviction que nous avions été joués. Soit aucune troupe de
Gaulois ne quitterait la ville ce soir-là, soit ils étaient déjà partis, soit
ils avaient emprunté une autre route. Je fis part de mes doutes à Flaccus, qui
secoua sa tête grisonnante.
    — Ils viendront, dit-il.
    Et quand je lui demandai ce qui le rendait si confiant, il
me répondit :
    — Les dieux sont avec Rome.
    Puis il croisa ses grandes mains sur son gros ventre et

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