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Crucifère

Crucifère

Titel: Crucifère Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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instant pour attendre.
    — Faute d’étoiles, dit Cassiopée, il est impossible de déterminer notre position avec précision. Mais je suppose que nous sommes à deux ou trois jours de notre destination. Il va nous falloir naviguer avec précaution. Le risque, c’est de s’échouer sur des rochers. Nous ne connaissons pas ces côtes. Qui peut dire les dangers qu’elles recèlent ?
    — Plaçons-nous de chaque côté du navire, et sondons le fond, proposa Kunar Sell.
    L’un des marins suggéra qu’on apporte des torches sur le pont, mais Cassiopée s’exclama :
    — Non ! Pas de torches. Rien qui puisse avertir nos poursuivants que nous nous déroutons. Puisque la lune est notre amie, mettons l’obscurité à profit et naviguons au plus près de la côte.
    Ainsi, après plusieurs mois de quête, Cassiopée se retrouvait dans une situation qui lui rappelait par bien des aspects celle qui l’avait vue quitter Marseille, près de deux ans auparavant. Seules différences : une felouque et un équipage grimé en Arabes s’étaient substitués à La Stella di Dio et à ses marins venus de toutes les rives de la Méditerranée ; Chefalitione et Conrad de Montferrat n’étaient plus là ; Kunar Sell s’était joint à son expédition, et Emmanuel avait remplacé Simon.
    Cassiopée regrettait parfois l’impatient jeune homme qui les avait accompagnés – son père, Taqi et elle – dans toutes leurs aventures. Si la Vraie Croix avait été retrouvée, c’était aussi en partie grâce à lui. Elle se remémora l’épisode où Simon s’était enfoncé son propre couteau d’armes dans le ventre, afin de vérifier si la croix qu’ils avaient découverte était bien la Vraie Croix… « Si cette croix est la Vraie Croix, Dieu ne permettra pas que je meure », avait-il alors déclaré. Il avait survécu. Mais cela prouvait-il quoi que ce soit ?
    Elle se rappela aussi que cette nuit-là, tandis qu’ils veillaient un Simon mal en point, elle avait déclaré à Morgennes : « Je sais qui tu es. »
    Quelle ironie ! Oui, Morgennes était bien celui que Philippe d’Alsace et Chrétien de Troyes l’avaient chargée de ramener : le chevalier dont les aventures avaient servi de modèle à Chrétien de Troyes pour Perceval, le héros de son dernier roman. Combien d’années avait-elle passées à parcourir l’Orient, à la recherche d’un mythe, d’une fiction, d’une légende – son père ?
    Et si le litterato n’avait pas réussi à terminer son Conte du Graal, faute d’inspiration peut-être, qui était-elle pour prétendre y arriver, alors que Morgennes continuait toujours de lui échapper ?
    Elle poussa un soupir, tandis que derrière elle Kunar Sell déclarait :
    — Arrêtons-nous là ! Plus près, nous risquons de nous briser…
    — Pourquoi ? demanda-t-elle.
    — Vous n’entendez pas ?
    Cassiopée prêta l’oreille, et perçut sur sa droite le bruit du vent dans les arbres, et des cris d’animaux – minuscules roucoulements d’oiseaux nocturnes, échangeant des signaux : « Par ici ! Nourriture ! »
    Plongeant les yeux dans une pénombre aussi épaisse que son désarroi, elle crut distinguer la ligne grise d’une côte, bordée d’arbres aux troncs pressés les uns contre les autres.
    — Oiselle, dis-moi…
    À peine eut-elle commencé sa phrase que l’oiselle quitta le bastingage pour s’envoler vers le rivage.
    Un cri perça l’obscurité. Cassiopée vit alors la forme d’un cavalier briller dans le lointain. Il se tenait, immobile et luminescent, tel un fantôme au sommet d’un phare.
    « Taqi ! » pensa aussitôt Cassiopée. Comment avait-il fait pour surgir ainsi, à l’autre bout du monde ? Elle ne perdit pas de temps à rechercher des explications, se contentant de dire à ses compagnons :
    — Par ici !
    Il y eut un autre cri dans les airs. Il provenait de l’endroit même que leur désignait Cassiopée.
    — Vous méritez le noble titre de « dame Oiselle », décréta finement Kunar Sell.
    — Elle mérite d’être appelée « gente dame », dit Emmanuel.
    Cassiopée ne commenta point ces gentilles paroles, mais indiqua à ses compagnons :
    — Ne le voyez-vous pas ?
    — Qui donc ? demanda Kunar Sell.
    — Le cavalier, tout là-bas, sur la côte. Il doit se tenir sur une falaise, car il me semble plus haut que la ligne d’horizon.
    Emmanuel et Kunar Sell tournèrent leurs regards vers l’endroit qu’elle leur indiquait,

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