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Crucifère

Crucifère

Titel: Crucifère Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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mais ne virent rien.
    — Même pas la plus petite étoile, dit Emmanuel sur un ton de regret.
    Cassiopée prit Rufinus dans ses bras et l’orienta vers le cavalier luminescent.
    — Et toi ? Le vois-tu ?
    Rufinus plissa les yeux, et susurra :
    — Il me semble que oooui… Je vois une ombre noooire au milieu des ooombres, elle se dessine en creux dans les ténèèèbres.
    — Mais ce n’est pas une ombre ! Au contraire, elle brille !
    Sa déclaration fut accueillie par un profond silence. Mais elle savait que c’était Taqi. Comme autrefois, dans le volcan, au pied du Krak des Chevaliers ou à l’orée de la porte de Fer, il était venu la sauver. Mieux que l’étoile des Rois Mages, il la guidait loin des périls, vers plus de sécurité. « Cousin Taqi, mon vieux compagnon de voyage, tu ne m’as donc point abandonnée… »
    Comme ils étaient presque à l’arrêt, des frondaisons surgirent soudain au-dessus d’eux, mains gigantesques venues les ôter de la mer pour les porter vers la gueule des forêts. Un marin poussa un cri, et se jeta à l’eau. Au bruit de son plongeon succéda celui de ses brasses, et il s’exclama bientôt :
    — Une plage !
    Il agitait les bras pour qu’on le voie.
    — Méfie-toi, malheureux, lui cria Emmanuel. Ne t’a-t-on pas dit que cette mer était infestée de requins ?
    — Et de crocodiles, ajouta placidement Kunar Sell en empoignant sa hache.
    L’homme eut un grand sourire – qui dessina une courte ligne blanche au-dessus des vagues. Apparemment, requins et crocodiles ne l’effrayaient pas.
    — Venez !
    On s’aida de ses signaux pour amener le navire au plus près de la côte, puis d’autres marins sautèrent par-dessus bord, bientôt suivis de Kunar Sell et d’Emmanuel – et tous tirèrent la felouque sur le rivage.
    — Encore un effooort, caqueta Rufinus en les encourageant depuis la proue. Comme ça, ouiii. C’est biiien !
    Un choc suivi d’un bruit de coque raclant le sable leur indiqua qu’ils avaient touché terre. Cassiopée sauta à son tour dans l’eau, et aida les marins à amener la felouque sous les arbres.
    — N’oubliez pas de raaabattre le mââât ! ajouta Rufinus.
    Prestes comme des singes, deux marins remontèrent à bord, retirèrent les cales qui maintenaient le mât en place et le déposèrent sur le pont. Avec un cri, leur vigie bondit dans les branches d’un jujubier, d’où elle leur adressa force signes de colère. Ils lui avaient pris son arbre ! Quand ils eurent suffisamment mis la felouque à couvert, trois hommes s’empressèrent d’en dissimuler le pont avec des feuilles de palmiers.
    — Maintenant, attendons, déclara Emmanuel.
    Le moment était venu de partir au ravitaillement. Deux groupes furent constitués, l’un chargé d’abattre perroquets, petits singes et fourmiliers, l’autre de découvrir une source où remplir les tonneaux.
    — Quant à moi, décréta Cassiopée, je veux grimper en haut de la falaise où j’ai cru voir mon cavalier.
    — Je viens avec toi, dit Emmanuel. Tu ne sais rien de ces contrées, ni quels dangers elles recèlent. Je ne veux pas qu’il t’arrive malheur.
    — Je reste pour garder le camp, dit Kunar Sell en enfonçant la base de sa hache dans le sable, en un geste de défi.
    Emmanuel et Cassiopée marchaient au plus près du rivage, tout en prenant soin d’éviter les vagues qui venaient régulièrement leur lécher les mollets. Il y faisait très sombre, si sombre qu’on aurait pu croire que la mer brillait plus que les cieux. Les arbres formaient une muraille confuse, vivante. Par intervalles, les branches s’agitaient sous l’effet d’une brise. Parfois, d’étranges murmures montaient des fourrés pour leur rappeler qu’ils n’étaient pas seuls.
    — Tu crois vraiment que c’était Taqi ? demanda Emmanuel en mettant ses pas dans ceux de Cassiopée.
    — Sûre et certaine.
    Avec un chuintement, elle s’arracha au sable détrempé avant d’y replonger la botte, au pas suivant.
    — Alors, il n’est pas en Enfer ?
    — Je ne sais pas. Je ne sais plus où est l’Enfer, ni si Taqi s’y trouve encore, ni même si mon père…
    Emmanuel garda le silence. Jamais, contrairement à Simon, il ne s’était exprimé au sujet de Morgennes. D’ailleurs, on aurait dit qu’il en avait fait son deuil, comme si Morgennes était mort en même temps que l’Emmanuel de l’Hôpital – le fier chevalier qui n’avait pas voulu laisser à Renaud

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