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Dans le jardin de la bête

Dans le jardin de la bête

Titel: Dans le jardin de la bête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erik LARSON
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était garée, s’il faisait encore ses promenades matinales au Tiergarten –, à l’affût de signes de ce qui se préparait pour lui, et pour l’Allemagne. Le jeudi 21 juin, Dodd et von Papen assistèrent à un discours de Hjalmar Schacht, le président de la Reichsbank. Après quoi, nota Dodd, von Papen parut recevoir plus d’attentions que l’orateur. Goebbels était également présent. Dodd remarqua que von Papen alla à sa table, lui serra la main et se joignit à lui pour une tasse de thé. Dodd était sidéré, car ce n’était plus le même Goebbels « qui, après le discours de Marbourg  19 , aurait donné l’ordre de son exécution immédiate si Hitler et von Hindenburg n’étaient intervenus ».
    L’atmosphère à Berlin restait explosive, nota Dodd dans son journal le samedi 23 juin. « La semaine se termine tranquillement  20 , mais on perçoit un grand malaise. »

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    L E MESSAGE DANS
LA SALLE DE BAINS
    V on Papen se déplaçait dans Berlin, apparemment sans encombre et, le 24 juin 1934, il se rendit à Hambourg pour représenter Hindenburg au Deutsche Derby, une course hippique, où la foule l’acclama avec ardeur. Goebbels arriva et se fraya un chemin dans la cohue derrière une phalange de soldats, déclenchant sifflets et huées. Les deux hommes se serrèrent la main pendant que les photographes immortalisaient l’événement.
    Edgar Jung, le rédacteur des discours de von Papen, cherchait à se faire oublier. À présent, il était convaincu que le discours de Marbourg allait lui coûter la vie. L’historien John Wheeler-Bennett fixa une rencontre clandestine avec lui dans un endroit boisé en dehors de Berlin. « Il était tout à fait calme et fataliste  1 , rapporta Wheeler-Bennett, mais il parlait avec la liberté de celui qui n’a aucune perspective et de ce fait, rien à perdre, et il m’a raconté beaucoup de choses. »
    La rhétorique du régime se faisait plus menaçante. Dans une allocution à la radio le lundi 25 juin, Rudolf Hess lança : « Malheur à celui qui manque à sa parole  2 , croyant que, en se révoltant, il sert la révolution. » Le Parti, déclara-t-il, affronterait toute rébellion avec une force absolue, conformément au principe : « Si tu frappes, frappe fort ! »
    Le lendemain matin, le mardi 26 juin, quand la gouvernante d’Edgar Jung arriva chez lui, elle trouva sa maison mise à sac, les meubles renversés, les vêtements et les papiers disséminés partout sur le sol. Sur l’armoire à pharmacie  3 , Jung avait griffonné un seul mot : GESTAPO.
     
    Diels se préparait à prêter serment en tant que président régional de Cologne. Göring vint sur place pour assister à l’événement. Son avion blanc apparut dans l’azur d’une « superbe journée d’été dans le Rheinland »  4 , selon les mots de Diels. Pour la cérémonie, ce dernier portait son uniforme noir des SS, Göring un uniforme blanc de sa conception. Après quoi, Göring s’entretint avec Diels et le mit en garde : « Faites attention dans les prochains jours. »
    Diels prit cet avertissement à cœur. Passé maître dans l’art de ménager ses sorties, il quitta la ville pour séjourner dans la région de l’Eifel, au sud de Cologne.

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    L E DÉSARROI
DE M ME  C ERRUTI
    L e jeudi 28 juin 1934, l’ambassadeur Dodd nota dans son journal : « Ces cinq derniers jours  1 , des nouvelles de toutes sortes ont contribué à rendre l’atmosphère de Berlin plus tendue qu’à aucun moment depuis mon arrivée en Allemagne. » Le discours de von Papen restait l’objet de discussions quotidiennes. Avec une férocité croissante, Hitler, Göring et Goebbels menaçaient de terribles représailles tous ceux qui oseraient s’opposer au gouvernement. Dans un câble adressé au Département d’État, Dodd comparait l’atmosphère menaçante à celle de la Révolution française : « La situation rappelle beaucoup ce qui se passait à Paris  2  en 1792, quand les Girondins et les Jacobins se disputaient le pouvoir. »
    Sa propre famille souffrait d’une source de tension supplémentaire qui n’avait rien à voir avec la météorologie ou l’agitation politique. Contre la volonté de ses parents, Martha s’obstinait à projeter un voyage en Russie. Elle soutenait que sa motivation n’avait aucun rapport avec le communisme en soi, mais tenait à son amour pour Boris et à son dégoût croissant pour la révolution

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