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Délivrez-nous du mal

Délivrez-nous du mal

Titel: Délivrez-nous du mal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Romain Sardou
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recouvert de neige.
    Bénédict observa le ciel et le jour qui baissait.
    Il retourna dans sa chambre et poussa un bahut afin de bloquer la porte.
    Pour commencer, il raviva l’un des poêles. Il entrebâilla la fenêtre puis ouvrit sa sacoche de cuir d’où il tira le morceau de pierre rouge et le sachet de poudre qu’il avait emportés avant de fuir sa boutique de Rome, ainsi que le creuset, le foret et la drille achetés à Ostie.
    Il releva la grille du poêle et posa le creuset à même les braises ; puis, patiemment, pendant plus d’une heure, il s’évertua à réduire sa pierre rouge en éclats fins. Ses mains le brûlaient, ses yeux lui piquaient et il étouffait par moments sous les fumées acides.
    Il alla réclamer de l’eau à la femme de Démétrios. Elle lui dit qu’il trouverait un puits sur la place du village. Bénédict lui demanda s’il pouvait goûter à l’huile que produisait son mari. Norma lui en fournit dans une fiole. Elle ajouta :
    — Il ne faut pas prêter attention aux propos de Démétrios, il s’emporte sur Evermacher. Moi, je l’aimais bien, ce vieux prêtre.
    Elle vérifia que son mari n’était pas présent et demanda d’une voix rapide et basse :
    — Est-il vrai qu’à Cantimpré toutes les femmes tombent enceintes et donnent le jour à leurs enfants sans endurer de souffrances ?
    Bénédict acquiesça, ce qui sembla réjouir cette femme à la foi douce.
    Avant de retourner dans sa chambre, il s’assura qu’à droite de la porte d’entrée se tenaient, comme dans toutes les bonnes maisons, plusieurs torches à résine, au cas où des événements se produiraient dans la nuit.
    Il poursuivit son opération sur le poêle : s’il en avait demandé un second à Norma, c’était pour pouvoir user d’une réserve supplémentaire de bois.
    Deux heures durant, il travailla sur le feu les résidus ardents de sa pierre. Enfin, de minces dépôts carbonisés se mirent à ondoyer à la surface d’un liquide argenté.
    Cette pierre était du cinabre et il venait d’en extraire quelques grammes de mercure.
    Satisfait, Gui le recueillit dans une coupelle et la posa sur le rebord enneigé de la fenêtre.
    L’opération suivante fut de plus courte durée. Il sublima un peu de mercure avec la poudre blanche de son sachet, qui était du soufre.
    — Nous y voilà.
    Il prit deux heures de repos, s’assura que le couple d’hôtes dormait profondément puis rouvrit le volet de sa fenêtre. Il observa la place du village, attentif au moindre bruit et au moindre mouvement.
    Il sortit de sa chambre, amortissant ses pas, glissant devant la porte de Démétrios et Norma, et quitta la maison.
    Dehors, tout était calme et glacé.
    La lune perçait les nuages, quelques animaux rôdaient dans les bois, Bénédict vit s’échapper un blaireau et entendit le cri poussé par un oiseau de nuit.
    Il ne craignait pas de se faire surprendre par des villageois à cette heure indue, il savait combien la nuit impressionnait les hommes de la campagne, surtout lorsque des forêts se dressaient si près des habitations.
    Il chemina jusqu’au cimetière et atteignit la sépulture d’Evermacher. Il s’approcha de la statue de sainte Monique. Il sortit le foret et la drille et se mit à percer un conduit au niveau de chaque paupière inférieure de la sainte, en prenant soin de récolter la poussière.
    Ensuite, à la seule lumière de la lune, il trempa le foret dans le mercure et, portion par portion, introduisit ce liquide dans les deux trous.
    Alors il se munit du vermillon qu’il avait produit en sublimant le mercure avec du soufre. Il était d’un rouge éclatant. Mêlé à un peu d’huile de Démétrios, il le fit entrer par petites touches avec l’extrémité du foret, puis finit par combler les orifices avec la poussière.
    Il se saisit d’une grosse pierre et martela la terre grasse afin d’effacer ses empreintes de pas sous la statue.
    Il retourna ensuite dans sa chambre.
    Avant l’aube, il quitta une nouvelle fois la maison de Démétrios et se dirigea vers la chapelle de Spalatro en emportant avec lui l’une des torches à résine suspendues près de la porte d’entrée.
    Il pénétra dans l’édifice étroit, sans ornements, qui comptait six bancs rangés devant un autel entouré de deux lumignons qui baignaient de leur éclat moribond un crucifix en bois et une icône de la Vierge à l’Enfant.
    Bénédict illumina sa torche à la flamme des lampes à huile ; la

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