Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Dernier acte à Palmyre

Dernier acte à Palmyre

Titel: Dernier acte à Palmyre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
Vom Netzwerk:
nettes, ils mangèrent des dattes enrobées de miel et applaudirent avec beaucoup de sérieux quand le spectacle fut terminé. Ensuite, comme à l’accoutumée, les femmes s’agglutinèrent autour de Philocrates, en nombre suffisant pour le rendre encore plus puant. Les hommes cherchèrent à agir de même avec Byrria mais durent se contenter des filles de l’orchestre. Chremes et Phrygia furent invités à partager le bon dîner d’un magistrat local. Et, pour une fois, nous fûmes tous payés.
    En d’autres circonstances, nous serions peut-être restés un peu plus longtemps. L’assassinat d’Ione nous en empêcha. Sa disparition dans des circonstances tragiques rendait la compagnie trop fiévreuse. Heureusement, la ville suivante était très proche : juste de l’autre côté de la vallée du Jourdain. Nous nous mîmes donc en route immédiatement pour Scythopolis.

33
    Scythopolis, connue naguère sous le nom de Nysa, celui de son fondateur, avait été dotée d’un nouveau nom pour créer la confusion et ajouter des difficultés de prononciation. À part cela, elle était complètement dépourvue de fantaisie. La cité occupait une position privilégiée sur la route longeant la rive ouest du Jourdain. Nous commencions à nous habituer à la vue qu’elle nous offrit : une citadelle haut perchée, où les Grecs avaient jadis érigé leurs temples, et des constructions récentes qui dévalaient la pente de la colline. À Scythopolis, pour notre plus grande déception, nous ne trouvâmes aucun signe du conflit qui l’opposait soi-disant à sa rivale Pella, de l’autre côté de la vallée.
    Les villes que nous visitions maintenant commençaient à perdre leur individualité. Celle-ci prétendait être la ville principale de la Décapole, mais ce n’était pas très original : une demi-douzaine d’autres revendiquaient le même titre. Scythopolis était effectivement aussi importante que les autres, ce qui signifiait pas très importante pour quelqu’un venant de Rome.
    Pour moi, cependant, cette cité avait quelque chose de différent. Elle possédait une particularité qui m’avait donné très envie de la visiter, mais qui me remplissait aussi d’effroi. Pendant la révolte juive, la Quinzième Légion de Vespasien y avait établi ses quartiers d’hiver. Légion qui avait maintenant quitté cette province pour partir en Pannonie. Ayant décidé de devenir empereur, son ancien commandant était rentré à Rome pour y accomplir une destinée plus remarquable. Mais aujourd’hui encore, l’atmosphère de Scythopolis paraissait plus romaine que celle des autres villes de la Décapole. Ses rues étaient superbes, des thermes magnifiques avaient été construits pour la troupe. Outre la monnaie locale, les boutiques acceptaient les deniers. Nous y entendîmes parler davantage le latin que dans tout le reste de l’Orient. Des enfants au physique étrangement familier jouaient dans la poussière…
    J’étais plus troublé que je ne voulais bien l’admettre. Et j’avais une bonne raison de l’être : un intérêt personnel dans le passé militaire de cette ville. Mon frère Festus avait servi dans la Quinzième Apollinaris. Sa dernière affectation, car il avait fait partie des morts de la campagne de Judée. Et avant de mourir, c’est ici qu’il avait vécu.
    Voilà ce que Scythopolis représentait pour moi. Je passai beaucoup de temps à en parcourir les rues, seul, en remuant des pensées personnelles.

34
    J’étais ivre.
    J’étais tellement ivre que, même moi, je ne pouvais pas faire comme si je ne m’en étais pas aperçu. Helena, Musa et leur visiteur, tranquillement assis autour du feu qui brûlait devant notre tente, se rendirent certainement compte de mon état du plus loin qu’ils me virent. Je déplaçais mes pieds avec un maximum de précautions dans le but de rejoindre mon accueillant bivouac. Ils observaient chacun de mes pas. Je dus cesser de penser à eux pour me concentrer afin de rester debout. Le feu ne m’apparaissait que comme une image floue, et j’avais peur de tomber la tête la première dans les braises.
    Grâce à une carrière déjà vieille de dix ans dans la débauche, je parvins néanmoins à atteindre la tente d’une démarche qui, je l’espérais, passait pour nonchalante. Elle était probablement aussi nonchalante que la chute d’un oisillon tombant du nid. Personne ne fit aucun commentaire.
    J’entendis Helena se lever, plutôt que je ne la vis.

Weitere Kostenlose Bücher