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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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scène qu'elle venait de
vivre lorsqu'elle poussa la porte d'entrée de son appartement. Somme toute,
elle était surtout fâchée d'être dans l'obligation de retourner à l'église pour
se confesser.
     
    Durant un court
moment, elle se demanda si elle ne serait pas mieux d'aller se confesser
immédiatement à la paroisse Saint-Eusèbe, mais devant la distance à parcourir,
     
    elle y renonça
aussitôt. Elle décida de retourner se confesser à son église la veille de
Pâques. À ce moment-là, elle ne courrait pratiquement aucun risque d'être
reconnue comme étant l'une des deux protagonistes de la dispute.
     
    — Est-ce qu'il y
avait ben du monde ? lui demanda sa mère lorsqu'elle pénétra dans la cuisine.
     
    — Il y en avait
ben trop, mentit Laurette en s'allumant une cigarette. Ils avaient ouvert juste
deux confessionnaux. J'ai trouvé que ça avait pas d'allure d'être obligée
d'attendre aussi longtemps que ça.
     
    — Est-ce que ça
veut dire que t'es allée là pour rien ? Tu t'es pas confessée ?
     
    — C'est pas
grave, m'man. Ça m'a fait prendre l'air. J'y retournerai vendredi soir ou
samedi après-midi, quand Gérard pourra garder les petits.
     
    Évidemment,
Laurette ne raconta sa mésaventure ni à sa mère ni à son mari. Elle espérait
seulement que personne ne l'avait reconnue dans la pénombre de l'église.
     
    Au presbytère, il
fut cependant impossible de passer sous silence la scène disgracieuse qui
s'était produite dans le temple. Dès que le curé Crevier et ses deux vicaires
eurent pris place autour de la table de la salle à manger, Florent Saintonge,
toujours aussi gamin, ne manqua pas l'occasion de s'amuser aux dépens de son
confrère.
     
    — Puis, Raymond,
il paraît que t'es devenu tellement populaire chez les pécheurs de la paroisse
qu'ils se battent pour entrer dans ton confessionnal ? Pour moi, tu donnes pas
d'assez grosses pénitences...
     
    Le curé leva la
tête et scruta la figure joufflue de l'abbé Léger. Ce dernier rougit, mais ne
dit rien.
     
    — De quoi vous
parlez, l'abbé? demanda sèchement Anselme Crevier au cadet de ses vicaires.
     
    — Je voulais
parler des deux femmes qui ont arraché une porte du confessionnal de Raymond
tellement elles
     
    étaient pressées
de se confesser à lui, fit le jeune prêtre, inconscient de mettre son confrère
dans l'embarras.
     
    Le curé déposa
bruyamment sa cuillère à soupe avant de s'adresser à Raymond Léger.
     
    — Qu'est-ce que
c'est encore que cette affaire-là ?
     
    — C'est comme
Florent vient de vous le raconter, monsieur le curé, dit le prêtre, en fixant
la table.
     
    — Et qu'est-ce
que vous avez fait avec ces deux furies ?
     
    — Rien, monsieur
le curé. Le temps d'arriver à sortir du confessionnal, elles avaient toutes les
deux disparu. Je sais même pas de quoi elles avaient l'air.
     
    — Elles avaient
disparu ! Mais ça vous a pris combien de temps pour sortir de là, l'abbé ?
demanda le curé, l'air menaçant. Dormiez-vous ?
     
    — Ça m'a pas pris
plus qu'une minute ou deux, monsieur le curé. Il faut dire que le confessionnal
est pas mal étroit et, vous comprenez...
     
    — C'est sûr que
si vous mangiez moins, vous seriez pas mal plus agile, lui fit méchamment
remarquer son supérieur.
     
    Chapitre 17
     
    I
     
    Les enfants
     
    Le quatrième
enfant des Morin naquit au milieu de la première véritable canicule de l'été
1939, dans des conditions que Laurette n'aurait jamais imaginées, même dans ses
pires cauchemars.
     
    Depuis plus d'une
semaine, la chaleur écrasait Montréal comme une chape de plomb, rendant pénible
le moindre mouvement. L'atmosphère était saturée par les odeurs en provenance
de la Dominion Rubber et de la Dominion Oilcloth. La future mère peinait à
prendre soin de ses enfants durant la journée et n'aspirait qu'au moment où
elle pourrait les mettre au lit, le soir, après le souper, pour enfin se
reposer.
     
    Ce soir-là,
Gérard et Laurette s'apprêtaient à passer la soirée sur leur balcon, comme tous
les habitants des vieilles maisons de la rue Notre-Dame. La grande cour
retentissait des cris des nombreux enfants dont les jeux bruyants ne
cesseraient qu'au coucher du soleil, sous la surveillance plutôt distraite des
parents. Comme chaque soir, un silence relatif ne tomberait sur le quartier
qu'à la tombée de la nuit. Les Morin venaient à peine de s'asseoir, en quête
d'un souffle d'air frais qui ne venait pas, quand une

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