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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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leurs
relations. Elle avait eu beau plastronner devant sa mère le printemps
précédent, la démarche n'était pas aussi facile qu'elle l'avait laissé
entendre.
     
    Elle avait
presque trente ans et avait décidé que Carole serait son dernier enfant. Elle
devait donc prendre les
     
    moyens pour qu'il
en soit ainsi, mais rien ne l'assurait que son mari serait d'accord avec elle.
Et elle éprouvait une gêne indéniable à parler ouvertement d'une chose aussi
intime, même avec lui.
     
    Finalement,
l'urgence de la situation la poussa à se jeter à l'eau, un soir, après le
coucher des enfants, alors que Gérard venait d'éteindre la radio. En cette
soirée de la mi-septembre, l'air particulièrement doux pénétrait par la porte
moustiquaire de la cuisine.
     
    — C'est de valeur
de plus pouvoir aller s'asseoir dans le salon, le soir, quand on a le goût, lui
fît-elle remarquer.
     
    — On n'avait pas
le choix. On n'était pas pour coucher les trois gars dans la chambre du fond
une fois la petite venue au monde.
     
    — Là, ça veut
dire, qu'on n'a plus de place pantoute pour recevoir le monde, reprit Laurette.
Il nous reste juste la cuisine pour veiller.
     
    — Ouais.
     
    — Sais-tu que
c'est un signe, ça...
     
    — Un signe de
quoi ? demanda Gérard en lui jetant un regard intrigué.
     
    — Un signe que
notre famille est faite. Si on en a un autre, où est-ce que tu veux qu'on le
mette ?
     
    — Ben, je sais
pas trop, fit-il, hésitant.
     
    — On est rendu à
cinq, Gérard. Je pense que c'est le temps qu'on s'arrête, tu trouves pas ? On a
un cinq appartements et c'est déjà trop petit pour nous autres. En plus, on a
toutes les misères du monde à joindre les deux bouts.
     
    — Mais on arrive
pareil, avança Gérard.
     
    — Je te ferai
remarquer que c'est en tirant le diable par la queue, répliqua-t-elle. Ces
enfants-là vont vieillir et ils vont coûter de plus en plus cher à habiller et
à nourrir. Penses-y.
     
    — T'as peut-être
raison.
     
    — Oublie pas non
plus que j'ai été en famille presque tous les ans depuis qu'on est mariés. Sept
fois en neuf ans, c'est pas rien. Je suis fatiguée d'être poignée pour
accoucher presque chaque année.
     
    — Il y a des
familles pas mal plus grosses qui restent autour, lui fit remarquer Gérard.
     
    — C'est pas une
raison pour les imiter. J'ai pas envie qu'on se fasse montrer du doigt comme
certaines familles de la rue Archambault qui ont dix et douze enfants. Regarde
chez vous, ta mère a eu juste deux enfants.
     
    — Parce qu'elle
s'est mariée sur le tard.
     
    — Chez nous, ma
mère en a eu quatre.
     
    — Quatre?
     
    — Ben oui. Si
elle avait pas perdu mon frère Joseph en 1918, on aurait été quatre.
     
    — Bon. C'est
correct. Qu'est-ce qu'on fait? finit-il par demander.
     
    — On va prendre
les moyens qu'il faut pour arrêter ça
     
    là.
     
    — Et ça va être
permis, cette affaire-là ?
     
    — Inquiète-toi
pas pour ça. Ça regarde juste nous deux.
     
    A compter de ce
jour, l'affaire fut entendue et il n'en fut plus question.
     
    Quelques semaines
plus tard, Laurette décida de se reprendre en main après avoir vainement tenté
d'entrer dans une robe qu'elle portait avant sa dernière grossesse.
     
    — Maudit verrat !
ragea-t-elle en cherchant à la boutonner, veux-tu ben me dire ce qui est arrivé
à cette robe-là ? Est-ce qu'elle a rapetissé ?
     
    Elle essaya tour
à tour les deux autres robes qui constituaient le gros de sa garde-robe pour
découvrir qu'elles ne lui allaient pas davantage. Dépitée, elle dut alors se
rabattre sur l'une des deux robes qu'elle portait alors qu'elle était enceinte.
     
    Lors d'une visite
d'Annette quelques jours plus tard, Laurette n'était guère de meilleure humeur
quand sa mère lui demanda pourquoi elle avait encore une robe de maternité sur
le dos.
     
    — J'ai pas le
choix, bonyeu, les autres me font plus ! explosa-t-elle.
     
    — Comment ça ? Va
me chercher tes robes que je regarde ça.
     
    — Je comprends
rien là-dedans, m'man. Bout de viarge, j'ai tout de même pas engraissé à ce
point-là! s'écria Laurette en jetant ses robes sur la table de cuisine. Il y a
plus rien qui me fait.
     
    — Tu vas d'abord
te calmer les nerfs et parler autrement, fit sa mère, sévère. Oublie pas que tu
parles devant tes enfants. En v’là un exemple à leur donner !
     
    — Qu'est-ce que
vous pouvez faire avec mes robes, m'man ? demanda Laurette, contrite de

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