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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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s'être
emportée.
     
    Annette examina
avec soin les vêtements avant de laisser tomber son verdict.
     
    — Il y a rien à
faire. Je peux pas te les agrandir. Il y a pas assez de matériel. Tu vas être
obligée de t'acheter du matériel ou ben de t'acheter une robe toute faite.
     
    — Aie ! Ça, ça
tombe mal, avoua sa fille, dépitée. Juste au moment où il faut faire venir du
charbon et un baril d'huile.
     
    Sa mère n'ajouta
rien. Elle était beaucoup plus diplomate que Lucille Morin. Et cela valait
mieux ainsi.
     
    La semaine
suivante, les beaux-parents de Laurette s'arrêtèrent une petite heure rue
Emmett. Il faisait froid
     
    en ce début de
novembre et le ciel gris laissait présager la première neige de la saison.
Conrad et Lucille n'avaient pas revu le bébé depuis sa naissance et
s'extasièrent sur la bonne mine de Carole qui avait eu deux mois quelques jours
auparavant.
     
    — Si ça vous fait
rien, on va s'installer dans la cuisine, s'excusa Gérard. A cette heure, on n'a
plus de salon.
     
    — C'est pas
grave, fit son père en le suivant dans le couloir après avoir abandonné son
manteau sur le lit de la chambre de son fils.
     
    Laurette servit
une tasse de thé à ses beaux-parents et on parla longuement de Colombe, de
Rosaire ainsi que des transformations que subissait Saint-Hyacinthe depuis le
début de la guerre. Après être venus embrasser leurs grands-parents, les
enfants avaient regagné leurs chambres pour s'y amuser. A un certain moment, le
bébé se réveilla et Lucille accompagna sa bru dans sa chambre.
     
    Pendant que la
mère changeait les langes de Carole, sa belle-mère l'examinait d'un œil
critique.
     
    — Mon Dieu,
Laurette ! s'exclama-t-elle, je pense bien que je vous ai jamais vue aussi
grosse.
     
    Laurette rougit
violemment et se retint à grand-peine de formuler une réplique cinglante.
Lucille ne comprit pas le danger et insista plus lourdement encore.
     
    — Vous avez bien
dû prendre au moins vingt livres depuis le printemps passé.
     
    — Inquiétez-vous
pas avec ça, madame Morin, je vais les perdre vite, répliqua sèchement
Laurette.
     
    — Je l'espère
pour vous, ma fille. Comme je vous l'ai déjà dit, les hommes aiment pas
beaucoup les femmes trop grasses.
     
    — Je le sais.
     
    — Si encore vous
preniez l'habitude de toujours porter un corset, il me semble que ce serait
moins pire.
     
    — Charriez pas,
belle-mère ! s'emporta Laurette, à bout de patience. Il y a tout de même des
limites ! Me voyez-vous faire mon ménage et mon lavage poignée dans un corset ?
     
    — Moi, ce que j'en
disais, c'était pour vous, Laurette, dit Lucille, se rendant subitement compte
qu'elle venait d'insulter sa bru.
     
    — Occupez-vous
pas de ma graisse, madame Morin, lui conseilla abruptement la jeune femme. Elle
a l'air de vous fatiguer ben plus que moi.
     
    Cette
conversation eut l'effet de jeter, encore une fois, un froid entre les deux
femmes. Lucille avait vraiment un don pour se mettre Laurette à dos, et les
années ne semblaient pas le lui avoir appris. Elle aurait dû savoir depuis
longtemps que cette dernière ne supportait aucune remarque sur son excédent de
poids.
     
    Après le départ
de ses parents, Gérard ne put s'empêcher de demander à sa femme :
     
    — Veux-tu ben me
dire ce qui s'est encore passé entre toi et ma mère ? Taboire ! On dirait que
chaque fois que vous vous rencontrez, ça finit mal.
     
    — Il s'est rien
passé, mentit Laurette.
     
    — Aïe !
prends-moi pas pour un fou ! Il y avait juste à vous regarder toutes les deux
quand vous êtes revenues de la chambre pour s'apercevoir que vous vous étiez encore
dit des bêtises.
     
    — J'ai été ben
polie avec ta mère, tu sauras, même si elle m'a encore jeté en pleine face
qu'elle me trouvait trop grosse.
     
    — Voyons donc !
     
    — Je te le dis.
Il y a des fois que je l'haïs à mort, ta mère.
     
    — Je suis sûr que
c'était pas méchant, l'excusa Gérard. Tu la connais. Elle peut pas s'empêcher
de dire toujours tout ce qu'elle pense.
     
    — Ben j'aimerais
mieux qu'elle pense moins, rétorqua sèchement Laurette. Est-ce que je lui dis,
moi, que je la trouve maigre à faire peur et qu'elle fait dur avec tous les
plis qu'elle a dans le visage ?
     
    — Laurette !
     
    — C'est correct.
J'ai rien dit. Toi, est-ce que tu me trouves trop grosse ? demanda-t-elle en
épiant le visage de son mari pour voir s'il lui disait la vérité.
     
    — Pantoute.

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