Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Des souris et des hommes

Des souris et des hommes

Titel: Des souris et des hommes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: John Steinbeck
Vom Netzwerk:
Ils ont pas de futur devant eux.
    Lennie était ravi.
    — C'est ça... c'est ça. Maintenant,
raconte comment c'est pour nous.
    George continua :
    — Pour nous, c'est pas comme ça.
Nous, on a un futur. On a quelqu'un à qui parler, qui s'intéresse à nous. On a
pas besoin de s'asseoir dans un bar pour dépenser son pèze, parce qu'on n'a pas
d'autre endroit où aller. Si les autres types vont en prison, ils peuvent bien
y crever, tout le monde s'en fout. Mais pas nous.
    Lennie intervint.
    — Mais pas nous ! Et
pourquoi ? Parce que... parce que moi, j'ai toi pour t'occuper de moi, et
toi, t’as moi pour m'occuper de toi, et c'est pour ça.
    Il éclata d'un rire heureux.
    — Continue maintenant, George !
    — Tu l’ sais par cœur. Tu peux
le faire toi-même.
    — Non, toi. Y a toujours des choses
que j'oublie. Dis-moi comment que ça sera.
    — Ben voilà. Un jour, on réunira tout
not' pèze, et on aura une petite maison et un ou deux hectares et une
vache et des cochons et...
    —  On vivra comme des rentiers ,
hurla Lennie. Et on aura des lapins . Continue, George. Dis-moi ce qu'on
aura dans le jardin, et les lapins dans les cages, et la pluie en hiver, et le
poêle, et la crème sur le lait qui sera si épaisse qu'on pourra à peine la
couper. Raconte-moi tout ça, George.
    — Pourquoi que tu le fais pas
toi-même, tu le sais tout.
    — Non... raconte, toi. C'est pas la
même chose si c'est moi qui le fais. Continue... George. Comment je soignerai
les lapins ?
    — Eh bien, dit George, on aura un
grand potager, et un clapier à lapins, et des poulets. Et quand il pleuvra,
l'hiver, on dira : l’ travail, on s'en fout ; et on allumera du
feu dans le poêle, et on s'assoira autour, et on écoutera la pluie tomber sur
le toit... Merde !
    Il sortit son couteau de poche.
    — J'ai pas le temps de t'en dire
plus.
    Il enfonça son couteau dans le couvercle
d'une des boîtes, l'ouvrit et passa la boîte à Lennie. Ensuite, il ouvrit la
seconde. Il sortit deux cuillères de sa poche et en passa une à Lennie.
    Assis près du feu, ils s'emplirent la
bouche de haricots et mâchèrent fortement. Quelques haricots tombèrent de la
bouche de Lennie. George fit un geste avec sa cuillère.
    — Qu'est-ce que tu diras demain quand
le patron te posera des questions ?
    Lennie cessa de mâcher et avala. Son
visage était concentré.
    — Je... J’lui dirai... J’lui dirai
pas un mot.
    — Bravo ! Parfait, Lennie !
Des fois, tu fais peut-être des progrès. Quand on aura nos deux hectares, j’te
laisserai soigner les lapins, pour sûr. Surtout si tu te rappelles aussi bien
que ça.
    Lennie s'étranglait d'orgueil.
    — J’peux me rappeler, dit-il.
    George, de nouveau, fit un geste avec sa
cuillère.
    — Écoute, Lennie, j’veux que tu
regardes bien comment que c'est fait ici. Tu pourras bien te rappeler cet
endroit, n'est-ce pas ? Le ranch est à environ un quart de mille, dans
cette direction. Y a qu'à suivre la rivière.
    — Pour sûr, dit Lennie, j’peux me
rappeler ça. Est-ce que je m'suis pas rappelé qu'il fallait pas que j’dise un
mot ?
    — Naturellement. Eh bien, écoute.
Lennie... si tu t'attires encore quelque sale affaire, comme tu l'as déjà fait,
tu viendras ici tout de suite et tu te cacheras dans les fourrés.
    — Tu te cacheras dans les fourrés,
dit Lennie lentement.
    — Tu te cacheras dans les fourrés
jusqu'à ce que je vienne te chercher. Tu pourras te rappeler ça ?
    — Oui, bien sûr, George. J’me
cacherai dans les fourrés jusqu'à ce que t’arrives.
    — Seulement, faudra pas t'attirer
d'histoire, parce que, dans ce cas, j’te laisserai pas soigner les lapins.
    Il lança sa boîte vide dans les buissons.
    — Non, j’m'attirerai pas d'histoire,
George. J’dirai pas un mot.
    — Très bien. Apporte ton ballot ici,
près du feu. On sera bien ici pour dormir. Les yeux en l'air, et les feuilles.
Ranime pas le feu. On va le laisser tomber.
    Ils firent leur lit sur le sable, et, à
mesure que les flammes baissaient, le cercle de lumière se rétrécissait. Les
branches sinueuses disparurent, et il n'y eut plus qu'une lueur pâle pour
révéler où se trouvaient les troncs des arbres. Lennie appela dans les
ténèbres :
    — George... tu dors ?
    — Non. Qu'est-ce que tu veux ?
    — Faudra avoir des lapins de couleur
différente, George.
    — Oui, bien sûr, dit George
somnolent. On en aura des rouges, des verts et puis des bleus, Lennie.

Weitere Kostenlose Bücher