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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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vous savez. Le nom du scélérat, d’abord ?
    – Sire, dit Léonor, mon père a été tué par Juan Tenorio, fils de don Luis Tenorio, noble homme de Grenade et Séville…
    – Ah ! fit l’empereur. J’ai entendu parler du père en fort bons termes. Don Luis Tenorio était un bon serviteur. Je savais qu’il avait laissé un fils, mais j’ignorais que ce fils se trouvât à Paris.
    Et brusquement :
    – Mais vous-même, Léonor, qu’êtes-vous venue faire à Paris ?
    Léonor frissonna. Son fier visage pâlit encore et ses mains tremblèrent légèrement. Tout ce qu’il y avait de bravoure dans ce cœur de vierge se mit en garde. Tout ce qu’il y avait en elle de pur orgueil se révolta à la pensée qu’il faudrait raconter comment et pourquoi Christa était morte ! Et, qu’elle-même, Léonor, était persécutée par la passion de celui qui avait fait mourir sa sœur.
    C’étaient là des secrets de famille : l’honneur du nom y était engagé. L’empereur était l’empereur : mais il n’avait rien à voir dans le secret de Christa !…
    Simplement, elle répondit :
    – Sire, je suis venue à Paris pour informer mon père d’un douloureux événement que je n’ai pas voulu lui apprendre par lettre : la mort de ma sœur aînée emportée en quelques heures par une fièvre que l’art même des médecins arabes fut impuissant à combattre…
    À bout de forces, Léonor éclata en sanglots.
    – Quoi ! murmura Charles-Quint en tressaillant, tant de malheur en si peu de temps ! Pauvre fille ! Allons, allons, remettez-vous, Léonor !… Par Notre-Dame, je vous ferai oublier tout ce deuil, autant que de pareilles infortunes se puissent oublier. Ne pleurez donc pas…
    – Sire, dit Léonor, je demande pardon de ma faiblesse à Votre Majesté… ces larmes que je répands à toute heure dans le secret de ma maison, c’est malgré moi qu’elles ont coulé devant vous.
    – Elle est adorable, songea François I er .
    – Et ce Juan Tenorio, savez-vous ce qu’il faisait à Paris ? reprit l’empereur.
    – Belle question ! se dit Loraydan. Ce Juan Tenorio est à Paris pour Léonor, c’est clair : et il a tué le Commandeur parce qu’il lui refusait sa fille…
    – Non, sire, dit Léonor sans hésitation. Je ne sais pas, je ne veux pas savoir pourquoi cet homme se trouvait à Paris. Mais je suis sûre que mon vénéré père avait contre lui un puissant motif de haine, car lorsque Juan Tenorio a osé pénétrer hier jusque dans la salle de cet hôtel, le Commandeur lui a dit en quel mépris il le tenait…
    – Et c’est alors que ce Juan Tenorio a meurtri mon brave Ulloa ? Par le ciel, il sera cherché, on le trouvera, et il subira la mort des assassins…
    Léonor tressaillit. La vaillante, la noble créature s’affirma qu’elle n’avait pas le droit de profiter de ces dispositions de l’empereur, que sa franchise immaculée ne devait pas s’abriter derrière un semblant de mensonge… Elle redressa la tête et, intrépide jusqu’au bout, se jura de dire l’exacte vérité.
    – Sire, dit-elle, je hais cet homme. Mon mépris seul peut égaler l’horreur qu’il m’inspire. S’il fallait verser mon sang pour assurer la vengeance de… de mon père, dis-je, oui, je donnerais mon sang pour que meure Juan Tenorio. Mais devant Dieu qui m’écoute, je dois établir la vérité. Si mon père pouvait s’éveiller un instant, il dirait ce que je vais dire : Juan Tenorio n’a point assassiné… il a tué le Commandeur en combat singulier, et hormis la disproportion des âges, ce combat fut loyal d’un bout à l’autre. Je dois même proclamer que Juan Tenorio, d’abord, refusa la provocation de mon père. Je dois dire que mon père fut obligé de lever la main sur lui pour l’obliger à dégainer. Au premier contact, l’épée de Juan Tenorio se brisa contre celle de mon père. D’un accord tacite, les deux adversaires se servirent alors de leurs dagues : ce fut mon père qui tomba !
    – Vous étiez là, dona Léonor ?
    – J’étais là ! répondit Léonor avec une tragique simplicité.
    Il y eut un long moment de silence funèbre pendant lequel les deux monarques, chacun à sa façon, admirèrent l’attitude de cette noble fille. Combien plus ils l’eussent admirée s’ils eussent compris tout ce qu’il y avait de pur, de brave, d’infiniment honnête dans ce récit qu’elle venait de faire, dans ce récit où elle lavait du crime

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