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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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revint sur l’intrus en grognant :
    – Dehors ! Tout de suite !…
    Bel-Argent se dandina, et plus souriant que jamais :
    – C’est que, dit-il, Bel-Argent, c’est mon nom, à moi ! Et vous dites que ce cabaret… heu… on y boit des choses… des choses… Voilà, mon brave !
    Brisard fit tournoyer son bâton, et réitéra :
    – Dehors ! Ou je cogne !…
    Et Bel-Argent, de plus en plus aimable :
    – Alors… ce gentilhomme… tu l’as vu s’en aller ?… Tu l’as vu sortir ?…
    – Ah ! ah ! fit Brisard qui abaissa son arme. Tu demandes après ce jeune gentilhomme ?
    – Sans doute, puisque c’est mon maître… Du moins, je le suppose ainsi. Car si ce n’est mon maître, le sire Clother de Ponthus, qui ce pourrait-il être ?
    – C’est juste, dit Brisard qui, d’ailleurs, n’avait rien compris à ce raisonnement.
    – Alors, tu l’as vu ? Dis-le-moi, et foi de Bel-Argent, je t’emmène dans mon cabaret, c’est-à-dire… le cabaret qui me vole mon nom… Tu l’as vu ? Tu l’as vu sortir ?…
    Et tout naturellement Brisard répondit :
    – Ma foi non : je l’ai vu entrer, mais je ne l’ai pas vu sortir. (Je ne sais pas pourquoi je me donnerais le mal de mentir à quelqu’un qui n’est qu’un valet comme moi.) Je l’ai donc vu entrer. Mais quand tous les diables y seraient, de l’avoir vu sortir, c’est une autre affaire : je ne l’ai point vu !…
    – Je ne comprends pas, dit Bel-Argent. Tu l’as vu… et tu ne l’as point vu… Heu… pas la peine d’essayer de comprendre… c’est trop difficile.
    Et résolument :
    – Viens-nous-en à mon cabaret, c’est moi qui paye !
    Irrésistible était l’invite ainsi formulée. Brisard s’avoua que ce confrère avait d’aimables façons. Il suivit, ferma le portail de l’hôtel, et bientôt les deux héros furent attablés devant un broc tout frais tiré de la cave : Brisard était un fervent habitué du lieu et l’hôtesse le ménageait.
    La conversation qui s’engagea fut longue, nébuleuse, de plus en plus inextricable, et lorsque, longtemps après, les deux valets se quittèrent en se promettant de se revoir :
    – Quel bélître ! pensait Brisard. Il ne comprend rien à rien. Mais il boit bien…
    – L’idiot ! se disait Bel-Argent. Plus bête encore que Corentin. Mais il lève bien le coude…
    Bel-Argent arriva au logis de la rue Saint-Denis où il fut fort étonné de ne pas retrouver le sire de Ponthus. Il médita longuement sur cette absence qu’il désapprouvait, puis il finit par se dire :
    – Bon ! Il aura été boire avec le sire de Loraydan. Mais les deux maîtres boivent-ils mieux que les deux valets ?
    Clother avait cédé à Bel-Argent une petite chambre de son appartement.
    C’est dans cette chambre, assis au bord de son lit, que l’ancien routier méditait sur la question de savoir si le seigneur de Ponthus buvait mieux que lui. Ne pouvant arriver à résoudre cet important problème, il finit par s’allonger sur le lit, et tout aussitôt, s’endormit d’un sommeil sans rêves.
    Bel-Argent dormit tout le reste de ce jour, toute la nuit, et se réveilla le lendemain aux abords de midi, la tête lourde, l’estomac creux, les idées confuses. Il eut vite fait de se rafraîchir la tête et de se remettre en bon état. Quand il se trouva présentable, il pénétra dans la chambre de son maître, dont il constata l’absence. Il supposa d’abord que M. de Ponthus était déjà sorti sans avoir eu besoin de ses services, mais le lit non défait démentait cette hypothèse…
    Bel-Argent passa le reste de ce jour à attendre… mais M. de Ponthus ne revint pas.
    La journée du lendemain, Bel-Argent erra dans la rue Saint-Denis et multiplia les stations à la Devinière. Il était inquiet. Mais nous devons dire que cette inquiétude n’allait pas jusqu’à l’émotion. Bel-Argent, parmi tant d’hypothèses, en vint à se dire que le sire de Ponthus avait été tué, peut-être.
    – Ma foi, je le regrette, se disait-il avec la rude philosophie des routiers de cette époque. C’était un bon maître. Il payait bien. Pour lui éviter une vilaine estocade j’eusse volontiers risqué de me faire embrocher. S’il est mort, je boirai un flacon en son honneur, et ferai aussi dire une messe pour son repos. Puis, je demanderai au seigneur Juan Tenorio de me prendre à son service. Pour cela, il sera nécessaire que je me mette au mieux avec le damné Jacquemin

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