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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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sangloter.
    Debout à quelques pas derrière elle, don Juan Tenorio la contemplait…
     
    Le coup d’épouvante l’avait terrassé d’abord, comme les quatre. Sa force d’expansion vitale et, peut-être son irréductible scepticisme, lui avaient épargné les longs pourparlers avec le délire ; le quatrième jour, la fièvre avait abandonné le champ de bataille ; le sixième il était debout. Mais, l’esprit encore assiégé de ce qu’il croyait des fantasmes, il se tint au logis, tendit sa volonté à ordonner ses souvenirs et déblayer son imagination.
    Du méthodique et lucide travail auquel il se soumit, il résulta que Canniedo, Zafra, Girenna, Veladar avaient résolu sa mort parce qu’ils avaient appris des choses qui, sûrement, d’après tant de précautions qu’il avait prises, eussent dû leur rester à jamais inconnues. Son véritable tourment fut d’établir comment il avait pu se tromper au point que ces précautions vraiment très fortes fussent restées illusoires.
    Cet obscur problème le retint deux heures et c’était beaucoup ; car, dès longtemps, il s’était imposé d’accepter les événements accomplis en écartant avec vigueur toute envie de rechercher leur origine… à quoi bon poser le pourquoi ? Le fait était ou n’était pas. Voici la solution qu’il adopta :
    Le fait était que les quatre avaient voulu le tuer… Eh bien, il nia le fait ! Il le nia sans appel. Il le biffa. Mais alors… quoi ? Eh bien, le xérès et l’alicante expliquaient l’aventure ! Dans la réalité, les quatre n’avaient pas dit un mot de Silvia, ni de Christa, ni de Laura, ni de Rosa. Comme d’ordinaire, après une de leurs ivresses, il les avait quittés joyeux et paisibles, pas très sûr ni du lieu ni de l’heure. Il était rentré chez lui, sans trop savoir. Pour une cause ignorée, indifférente d’ailleurs, la fièvre l’avait saisi. La fièvre ! C’est la fièvre qui avait inventé les quatre poignards luisants et tremblotants, la pointe dans la table, et les insouciants bons amis s’érigeant en justiciers, en bourreaux, et cette formidable vision, preuve définitive de l’inanité de toute la scène : la table se dressant, marchant sur lui, prise de folie ! Est-ce qu’une table peut marcher toute seule ailleurs que dans les rêves ? Est-ce qu’une table peut devenir folle ?… C’était une suggestion des vins trompeurs, donc tout le reste…
    Très bien.
    Restait ceci : Christa avait dû venir dans la chapelle de Saint-François. Que pouvait penser Christa ? Et que lui pourrait-il dire, lui ? Cette question, il l’écarta, tout simplement. Il refusa de se mettre en quête de l’explication qu’il fournirait. Recherche inutile. Jamais il n’avait consenti d’avance à adopter un plan – c’est une chaîne aux mains, un boulet aux pieds. Mais sur l’instant, dans un éclair de génie, créer la manœuvre nécessaire ! Inspiré par l’événement, lancer le mot définitif ! D’une pensée libre des entraves de la préméditation, laisser jaillir, étincelant, irrésistible, vainqueur du doute, le mensonge sauveur, le sublime mensonge plus vrai que la vérité, l’unique mensonge qui est celui-là même qu’on n’eût pas trouvé si on l’eût cherché !…
    Donc, ni l’heure abolie, aussi heureuse ou terrible qu’elle eût été, ni l’heure à venir, aussi espérée ou redoutée qu’elle pût être, ne sollicitaient ni cette tête ni ce cœur : seule la minute présente avait droit à son effort.
    Satisfait d’avoir ainsi balayé les scories qui lui encombraient la cervelle, il s’endormit d’un bon sommeil exempt de songes, et, dès le point du jour, plein de force et de gaieté, sûr de lui, sûr de sa chance au jeu de la vie, s’en vint rôder autour du palais Ulloa.
    Pour la dixième fois, il parcourait la ruelle de l’Escrimidor et entrait dans le chemin de los Anjeles, patient, certain que l’occasion se présenterait d’elle-même de parler à Christa… Christa ! Mais c’est à peine si ce nom se présentait encore à son esprit ! Christa ! Mais tout ce préparatif d’un mariage glissait, fuyait de son souvenir, s’évanouissait en une lointaine reculée !… Pourtant, c’est bien pour Christa qu’il était là. Il le disait. Il se l’affirmait… Tout à coup, il vit Léonor.
    Il ne la connaissait pas. Mais, sans hésitation, il la reconnut… C’était elle !
    Le temps de s’avancer en s’imposant une

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