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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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retomba sur ses pieds de devant pesamment, se redressa, retomba, frappa, frappa des pieds à coups redoublés, frappa comme piaffe la cavale… Soudain elle se tint tranquille… On eût dit un être qui souffle pour un nouvel effort…
    Comment ils se retrouvèrent tous les quatre en tas contre la porte, pauvres tremblantes feuilles d’humanité happées dans le cyclone du mystère, ils ne savaient. Le fait, c’est qu’ils étaient là, en tas, contre cette porte, cheveux hérissés, faces convulsées, les yeux fous rivés à la table, puis à Juan Tenorio, puis encore à la table, et encore à Juan tout raide, appuyé au mur, spectre lui-même, immobile spectre d’épouvante. Et soudain…
    … La table ! la table tressaille, elle frémit, elle frissonne, elle s’anime ! Quelque part en elle, ni dessus ni dessous, mais en elle ! Des coups résonnent en elle ! des coups secs ou violents, timides ou impérieux, des coups ! et puis… et puis… et puis, d’une secousse elle s’ébranla ; elle se mit en route ! elle s’avança !… elle s’avançait par son travers, d’une marche oblique, alors semblable par l’allure à quelque titanesque crabe… elle s’avançait… elle venait… elle courait…
    … La table se ruait sur don Juan !…
    Contre la porte, parmi des râles, des soupirs, des mots brefs, c’était l’horrible lutte des quatre qui unissaient leurs forces désespérées, qui, des épaules, des coudes, des genoux poussaient… Ah ! de quelle poussée forcenée ils poussaient cette porte… cette porte qui n’était pas fermée ! qu’ils n’avaient qu’à tirer en dedans ! cette porte qu’à la fin, Seigneur ! ils parvinrent à défoncer pour, d’un frénétique élan, se jeter hors le mystère infernal, hors la salle possédée, hors le palais maudit !… jusque dans la rue, jusque dans l’église du Refugium peccatorum, où on les trouva évanouis près de la grille du maître-autel…
    Ce ne fut qu’un mois plus tard que, sauvés de la fièvre, guéris de l’énorme choc mental, ils purent raconter l’incroyable aventure. On dut les croire pourtant : interrogés séparément par l’Official de la Suprema Inquisicion, ils refirent le même récit et donnèrent les mêmes précisions, ainsi qu’il appert des procès-verbaux qui en furent dressés.
    En conséquence de leurs déclarations, la table fut solennellement brûlée par la main du bourreau sur la place ordinaire des exécutions, en présence des confréries et du clergé, au milieu d’un immense concours de peuple. Le logis Canniedo fut démoli. Sur son emplacement, de par la sentence intervenue, les quatre, à frais communs, firent élever un monument expiatoire.
    Don Juan Tenorio avait disparu.
    Jamais plus on ne le revit dans Séville…
    Et longtemps, bien longtemps encore, les gens se signèrent et frissonnèrent en passant devant l’inscription commémoratrice, et, de père en fils, se répétèrent :
    – C’est ici le lieu où se trouvait la table sur laquelle don Juan signa son pacte avec le démon…

VII
 
LA CHAPELLE DU COUVENT DES FRANCISCAINS
    C’était le septième jour après l’événement – Canniedo, Zafra, Veladar et Girenna étaient encore en plein délire – c’était donc un matin, le septième jour après la mort de Christa d’Ulloa.
    Dans une cour du palais, deux solides écuyers, fortement armés, montés sur de vigoureux chevaux, attendaient, entourés d’officiers dont chacun donnait une dernière instruction, apportait une suprême recommandation.
    – Bon, bon, disaient les deux braves, nous en répondons sur notre vie, et nous avons fait l’Artois et l’Italie !
    – Gare à qui s’approche ! Bonsoir, camarade : la pointe de nos rapières à la disposicion de usted !
    Un valet d’écurie tenait en bride un de ces fins et nerveux jinietes andalous que si fort, en France, on appréciait sous le nom de genêts. Ce cheval portait une selle munie d’une corne d’arçon et d’un unique étrier : c’était la selle de dame – usitée encore telle quelle par la moderne chasseresse – qui ne fut introduit chez nous que par Catherine de Médicis, mais qui, dès la fin du quinzième siècle, avait supplanté, en Espagne et en Italie, l’antique et peu gracieuse sambue. Un homme d’armes inspectait et vérifiait toutes les pièces de ce harnachement.
    Toutes les têtes, soudain, se découvrirent : sur un perron apparut Léonor d’Ulloa, escortée de

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