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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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cessèrent, et presque dans le même instant, dans un angle obscur de cette chambre, apparut une faible lueur qui aussitôt s’évanouit.
    La chambre était éclairée, mais comme elle pouvait l’être par une mauvaise chandelle fumeuse dont l’obscure lueur servait à donner du relief aux ténèbres rampantes.
    Jacquemin Corentin, tout à coup, se leva, les yeux remplis d’épouvante et balbutia :
    – Monsieur ! Monsieur ! Voyez-vous ?
    – Oui, je vois, répondit don Juan dans un soupir. Mais tais-toi. Ta voix me fait mal. Et surtout, oh ! surtout, éteins cette lumière qui me brûle, qui met à mes yeux un fer incandescent… éteins… éteins !…
    Machinalement, Corentin obéit… la petite chambre fut obscure.
    Alors, la chose qu’avait vue Corentin se précisa.
    Dans un angle, à faible distance du plafond, c’était une lueur immobile et diffuse qui, rapidement, se condensa en une flamme, puis devint un petit globe lumineux, de couleur imprécise. Mais bientôt la couleur elle-même s’indiqua : ce fut une flamme d’un vert pâle, avec des reflets très doux qui n’avaient rien de spectral.
    Ce globe de lumière verte, soudain, se déplaça dans l’espace et vint planer sur la table, et bientôt, don Juan ne le vit plus… Le globe avait-il disparu ?… Non, il s’était modifié en toutes ses apparences… il s’allongeait, se détirait, et prenait une vague forme d’une chose indécise, et ce n’était plus une lueur, mais une chose qui semblait vaguement éclairée… et puis, cela se précisa… la chose put prendre un nom connu dans la langue des hommes… ce fut un bras… ce fut une main… une main de femme, une main fine et délicate… et don Juan, dans un souffle ardent, murmura :
    – Ô main, ô chère main, que j’ai couverte de mes baisers brûlants, ô main parfumée si douce à mes lèvres, ô main chérie dont la caresse tant de fois me fit frissonner… ô main… ô main de Christa !…
    Corentin s’était reculé jusqu’à la porte, et là, il tomba à genoux.
    Il tenta de se couvrir les yeux de ses deux mains, mais n’y put réussir, et, les cheveux hérissés d’une sorte d’horreur sacrée, continua de regarder… de regarder ce fantôme de main – car, qu’était-ce donc sinon un fantôme ? – et ce fantôme prenait toutes les apparences de la réalité, que dis-je ! il devenait réalité, il devenait matière tangible et palpable, c’était une création matérielle issue d’on ne sait quelle profondeur de la matière diffuse…
    Don Juan sentit que cette main se posait sur sa tête !
    Un frisson le secoua tout entier – peut-être un frisson de terreur, peut-être un frisson d’amour – mais en tout cas ce ne fut à aucun degré comparable au frisson qu’on éprouve au contact d’une main morte.
    Était-ce une main morte ? Non. Une main bien vivante, aux longs doigts fuselés, à la peau satinée.
    Elle était froide, mais non de cette froideur glaciale des morts. Il sembla bien à don Juan qu’un sang jeune et généreux circulait dans cette main, et que si elle paraissait froide au toucher ce pouvait plutôt provenir d’une longue immobilité… d’un sommeil de cette main qui cherchait à s’éveiller et s’éveillait.
    Vraiment, c’était comme un éveil de cette main posée sur la tête d’abord, puis sur le front de don Juan. Elle cherchait peut-être à se faire comprendre. Elle semblait avoir un cœur qui palpitait…
    Et brusquement, à bout de forces peut-être, ce fantôme s’évapora, s’évanouit dans l’espace.
    La chambre demeura obscure, le silence pesa, la table ne fit plus aucune tentative de communication.
    Bientôt, il n’y eut plus que le souffle rythmé de don Juan profondément endormi d’un sommeil de fatigue.
    Au bout d’une heure, Corentin se hasarda à se relever, ralluma la chandelle, et constata que tout était paisible. Il était bien pâle. Mais c’était un garçon plein de bon sens, et il finit par se dire :
    – J’ai rêvé, c’est sûr. J’ai eu un cauchemar provenant de la famine à quoi m’a condamné mon maître sous prétexte qu’il n’a pas faim. Dieu soit loué de m’avoir éveillé ! Cependant, comme l’estomac me tiraille, comme je ne suis pas amoureux, comme je pourrais retrouver d’autres cauchemars plus affreux encore, profitons du sommeil de don Tenorio, et allons nous approvisionner contre les visions démoniaques engendrées par la faim…
    Et Corentin se

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