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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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seule question. Et que lui eût-il demandé ? Elle avait tout dit ! Seulement, telle était alors la puissance du décorum et de l’étiquette que, même en cette terrible minute, le vieux Sanche, hidalgo de pur sang, ne put oublier son devoir d’hôte ; et jusqu’à la porte de la salle, il escorta Silvia d’Oritza, épouse de Juan Tenorio.
    Quand elle fut sortie, il referma la porte : il la ferma à clef, et marcha sur don Juan.
    Don Juan éclata de rire, et tout en riant, il disait :
    – L’étreinte du Commandeur ! Voici venir l’étreinte du Commandeur !
    Sanche d’Ulloa, gravement, secoua la tête , et dit :
    – Mes mains ne se souilleront pas. C’est par le fer que tu vas mourir !
    – Mourir par le fer ! cria don Juan, dans son rire inextinguible. Ah ! don Juan, traître, imposteur et parjure, voici donc ici la fin de ta carrière ! Accourez, pères, maris, fiancés de toutes celles qui m’ont aimé. Venez voir comment meurt don Juan Tenorio !
    Le Commandeur tira son épée, sa lourde, sa formidable épée, et il ajouta :
    – Si tu sais une prière, dis-la. Homme, je te réprouve et te méprise et te hais. Chrétien, je veux te laisser la possibilité de sauver ton âme. Donc, si parmi les prières que t’enseigna ta mère, une seule a pu rester dans ta mémoire et ton cœur, dis-la. Car, par saint François, tu vas mourir !
    – Merci, Commandeur ! dit Juan Tenorio – et son rire frénétique s’éteignit soudain, et sa voix s’attendrit. – Une prière ? Oui, par le Dieu vivant, il en reste une dans mon cœur, comme dans le vase qui se brise demeure encore un subtil atome du parfum qu’il contint. Une prière ! Je vais la dire ! Et la voici : Ô vous que j’adore, ô vous qui êtes toute la beauté, toute la splendeur, tout l’amour, toute la vie, ô vous qui, seule, parmi tant de femmes adorables, avez su d’un seul regard enchaîner à jamais don Juan Tenorio, je vous bénis, ô Léonor !…
    – Par le ciel ! gronda le Commandeur, l’épée haute. Défends-toi ! Défends-toi !
    Don Juan se croisa les bras.
    – Homme, chrétien ! Tu m’as laissé le suprême loisir de la prière. Tiens ta parole ! La prière du mourant, vous l’entendrez, Léonor ! Vous saurez que jamais flamme plus pure ne s’alluma dans un cœur d’homme. Ô Léonor, vous êtes la noble rose du jardin des rêves d’amour, que dis-je ! Vous êtes tout le rêve qui hante mon esprit, vous êtes le gracieux sourire de Dieu sur mon âme, vous êtes celle que je veux emporter d’un coup d’aile aux sublimes régions des cieux lointains. Léonor, Léonor, vous m’aimerez ! Je le jure ! Rien au monde, aucune puissance divine ou infernale ne pourra faire qu’enfin touchée, enfin brûlée vous-même par le feu de l’amour, vous ne veniez à moi pour me dire : « Don Juan, je vous aime et je suis à vous !… »
    Il s’était tourné vers Léonor, les mains jointes, et maintenant, pas à pas, il s’avançait vers elle, transfiguré, transposé vraiment en une chimérique situation, oubliant que Silvia son épouse venait de le dénoncer, oubliant tout, jusqu’à la présence du Commandeur… Une poigne, tout à coup, rudement le saisit et violemment le ramena au milieu de la salle.
    Le visage du Commandeur était convulsé. Ses mains tremblaient. Ses yeux étaient vitreux, comme si l’afflux de la haine les eût voilés. Il grogna :
    – Vous défendez-vous ?
    – Non ! dit Tenorio. Tuez-moi ! Je ne me battrai pas contre le père de Léonor !
    – Je vais donc te tuer. Mais sache-le : après ta mort, là-bas, dans Séville, dans toute l’Andalousie, je ferai proclamer par des hérauts d’armes que moi, Sanche d’Ulloa, j’ai été forcé de tuer Juan Tenorio, fils de don Luis Tenorio, à coups de dague ; que j’ai été obligé de l’égorger comme un vil mouton, parce qu’il fut trop lâche pour accepter le combat…
    – Par le ciel ! rugit Tenorio, la main à la poignée de l’épée.
    – Trop lâche ! répéta le Commandeur. Et qu’avant de l’égorger, j’ai dû le souffleter de la main que voici !
    Et la main se leva.
    – Enfer ! râla Tenorio.
    D’un bond en arrière, il se mit hors de portée. La main du Commandeur s’abaissa.
    – Le soufflet, râla Tenorio, je le tiens pour valable. En garde, Commandeur ! Et que Satan juge entre nous !
    En même temps, il tira sa rapière.
    La fine rapière, arme de parade et de luxe, au

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