Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
Vom Netzwerk:
tout cela, Léonor. Je savais donc bien ce que je faisais en jetant ma paternelle malédiction sur l’âme de celle que tu viens de dire. Ne prononce plus ce nom, Léonor, qu’il soit chassé de notre mémoire et de notre cœur. Qu’il soit chassé de notre maison, comme j’en eusse chassé celle qui a, dans la maison des Ulloa, introduit le déshonneur. Paix, enfant ! Obéis une bonne fois à mon ordre. Sache pour toujours que je n’ai eu, que je n’ai qu’une fille, et c’est toi…
    Léonor essuya ses yeux, et murmura, courbée :
    – J’obéirai, mon père !
    Mais son cœur criait : « Christa ! Ma chérie, ma belle et pure Christa ! Je prierai tant pour toi que l’ange des malédictions aura pitié, et du haut des cieux, laissera retomber sur terre l’injuste parole qui te frappe. »
    Et, lentement, elle alla reprendre sa place près de sa table, et elle rouvrit son livre d’heures…
    Le Commandeur, les mains au dos, se mit à marcher dans la salle, tâchant de s’intéresser aux belles choses qu’il devait à la munificence royale.
    Et comme il passait devant Léonor :
    – J’ai connu jadis don Luis Tenorio de Grenade, c’était un homme de cœur. J’espère que le Tenorio dont tu m’as parlé n’est pas de sa lignée ?
    – Je ne sais, mon père ; il se nomme Juan Tenorio, c’est tout ce que je puis vous dire.
    – Quel qu’il soit, il mourra, sois tranquille. L’infamie sera lavée dans le sang. Et tu dis que ce Juan Tenorio est à Paris ?… Qu’y vient-il faire ?… Il n’est pas de l’escorte impériale, j’en suis sûr… Comment sais-tu qu’il est à Paris ?
    Léonor leva vers son père ses yeux, ses beaux yeux de franchise et de bravoure, et elle dit :
    – Je le sais, mon père, voilà tout !
    Sanche d’Ulloa pressentit que sa fille lui cachait quelque secret. Mais il remit à plus tard de savoir quel pouvait être ce secret. Et Léonor se disait :
    – Pauvre père ! C’est assez du rude coup qu’il a reçu aujourd’hui. Je ne dois pas lui dire que ce misérable Tenorio m’a poursuivie moi-même, que c’est moi qu’il vient chercher à Paris… moi, dis-je ! moi, sœur de Christa !… Non, non, cachons cela ! Je puis me défendre moi-même. Santa Virgen, je me suis déjà défendue toute seule !…
    Elle rougit soudain et songea que dans la salle de la «  Grâce de Dieu » un autre l’avait défendue !
    Le Commandeur poursuivit, – et sa voix tremblait de fureur, et ses yeux jetaient un éclat sinistre :
    – Demain, je saurai où se cache ce Juan Tenorio. Demain, je le tuerai, quelque répugnance que j’éprouve à choquer mon fer contre le fer d’un lâche… car cet homme est sûrement un lâche…
    Et Léonor :
    – Oui, mon père. Sûrement. Un lâche !… La porte s’ouvrit violemment.
    Don Juan parut, livide, les traits bouleversés. Il s’avança rapidement jusqu’à don Sanche stupéfait, jusqu’à Léonor soudain debout, – et d’une voix rauque :
    – Un lâche !… Juan Tenorio un lâche ! Par tous les saints, c’est un affreux mensonge, et je prétends le prouver sur l’heure !…
    – Qui êtes-vous ? gronda le Commandeur. Qui es-tu, toi qui oses soutenir qu’un mensonge a été proféré par Sanche d’Ulloa et sa fille Léonor ?…
    Tenorio se redressa, hautain, terrible, et dit :
    – Je suis don Juan, fils de don Luis Tenorio !…

XXIV
 
DONC, L’ÉTREINTE DU COMMANDEUR NE POURRA JAMAIS ÉTOUFFER DON JUAN !
    Don Sanche d’Ulloa parut instantanément se calmer. Sa haute taille voûtée se redressa. La pâleur de son visage disparut, et ses joues prirent une teinte rosée. Ces éclairs qui parfois, tout à l’heure, fulguraient dans ses yeux, s’éteignirent, et même il y eut sur ses lèvres quelque chose comme un joyeux sourire. Il prit la main de sa fille, et, d’une voix paisible :
    – Mon enfant, il faut monter à ton appartement. Va, ma chère, et repose sans souci…
    – Non, mon père, dit Léonor avec fermeté. Je veux rester…
    Le Commandeur ne s’étonna pas. Il ne songea pas à réprimer ces paroles comme, en toute autre occasion, il n’eût pas manqué de le faire. Il regarda sa fille un instant, et eut un rire étrange.
    – Tu veux ? dit-il du même ton paisible. Eh bien, par saint François, je ne vois pas pourquoi je t’en empêcherais. Reste donc, ma chère enfant !
    Léonor se recula de quelques pas.
    Tout cela était d’un calme formidable. Don Juan

Weitere Kostenlose Bücher