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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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L’étreinte du Commandeur ! qu’a-t-elle voulu dire ?
    Il se secoua, huma l’air glacé de la nuit :
    – Un peu de trouble dans la cervelle de la pauvre enfant. Tu es mort, Commandeur !… Mort !… oui, certes ! de la main que voici ! Il est mort, par tous les diables d’enfer !… DONC, L’ÉTREINTE DU COMMANDEUR, JAMAIS, NE POURRA ÉTOUFFER DON JUAN !
    Quelques instants plus tard, empressé, léger, se déchargeant déjà de l’inutile fardeau des sombres pensées qui, parfois, sont bien capables de conduire au remords, Juan Tenorio reprenait le chemin de la rue Saint-Denis pour rentrer en l’auberge de la Devinière où il avait établi ses quartiers, et où, étant entré non sans force coups de poing à la porte, vu l’heure tardive, il trouva Jacquemin Corentin assis devant une extraordinaire rangée de flacons vides, qui se leva en le voyant, vint à lui en titubant comme le satyre antique, et, louchant avec effarement sur la pointe de son nez, lui dit d’une voix pâteuse :
    – Ah ! monsieur, vous arrivez bien ! J’ai une bien étrange nouvelle à vous annoncer !
     
    En ce qui concerne la soudaine entrée de Silva d’Oritza, épouse de Juan Tenorio, dans la salle d’honneur de l’hôtel d’Arronces, et la façon dont elle avait pu s’introduire dans l’hôtel – car nous ne pouvions supposer qu’elle eût, comme don Juan, escaladé la grille – voici ce que nous avons pu établir :
    L’entrée de Silvia dans l’hôtel fut un événement très simple, mais aussi très inexplicable.
    Le fait, en soi, est des plus naturels.
    Les circonstances qui entourent le fait sont parfaitement mystérieuses.
    Voici donc, d’après les recherches que s’étaient imposées notre curiosité, comment se passa la chose :
    L’intendant de l’hôtel d’Arronces, choisi par M. de Bassignac lui-même, s’appelait Jacques Aubriot. C’était un homme entre deux âges, plutôt robuste, un esprit froid, peu enclin aux rêveries, peu capable de terreur panique, tout juste assez croyant pour ne pas trop sentir le fagot, – un homme positif, assez dur à lui-même et à ses subordonnés, d’ailleurs incapable d’un mensonge inutile, c’est-à-dire ne déformant guère la vérité que dans l’établissement de ses comptes.
    Ce Jacques Aubriot donc, a raconté, sous la foi du serment :
    1° Qu’il avait vu entrer dans le vestibule de son maître le Commandeur d’Ulloa immédiatement suivi du seigneur Juan Tenorio que, vu son attitude et sa physionomie espagnole, il avait pris pour un proche parent dudit Commandeur.
    2° Que, sur l’injonction du seigneur Juan Tenorio, lui, Jacques Aubriot, s’était retiré dans l’intention de s’aller coucher, car il se faisait tard, et la grosse horloge du Temple avait déjà sonné neuf heures.
    3° Qu’il était donc monté à sa chambre, située dans les combles de l’hôtel, et que, fort tranquillement, il avait commencé de défaire ses aiguillettes en songeant à cette pesante tristesse qui, toute la journée, avait accablé son nouveau maître, M. d’Ulloa, lequel, dit-il, ne semblait être entré pour la première fois, ce jour-là, dans l’hôtel d’Arronces que pour y pleurer et s’y lamenter en compagnie de sa fille.
    4° Que, tout en songeant à ces choses et en bâillant de sommeil, il en était à la dernière aiguillette de son pourpoint, lorsqu’il avait été surpris par un gémissement lointain ; et, aussitôt, sans savoir pourquoi, sans aucune raison valable, il avait conclu : Il y a quelqu’un qui pleure et appelle à la grille de l’hôtel, et il faut que j’aille ouvrir à ce quelqu’un… Et que, là-dessus, il s’était précipitamment rhabillé.
    5° Qu’il avait alors éprouvé une sorte de terreur non pareille à aucune des terreurs qu’il eût jamais ressenties, que ses cheveux s’étaient dressés et qu’une sueur froide avait inondé son visage, et qu’il s’était juré que ce gémissement entendu au fond de la nuit n’avait rien d’humain, et qu’il s’était dit aussitôt : « Aille à la grille qui voudra ; moi, je ne bouge pas. »
    6° Qu’ayant pris cette résolution de ne pas sortir de sa chambre, il s’était pourtant mis en route comme malgré lui, en disant à haute voix, bien qu’il n’eût aucune envie de prononcer ces paroles : «  Il faut aller ouvrir à celle qui attend à la grille de l’hôtel… »
    7° Qu’il était descendu, avait longé en toute hâte

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