Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie
successivement, et pour une ou deux notes seulement, à l'exécution de leurs mélodies étranges. Ces artistes jouissent de droits sur les viandes de boucherie, comme aussi les trompettes et le tambourin, et sont régis, du reste, par leurs Alakas et d'autres bas officiers.
Le Gacha-Djagri ( porteur de bouclier ), ou servant d'armes. Cet office, qui mène quelquefois aux hautes dignités, est loin cependant de procurer à son titulaire la considération qu'on accordait en Europe aux écuyers de nos chevaliers. Il porte la rondache, le javelot et le hanap de son maître; il remplace de droit l'échanson pour le service de toute amphore de bière ou d'hydromel donnée en cadeau au Dedjazmatch, ailleurs que dans une maison ou une tente; il perçoit un droit sur les moutons et sur certains objets offerts en cadeaux à son maître, quand ce dernier est en selle. On choisit pour ce poste un soldat brave, vigoureux, adroit et bon piéton. Les seigneurs de grands fiefs allouent ordinairement à leur servant d'armes une mule de selle ou un cheval, et ils lui adjoignent deux ou trois suppléants. Mêlé aux pages, il entre librement chez le Dedjazmatch; il doit être discret, et avoir de la tenue. Il mange ordinairement avec les pages, sous les yeux de son maître, et prélève un morceau spécial de viande sur chaque bête abattue. Dans la maison d'un Dedjazmatch, il y a ordinairement plusieurs Gacha-Djagris.
Le Neft-Yadj ( porte-fusil ). Celui qui porte la carabine du Dedjazmatch. Il doit être toujours devant son maître, et prêt à lui remettre l'arme chargée. Un Dedjazmatch a ordinairement deux ou trois carabines de prédilection, ce qui nécessite autant de porte-arquebuse, ayant chacun un suppléant. On les choisit parmi les meilleurs piétons. À l'heure du repas, ils ont leurs entrées, et ils prélèvent des droits sur les animaux tués en chasse.
Le Woust-Achker Alaka ( chef des adolescents de l'intérieur ), ou chef des pages. Le nombre de ces pages, choisis ordinairement dans de bonnes familles, varie de douze à cinquante. Ils dorment dans le même appartement que le Dedjazmatch, et remplissent auprès de sa personne tous les soins de la domesticité personnelle. Excepté durant le Conseil, quelques-uns d'entre eux doivent toujours être debout auprès de son alga. Beaucoup des plus hauts dignitaires, et même des Dedjazmatchs, ont commencé par être pages. Si le Dedjazmatch aime la chasse, il établit une section de pages, chargés de mener les chiens en laisse, et de leur donner la nourriture, et il nomme, pour les surveiller, un Alaka choisi parmi eux. À l'exception des perdrix et des pintades, qui sont réservées pour la table du maître, presque toutes les viandes provenant de la chasse sont partagées entre les pages et les chiens. Le Dedjazmatch nomme parmi eux un focanier, qui est chargé d'entretenir le feu, de l'attiser, et qui perçoit une amende de quiconque y touche, fût-ce un des Sénéchaux. Il nomme aussi le page porte-couteau, qui a la responsabilité des couteaux qu'il donne et reprend aux convives, dont il perçoit en même temps un lopin de desserte. Il nomme aussi le page porte-aiguière dont nous avons parlé, et le munit d'un bassin et d'une aiguière en cuivre. Ce page doit toujours avoir de l'eau fraîche et parfumée pour la boisson de son maître; il en fournit également pour ses ablutions manuelles, ainsi que pour celles du panetier et des convives qui composent la première tablée.
Il a droit de s'asseoir au bas bout de la table, où il mange en même temps que le Dedjazmatch; ses camarades ne s'attablent qu'après que tous les convives ont mangé. Ce sont les pages qui portent les livres de piété, le pupitre, les bougies en consommation, les bijoux et les petits objets d'un usage journalier. Enfin, le Dedjazmatch confère quelquefois à un page le droit de Tchari (gratteur); muni de la serre desséchée d'un oiseau de proie, le tchari pendant les repas, gratte inopinément le dos d'un convive et accompagne cette liberté d'espiégleries, quelquefois spirituelles, qui lui valent alors le verre d'hydromel que tient en main celui qu'il a provoqué. Ce petit fonctionnaire doit être hardi, malin et prompt à la répartie, car s'il commet quelque balourdise, il est hué et mis à la porte, souvent sans souper. Les pages sont, du reste, l'objet des avances et des caresses de tout le monde et jouissent de plusieurs petits profits domestiques. La discrétion est la première
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