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Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
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grand espoir était d’attendre et de surveiller la maison close. C’était le seul endroit où je pouvais être sûr que Domnikiia reviendrait, et également le lieu où Iouda finirait par se montrer. Iouda ne pouvait voyager de jour et je supposai que, lorsqu’il se déplaçait, sa progression était au mieux aussi rapide que la mienne ; je pouvais donc compter sur sa venue dans approximativement cinq heures, aux environs de 22 heures.
    Je jetai un coup d’œil circulaire à la place, pour trouver un endroit où attendre, observer et me cacher. Plusieurs des bâtisses faisant face à la maison close semblaient ne pas encore avoir été réinvesties par leurs habitants. Pénétrer dans l’une d’elle par effraction – ce qui avait déjà été fait plusieurs semaines auparavant par les Français en plein pillage – ne me demanda pas le moindre effort, et je montai à l’étage pour avoir une meilleure vue de la place. Tandis que je grimpai l’escalier dans la maison sombre et abandonnée, je ne pus empêcher mon esprit de revenir quelques jours en arrière vers la maison où j’avais trouvé tant de cadavres profanés – russes, français et autres, Vadim parmi eux –, partiellement dévorés puis jetés comme de vieux os de poulet. Mais il n’y avait aucun remugle, aucun bruit de rats. C’était juste une maison vide, pillée ; une des quelques chanceuses qui avaient survécu aux incendies.
    Dans une pièce à l’étage, côté façade, j’eus le bonheur de trouver quelques meubles. Je m’assis sur une vieille chaise de salle à manger et contemplai la place en contrebas, m’attendant à une longue veille.
    Je fus pris par surprise. À peine m’étais-je assis que, de l’autre côté de la place, je vis une lampe s’allumer dans la chambre de Domnikiia. Je sortis ma longue-vue et la réglai sur la fenêtre sans rideaux. Domnikiia et son client entrèrent dans mon champ de vision. Manifestement, Piotr Piétrovitch m’avait menti. Elle était nue et s’était enroulée autour de l’homme. Pendant qu’il traversait la chambre pour s’approcher de la fenêtre, ses bras étaient fermement serrés autour de son cou et ses jambes l’enlaçaient au niveau de la taille, afin qu’il puisse se déplacer librement alors qu’il supportait tout son poids. Elle tournait la tête de droite à gauche, cachant son visage tandis qu’elle embrassait ses lèvres. Sa chevelure sombre et chatoyante descendait sur son cou puis disparaissait par-dessus son épaule, entre leurs deux corps, laissant dégagé son élégant dos blanc.
    Moins de vingt-quatre heures auparavant, j’avais été le spectateur clandestin d’une autre scène dont d’autres se seraient peut-être détournés. J’étais ensuite resté pour contempler les souvenirs de ma propre souffrance, malgré la nausée qui était montée en moi. Mes motivations étaient maintenant beaucoup plus disparates. Assurément, je devais surveiller Domnikiia pour garantir sa sécurité, mais de nombreux hommes auraient choisi de se détourner plutôt que de voir la femme qu’ils aimaient dans les bras d’un autre. Bien que je me sois depuis longtemps réconcilié avec la réalité de la profession de Domnikiia, et même si je croyais sincèrement que ces hommes ne représentaient rien pour elle, j’aurais certainement dû néanmoins détourner le regard et tenter de contenir le monstre jaloux qui enflait en moi.
    Au lieu de cela, je ne ressentis que de l’excitation, pas seulement à la vue de deux autres êtres humains engagés dans une activité si intime et privée, mais spécifiquement à observer la femme que j’aimais se comporter de façon si contraire à son devoir – selon ce que j’avais été élevé à croire –, si totalement animale et sauvage. Cela me réjouissait aussi de voir l’homme dupé à ce point, de le voir si prisonnier de ses propres instincts primitifs et de savoir que, s’il avait pendant un moment tout ce qu’il pouvait souhaiter avoir, sur le long terme il n’avait rien. C’était moi qui possédais le cœur de Domnikiia, l’amour de Domnikiia et l’âme de Domnikiia. Même s’ils s’alignaient pour elle en une file d’attente jusqu’à Saint-Basile, une simple caresse de ma main représenterait pour elle plus que tous leurs efforts suants.
    L’homme était déjà nu jusqu’à la taille, à l’exception d’un bandage à son bras. Tandis qu’il traversait la pièce avec Domnikiia enroulée autour de

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