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Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
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d’une dizaine d’hommes se faufilait sur la glace. L’homme en tête se tourna vers les autres et commença à crier dans leur direction, les exhortant à faire demi-tour car leur poids risquait de briser le fragile plateau. La vigueur de ses gesticulations le déséquilibra et il glissa sur la plaque. Quand il chuta, j’entendis un craquement et la plaque de glace se détacha entièrement de la rive. Presque immédiatement, elle chavira, faisant basculer les hommes dans l’eau. Le courant les emporta rapidement en aval et les précipita contre le flanc du pont. Certains entreprirent de grimper sur la structure et se virent repoussés à coups de pied par ceux qui se battaient déjà désespérément pour traverser. D’autres restèrent dans l’eau, s’accrochant aux piliers qui soutenaient le pont, jusqu’à ce que la plaque de glace elle-même se précipite contre la structure, écrasant ceux qui s’accrochaient en dessous et faisant tomber à l’eau plusieurs de ceux qui se trouvaient dessus.
    Des souvenirs d’Austerlitz et du nombre épouvantable d’hommes noyés au lac Satschan me submergèrent ; des souvenirs contre lesquels j’avais lutté depuis que j’étais arrivé ici, depuis que l’hiver avait commencé. À Austerlitz, ç’avaient été des vies russes et autrichiennes, mais maintenant les scores étaient à égalité. Cette fois, il n’y avait eu aucun besoin de faire feu sur la glace pour la briser, comme Bonaparte l’avait fait à Satschan. Cela ne voulait pas dire qu’il n’y avait aucun tir de canon russe, simplement que ceux-ci tuaient de façon plus traditionnelle.
    La terreur finit par surmonter mon désir de confrontation avec Iouda. Il était temps pour moi de partir, mais même cela ne serait pas simple. À proximité du pont, j’étais protégé de la foule, qui se déplaçait comme un seul homme dans une seule direction. Il m’aurait été plus facile de m’insérer dans le flot humain et de le laisser me porter de l’autre côté de la rivière, mais le pont était maintenant surchargé de corps au point que je doutai que plus de la moitié de ceux qui l’atteignaient parviennent de l’autre côté sans tomber à l’eau. Je me rappelai ma traversée du pont de la Moskova, au moment où Moscou était évacué et où j’étais déjà l’unique personne voulant se déplacer à contre-courant. Ç’avait été un pont plus facile à franchir que celui-ci, mais les Français ici étaient cent fois plus convaincus de leur défaite que ne l’avaient été les Russes. Je commençai à m’éloigner de la rivière, dans la direction opposée à celle que suivait tout autre homme sur la berge. Ils n’étaient pas curieux, ni intéressés par la direction que je prenais, et ne tentèrent pas délibérément de m’emporter avec eux, mais, malgré tous mes efforts pour me ménager un chemin et m’éloigner de l’eau glacée, je me trouvais néanmoins entraîné de plus en plus près d’elle.
    Je saisis des bras et des manteaux d’hommes et tentai de les pousser de côté pour les déborder, franchissant le flot de corps humains à contre-courant. Alors que j’attrapais le revers d’un homme pour l’expulser de mon chemin, il me regarda avec des yeux gris, froids et familiers. Pour une fois, il n’était pas à ma poursuite, et je venais tout juste d’abandonner mes recherches, et pourtant Iouda et moi nous étions retrouvés.

Chapitre 32
    Nous nous lançâmes presque dans une valse, tandis nous nous frayions un chemin à travers le bourbier d’hommes en panique, jusqu’à la lisière de la foule. Chacun de nous tenait l’autre, non pas dans la posture conventionnelle de la danse, mais en s’accrochant fermement de manière à ce que l’autre ne puisse s’échapper. Chacun de nous poussait l’autre, sans s’en rendre compte, avec la même intention : se libérer de la foule de façon à ce que nous puissions nous occuper l’un de l’autre, seuls.
    Lorsque nous émergeâmes, libérés de la pression des hommes et des femmes tout autour de nous qui nous soutenaient, nous tombâmes au sol. Nous roulâmes au bas de la pente raide de la berge, vers le bord de la rivière, l’un sur l’autre tour à tour, pour nous immobiliser dans une flaque glaciale que les foulées de milliers de pieds avaient maintenue liquide malgré la température. Par chance, je finis au-dessus de Iouda et lui assenai un coup de poing à la mâchoire qui, je l’espérais,

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