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Eclose entre les lys

Eclose entre les lys

Titel: Eclose entre les lys Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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Catherine regardait d’un air égaré l’agitation qui régnait dans la
chambre. Elle aperçut Isabelle, au pied du lit, qui pleurait, cramponnée à une
colonne. Personne n’avait remarqué la reine, ni n’aurait su dire quand elle
était arrivée. Elle se tenait silencieuse comme silencieuses étaient ses larmes.
    — Prie, lui murmura la demoiselle de Fastatavin.
Prie, pour Adémard, pour son enfant et pour moi.
    Isabelle tomba à genoux et se mit à prier avec
ferveur. Tout aussitôt, des chambrières l’imitèrent et s’agenouillèrent au côté
de la reine.
    — Ce n’est pas de prières dont elle a besoin,
s’exclama Arégonde aux servantes, mais de notre aide. Allez donc aux cuisines. Demandez
que l’on fasse bouillir de la centaurée avec des crêtes de coq dans un vin
excellent et fort, et tenez ce bouillon prêt.
    Puis elle s’adressa à Ozanne en baissant la voix :
    — Il faut au contraire laisser le sang couler
en abondance, damoiselle. Son fruit est mort, il faut l’en débarrasser au plus
vite.
    — Non ! Il faut essayer encore.
    — Il est mort ! Laissez, petite, j’ai
mis moult enfançons au monde. Vous me semblez bien jeune encore. Avec l’enfant
crevé, voulez-vous grever la mère ?
    La demoiselle de Louvain cacha son visage dans
ses mains pour réprimer un sanglot. Elle savait que la cuisinière avait raison,
que le fruit était mort et qu’il fallait maintenant sauver Catherine.
    — Faites, madame, balbutia-t-elle en pleurant,
avouant sa défaite. Il est vrai que l’expérience me manque. Et que je me sens
bien faible devant la souffrance de ceux que j’aime.
    Arégonde s’approcha du lit et se pencha vers
Catherine, lui murmurant des paroles apaisantes. Puis elle interpella Ozanne :
    — Venez m’aider à lui tirer les reins au bord
du lit.
    Avec précaution, elles déplacèrent la jeune
chambellane jusqu’à ce que ses pieds reposent dans la ruelle. La robuste
cuisinière s’agenouilla, lui remonta la chemise jusqu’au nombril, puis lui
releva les jambes, l’obligeant à poser ses pieds sur chacune de ses larges
épaules. Elle lui ôta les tampons de charpie qui déjà débordaient de sang. Ozanne
vit bien là l’inutilité de ses efforts. Catherine commençait à se débattre.
    — De l’aide, qu’on la tienne fermement, ordonna
Arégonde.
    Une chambrière grimpa sur le lit et pesa de tout
son poids sur les épaules de Catherine pour l’immobiliser. Une autre femme
ainsi qu’Ozanne lui saisirent chacune une jambe, s’efforçant de les maintenir
écartées pour faciliter le travail de la maîtresse cuisinière.
    Arégonde sortit de la vaste poche de son bliaut un
étrange outil fait de deux lames ovales de bois poli, jointes entre elles par
un système de vis. Elle l’enfonça dans la vulve, et en tourna résolument la
rouelle dentée. Les branches de l’appareil se séparèrent lentement, forçant les
entrailles de Catherine à s’ouvrir. La chambellane se remit à crier.
    Arégonde fouilla à nouveau dans sa poche et en
sortit une racine. Ozanne pâlit.
    — Il faut introduire une racine de coriandre
dans l’utérus pour favoriser le flux des menstrues et la sortie de l’enfant, expliqua
Arégonde.
    La chambellane, qui avait entendu, hurla de plus
belle qu’elle voulait garder l’enfant en se convulsionnant désespérément entre
les mains qui la maintenaient. Elle se débattit si fort qu’il fallut une
troisième femme pour la tenir. Une fois totalement immobilisée, Arégonde put
examiner le fond du sexe qui béait, et d’un geste précis et sûr, elle força
sans ménagement l’ouverture de la matrice à l’aide de la racine. Les cris de
Catherine étaient horribles.
    Enfin, quand la coriandre fut totalement
introduite, dame Arégonde dévissa rapidement l’appareil, l’ôta, et ordonna qu’on
lâcha la chambellane. Catherine referma ses cuisses, se recroquevilla en se
tenant le ventre, au comble de la douleur ; elle savait que l’enfant de l’amour
était irrémédiablement perdu. Arégonde lui caressait la tête, aussi douce et
apaisante qu’elle avait été vive.
    — C’est fini, demoiselle. La douleur va
passer. Il faut à présent laisser faire le travail de la nature. Quand la
racine de coriandre tombera, l’enfant tombera avec.
    — Mon enfant. Je veux l’enfant d’Adémard.
    La souffrance vrillait les entrailles de Catherine.
Elle se tordait en gémissant.
    — Soyez courageuse, petite fille, Dieu ne l’a
pas

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