Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Eclose entre les lys

Eclose entre les lys

Titel: Eclose entre les lys Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
Vom Netzwerk:
la
figurine d’un roch. C’était un soldat à cheval sculpté dans l’ébène. Il portait
un manteau de cuir avec un capuchon et tenait un bâton dans la main.
    — Le roch est le représentant du roi et de
son autorité dans le royaume. Devant les nobles pièces se placent celles du
petit peuple…
    Les cloches de la chapelle du château se mirent à
battre none. La rumeur qui montait de la cour s’enfla aussitôt, gonflée du
cliquetis des armes.
    — Enfin ! dit Isabelle en bondissant de
sa cathèdre, manquant de renverser l’échiquier.
    Elle se précipita vers une large croisée, elle
était déjà vêtue de sa tenue de cavalière. En bas, les hommes d’armes sortaient
de la torpeur de leur sieste ou de leurs parties de dés dans une molle
agitation. Varlets, sergents, coutilliers, arbalétriers se redressaient et
finissaient de s’accoutrer. On relevait et déployait étendards, gonfanons, enseignes
et bannières qui seraient foison pour impressionner l’ennemi. Enfin, les
trompes sonnèrent, annonçant le rassemblement.
    Isabelle trépignait alors que les chefs de milice
se mettaient à vociférer leurs commandements. Leurs aboiements rebondissaient
comme balle contre les murailles du château.
    — Ils sont bien lents à se mettre en route.
    Louis d’Orléans l’avait rejointe.
    — Patience, ils auront bientôt libéré la
place.
    Il mit un bras autour de ses épaules. Elle n’y
prêta pas attention, trop tenue par ce qui se passait en bas. Isabelle reconnut
son capitaine, le chevalier de Bois-Bourdon, qui chevauchait parmi les
groupes, accélérant le mouvement de la voix. Il était entièrement armé, le
capuchon de sa cotte de maille ne laissait que l’ovale de son visage à découvert.
Il portait son heaume sous le bras. Sa monture était houssée à ses couleurs, un
puissant chêne d’argent arraché sur champ de sable à semis d’abeilles. Bois-Bourdon
portait des armoiries parlantes : le bois et les bourdons. Son blason se
retrouvait sur l’écu qu’il portait sanglé à l’avant-bras gauche. Sa devise
était brodée sur la poitrine de sa cotte d’arme en soie vert herbeux qui
flottait sur son armure : « Ne rompt et darde. » Il était suivi
de son porte-étendard aux mêmes couleurs et devise peintes.
    Isabelle lui trouva, en dépit d’elle, belle allure.
Il montait un cheval noir comme le Diable, son destrier maure, Alcoboça, du nom
du monastère cistercien au Portugal où les moines perpétuaient cette race
fougueuse et endurante.
    Le tapage était à présent assourdissant, les
hommes en clabaudant se regroupaient en milice, sous les plis de leurs
étendards respectifs. Au tumulte des armes se joignaient les appels et
mugissements du charroi qui déjà s’ébranlait en direction de la passerelle du
pont-levis de la première poterne.
    Isabelle trépignait de plus belle.
    — Ils s’en vont, ils s’en vont !
    Louis resserra son étreinte alors qu’elle
frémissait d’impatience. Mais il n’y avait pas que le désir impérieux d’aller
enfin galoper en toute liberté. Isabelle ne pouvait s’empêcher de s’exalter au
spectacle de ce mâle déploiement de forces guerrières. Elle sentit le souffle
de Louis d’Orléans sur sa nuque sans y prêter attention. Au même moment, le
sire de Graville se trouva en aplomb des appartements de la reine. Il leva
le visage et aperçut les deux têtes rapprochées à la croisée.
    La reine se durcit. Louis le sentit. Croyant à un
refus, il retint le furtif baiser qu’il s’apprêtait à déposer sur sa nuque. Dans
ses tentatives d’approche amoureuse, il y mettait la maladresse et les
hésitations de son jeune âge.
    — Que vous fleurez bon, ma sœur, dit-il en
ôtant son bras et en se recomposant une attitude.
    Isabelle ne répondit pas, elle avait oublié son
beau-frère. Des yeux, elle croisait le fer avec le sombre chevalier. Il avait
ce regard fixe et dérangeant qu’elle avait appris à soutenir avec vaillance. Elle
mit dans le sien une lueur de triomphe, un défi qui voulait dire : « Allez
hors, capitaine, allez ! Et vous verrez ce que valent vos ordres. »
    Alcoboça achoppait, rendu nerveux par le tohu-bohu
qui l’environnait. Bois-Bourdon salua profondément la reine de tout le buste, une
main sur le cœur, puis il lui jeta un dernier regard, comme s’il hésitait à la
laisser, comme s’il avait reçu son défi ; puis, d’un geste précis, il
embroncha son heaume. Une brusque volte de son

Weitere Kostenlose Bücher