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Emile Zola

Emile Zola

Titel: Emile Zola Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edmond Lepelletier
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peu loin la vengeance préhistorique, et les défenseurs de Philippe, de Menesclou, de Soleilland et autres aliénés, grands tueurs de femmes et de fillettes, n'ont jamais essayé de plaider l'atavisme.
    Cette théorie de la Bête Humaine n'a d'ailleurs qu'un intérêt pathologique secondaire : Jacques, Roubaud, Séverine, Pecqueux, le Chauffeur, tous les personnages du livre, jusqu'au président Grandmorin, dont on n'entrevoit que la silhouette posthume, sont des monstres en dehors de l'humanité, une véritable ménagerie de fauves, que Zola promène dans son oeuvre. C'est un peu de la littérature de cirque.
    Comme dans tous les livres de l'auteur du Ventre de Paris, il y a dans la Bête Humaine, une chose, un morceau de matière, qui vivifiée par le souffle de l'écrivain, se dresse, s'anime, vit et palpite, comme un être.
    Zola est un admirable Pygmalion dans ces animations de Galatées, faites de la terre des mines, du liquide brûlant des alambics, des monceaux de légumes ou des charretées de fleurs des halles. La Lison, la machine de Jacques a une âme, une existence, des aventures, et elle connaît les fins tragiques.
       Jacques, d'une pâleur de mort, vit tout, comprit tout : le fardier en travers, la machine lancée, l'épouvantable choc, tout cela avec une netteté si aiguë qu'il distingua jusqu'au grain des deux pierres, tandis qu'il avait déjà dans les os la secousse de l'écrasement.
       C'était l'inévitable... Au milieu de cet affreux sifflement de détresse qui déchirait l'air, la Lison n'obéissait pas, allait quand même, à peine ralentie. Elle n'était plus la docile d'autrefois, depuis qu'elle avait perdu dans la neige sa bonne vaporisation, son démarrage si aisé, devenue quinteuse et revêche maintenant, en femme vieillie dont un coup de froid a détruit la poitrine...
    Cette machine, ainsi personnifiée, cette Lison que Jacques avait aimée, soignée, couvée, jalousée, comme une maîtresse, sans avoir jamais eu l'idée de l'éventrer celle-là, nous assistons à son agonie, la seule mort touchante de ce livre plein de meurtres, aux pages éclaboussées du sang des plaies, et où l'on ne voit que cervelles écrabouillées, ventres ouverts et carotides tranchées :
       La Lison, éventrée, culbutait à gauche, par-dessus le fardier, tandis que les pierres fendues volaient en éclats comme sous un coup de mine, et que, des cinq chevaux, quatre roulés, traînés, étaient tués net.
    La Lison est vraiment le personnage sympathique du livre. Pauvre Lison !
    Son meurtre était de longue main préparé. Au commencement de l'ouvrage, déjà, un fardier s'était embarrassé sur la voie, et Flore, la jalouse Flore qui fait dérailler le convoi pour se venger, s'était essayée, en retenant des chevaux rétifs. La machine, décrite, détaillée, ayant l'importance d'un premier rôle, et  quelques pages sur les rivalités d'employés, se disputant un logement, ou s'espionnant les uns les autres, font souvenir que le puissant auteur de la Bête Humaine, avant tout ce carnage, a décrit le comptoir formidable du père Colombe, la ruche ouvrière de la rue de la Goutte d'Or, la truculente obésité des halles, le puits dantesque du Voreux.
    La Bête Humaine n'est pas le meilleur roman de Zola. Je l'ai analysé, pour indiquer la féconde variété du maître, et pour prouver qu'il aurait pu, malgré l'insuccès de son début à Marseille, rivaliser avec les feuilletonistes populaires, ceux qui seuls semblent susceptibles de capter l'attention des foules.
    Il y a de nombreuses descriptions, très artistes, dans ce roman rouge.
    La rouge est la couleur de la vie. Il donne l'impression de la force et aussi de l'horreur, et, en fermant ce livre rude, on se souvient, avec Baudelaire, que le charme de l'horreur n'enivre que les forts.
        *    *    *    *    *
    La Débâcle a paru en 1892. C'est peut-être le livre de Zola qui a suscité le plus de polémiques, inspiré le plus de sottes injures, celui aussi qui a été le moins compris, le plus calomnié. C'est son plus beau livre.
    Zola a été, sans raison, accusé d'avoir écrit un ouvrage anti-patriotique.
    Pourquoi ? Parce qu'il n'a pas montré les soldats de son pays, irrésistiblement victorieux, ou du moins toujours héroïques, toujours debout sur la brèche, toujours grands dans la défaite ? Lui était-il permis de refaire l'histoire, et, pour flatter l'orgueil national, devait-il rééditer des légendes,

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