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Emile Zola

Emile Zola

Titel: Emile Zola Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edmond Lepelletier
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sont toujours battus un contre trois, ont été menés à la bataille comme on mène des troupeaux à la boucherie ; oui, la campagne a été une immense faute, dont la responsabilité retombe sur la nation entière, et il faut la considérer aujourd'hui comme une terrible épreuve nécessaire, que la nation a traversée, dans le sang et dans les larmes, pour se régénérer.
       Voilà ce qu'il faut dire, voilà ce qui est un véritable soulagement pour la France. C'est le cri même du patriotisme intelligent et conscient de lui-même. Nous avons besoin que la faute soit avouée et payée, que la confession soit faite, pour sauver de la catastrophe notre fierté, et notre espoir dans la victoire future. Et, quant aux capitaines bavarois, il faut qu'ils soient bien persuadés que la France vaincue par eux n'est pas la France d'aujourd'hui, mais une France démoralisée, éperdue, sans vivres, sans chefs, et pourtant si redoutable encore que, partout, elle n'a succombé que sous le nombre, et dans les surprises.
       J'imagine qu'au lendemain de la guerre le capitaine Tanera n'aurait point osé écrire sa lettre. Bazeilles était alors une telle tache de sang, avait soulevé dans le monde entier un tel cri d'exécration que les Bavarois eux-mêmes n'aimaient point à rappeler leur victoire.
       Mais le capitaine dit qu'il était à Bazeilles, et il m'aurait peut-être suffi de lui répondre que, dès lors, il n'était pas placé du bon côté pour juger mon livre, et décider si j'avais fait, avec la Débâcle, une besogne utile ou nuisible à la France.
       Car, par le fait de cette polémique extravagante, me voilà forcé de défendre mon oeuvre française, mon patriotisme français, contre un des égorgeurs, un des incendiaires de Bazeilles.
    Voilà le langage d'un patriote et d'un bon Français. C'est aussi la voix même de la raison et de la vérité que fait entendre ici Zola. Ceux qui l'accusent d'avoir attaqué, affaibli l'armée avec son livre, n'ont pas lu la Débâcle ou bien ils n'ont pas voulu en comprendre l'esprit, ni la portée. Ce n'est pas avec cette page d'histoire que le défenseur de Dreyfus peut être accusé, avec justice, d'avoir porté atteinte à l'armée, diminué l'esprit militaire, et abattu les courages. Ces reproches sont faux, et il ne faut pas mêler la Débâcle à l'affaire Dreyfus.
    Zola a expliqué, à propos des attaques du capitaine Tanera, qu'il avait cru devoir ne pas imiter ceux de ses devanciers qui, dans les tableaux  de batailles, supprimaient les défaillances, et ne peignaient que les héroïsmes. L'homme, avec ses misères et ses faiblesses, devait se retrouver partout le même, et le champ de bataille ne pouvait faire exception.
    La légende du troupier français, éternellement et comme fatalement invincible, lui avait semblé belle, mais exécrable. Elle était la cause première de nos effroyables désastres. La nécessité de tout dire s'est imposée à lui. D'où son livre impartial et implacable.
    Il concluait par cet éloquent appel à la sincérité, que les plus ardents patriotes ne peuvent qu'approuver :
       La guerre est désormais une chose assez grave, assez terrible pour qu'on ne mente point avec elle. Je suis de ceux qui la croient inévitable, qui la jugent bonne souvent, dans notre état social.
       Mais quelle extrémité affreuse, et à laquelle il ne faut se résigner que lorsque l'existence même de la patrie est en jeu ! Je n'ai rien caché, j'ai voulu montrer comment une nation comme la nôtre, après tant de victoires, avait pu être misérablement battue ; et j'ai voulu montrer aussi de quelle basse-fosse nous nous étions relevés en vingt ans, et dans quel bain de sang un peuple fort pouvait se régénérer.
       Ma conviction profonde est que, si le mensonge faussement patriotique recommençait, si nous nous abusions de nouveau sur les autres, et sur nous-mêmes, nous serions battus encore. Voilà la guerre inévitable dans son horreur, acceptons-la et soyons prêts à vaincre.
    Quel patriote pourrait désapprouver ce langage ferme et sage ? Les lignes qui terminent cet admirable et patriotique manifeste sont d'une douceur infinie, et d'une émotion si humaine, qu'on ne saurait les lire sans que tout l'être ne vibre à l'unisson de l'écrivain :
       Ah ! cette armée de Châlons que j'ai suivie dans son calvaire, avec une telle angoisse, avec une telle passion de tendresse souffrante ! Est-ce que chacune de mes pages

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