Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
levé et a dit : “Petit-Bison-Médecine, qu’es-tu venu faire ici ? Amènes-tu l’homme blanc pour qu’il finisse de tuer nos familles ?” Je lui ai répondu que j’étais venu lui parler, et lui ai demandé de convoquer son conseil. Les autres chefs sont arrivés rapidement et ont voulu savoir la raison pour laquelle j’étais là. Je leur ai expliqué que c’était pour les convaincre de faire la paix avec les Blancs, étant donné que ces derniers étaient aussi nombreux que les feuilles des arbres. “Ceci, nous le savons, m’ont-ils répondu, mais quelle raison avons-nous de vivre ? Le Blanc a pris nos terres, tué tout notre gibier, mais cela ne lui a pas suffi, alors il a massacré nos femmes et nos enfants. Plus de paix maintenant. Nous voulons partir pour retrouver nos familles sur les terres des esprits. Nous aimions les Blancs avant de nous rendre compte qu’ils nous mentaient et nous volaient ce que nous avions. Nous brandirons la hache de guerre jusqu’à la mort.”
« Ensuite, ils m’ont demandé pourquoi j’étais venu à Sand Creek montrer aux soldats l’endroit où ils se trouvaient. Je leur ai expliqué que sinon, le chef blanc m’aurait fait pendre. “Va, reste avec tes frères blancs. Nous, nous nous battrons jusqu’à la mort.” J’ai obéi et suis parti, en me disant qu’il n’y avait rien d’autre à faire. »
En janvier 1865, l’alliance cheyenne, arapaho et sioux lança une série de raids le long de la South Platte. Les guerriers attaquèrent des convois de chariots, des stations de diligences et des petits postes militaires. Ils incendièrent la ville de Julesburg, dont ils scalpèrent les défenseurs pour se venger de ce que leur peuple avait subi à Sand Creek. Ils arrachèrent des kilomètres de lignes télégraphiques et multiplièrent razzias et pillages sur la route de la Platte, bloquant les voies de communication et de ravitaillement. La population de Denver, voyant s’épuiser ses réserves de nourriture, fut prise de panique.
Au retour des guerriers dans leur campement d’hiver dans les Big Timbers, au bord de la Republican River, une grande fête fut organisée pour célébrer ces premières actions vengeresses. Les plaines étaient recouvertes de neige, ce qui n’empêcherait pas les soldats d’arriver bientôt de toutes parts avec leurs fusils cracheurs de feu. Cela, les chefs en étaient bien conscients. Pendant les danses, ils tinrent conseil pour décider de l’endroit où se réfugier. Black Kettle, qui était revenu, suggéra de gagner la région au sud de l’Arkansas River, là où les étés duraient longtemps et où le bison abondait. Mais la plupart des autres chefs préféraient rejoindre leurs parents dans la vallée de la Powder, au nord de la Platte. Aucun soldat n’oserait en effet s’aventurer dans ce fief des Sioux Tetons et des Cheyennes du Nord. Avant de mettre fin au conseil, les membres de l’alliance convinrent d’envoyer à ces tribus des messagers pour les avertir de leur arrivée.
Pourtant, Black Kettle refusait de partir. Environ quatre cents Cheyennes – pour la plupart des vieillards, des femmes et quelques guerriers grièvement blessés – acceptèrent de le suivre dans le Sud. Le dernier jour, avant le départ, George Bent dit adieu à ce qui restait du peuple de sa mère, les Cheyennes du Sud. « J’ai fait le tour des tipis et ai serré la main de Black Kettle et de mes amis. Black Kettle et ses compagnons sont partis dans le sud de l’Arkansas rejoindre les Arapahos, les Kiowas et les Comanches. »
Quant aux Cheyennes (parmi lesquels Yellow Woman et les frères Bent), ils prirent la direction du nord, ainsi que trois mille Sioux et Arapahos, choisissant ainsi l’exil dans une région que peu d’entre eux connaissaient. En route, ils durent livrer bataille contre des soldats venus de Fort Laramie, mais l’alliance qu’ils formaient était si forte qu’ils se débarrassèrent d’eux comme autant de vulgaires coyotes s’attaquant à un puissant troupeau de bisons.
À leur arrivée dans la région de la Powder, les Cheyennes du Sud furent accueillis par leurs cousins, les Cheyennes du Nord, qui leur parurent bien sauvages avec leurs tuniques en peau de bison et leurs jambières en daim. Eux-mêmes portaient en effet des couvertures et des jambières en tissu achetées aux Blancs.
Les Cheyennes du Nord entouraient leurs cheveux nattés de bandes de peau de daim teinte en rouge, arboraient
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