Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
nombre de guerriers sur les collines avoisinantes, Custer fit rassembler ses captifs et, abandonnant le chef d’escadron Elliott à son sort, regagna à marche forcée sa base temporaire de Camp Supply, au bord de la Canadian River.
Là, le général Sheridan attendait impatiemment des nouvelles de sa victoire. Apprenant que le régiment de cavalerie était sur le chemin du retour, il ordonna que tous les soldats du fort se préparent à une revue en bonne et due forme. Au son triomphal de l’orchestre, les vainqueurs entrèrent en exhibant les scalps de Black Kettle et des autres « sauvages ». Sheridan félicita publiquement Custer pour l’« efficacité et l’héroïsme des services rendus ».
Dans son rapport officiel sur les « bouchers sauvages » et les « bandes sauvages de maraudeurs cruels », le général Sheridan se félicita d’avoir « liquidé le vieux Black Kettle (…), cette non-entité vieillissante, inutile et complètement usée ». Il prétendit également avoir promis l’asile à Black Kettle s’il acceptait de venir au fort avant le début des opérations militaires. « Il a refusé, affirma-t-il, et a été tué lors des combats. »
Wynkoop, qui avait démissionné pour protester contre la politique de Sheridan, était à Philadelphie lorsqu’il apprit la mort de Black Kettle. Il déclara que son vieil ami avait été trahi et « avait péri aux mains d’hommes blancs auxquels il avait trop souvent, hélas pour lui, accordé sa confiance, et qui s’étaient vantés d’un air triomphant d’être en possession de son scalp ». D’autres hommes blancs qui avaient connu et apprécié Black Kettle critiquèrent eux aussi la politique guerrière de Sheridan, mais celui-ci repoussa leurs attaques en les qualifiant de « braves et pieux ecclésiastiques (…) complices de sauvages qui ont assassiné sans pitié des hommes, des femmes et des enfants ».
Grand-Guerrier Sherman apporta à Sheridan son soutien et lui ordonna de continuer à tuer les Indiens hostiles et leurs mustangs, tout en lui conseillant d’installer les Indiens amis dans des campements où ils pourraient être nourris et exposés aux bienfaits de la culture et de la civilisation de l’homme blanc.
Sheridan et Custer se rendirent donc à Fort Cobb, d’où ils envoyèrent des messagers aux quatre tribus de la région afin de les avertir qu’elles devaient soit venir au fort faire la paix, soit s’exposer à être traquées et exterminées. Custer lui-même partit à la recherche d’indiens amis. Pour cette opération de terrain, il ordonna que l’une des plus jolies de ses captives cheyennes l’accompagne. Elle se vit attribuer la fonction d’interprète, alors qu’elle ne connaissait pas un mot d’anglais.
Fin décembre, on vit arriver à Fort Cobb les premiers survivants de la bande de Black Kettle. Custer ayant tué tous leurs mustangs, ils étaient à pied. Little Robe était devenu le chef de la tribu, mais en titre seulement. Présenté à Sheridan, il expliqua à celui qui ressemblait à un ours que les siens souffraient de la faim, puisque Custer avait détruit leurs réserves de viande, qu’ils n’avaient pas trouvé de bison le long de la Washita et qu’ils avaient dû manger leurs chiens.
Sheridan répliqua que les Cheyennes recevraient des vivres à condition de tous venir à Fort Cobb et de se rendre sans conditions. « Vous ne pouvez pas faire la paix pour vous remettre à tuer les Blancs le printemps venu, ajouta-t-il. Si vous n’êtes pas prêts à accepter une paix complète, vous n’avez qu’à retourner d’où vous venez et nous réglerons notre problème les armes à la main. »
Little Robe savait pertinemment qu’il n’y avait qu’une seule réponse possible. « C’est à toi de dire ce que nous devons faire, » dit-il.
Yellow Bear accepta lui aussi de venir avec ses Arapahos à Fort Cobb. Quelques jours plus tard, ce fut le tour de Towasi, le premier Comanche à faire reddition avec sa bande. Lorsqu’on lui fit rencontrer Sheridan, ses yeux se mirent à briller. Il se présenta, puis ajouta quelques mots dans un anglais rudimentaire, ce qui donna : « Tosawi, bon Indien. »
C’est à cette occasion que Sheridan prononça la formule immortelle : « Les seuls bons Indiens que j’ai jamais vus étaient morts. » Le lieutenant Charles Nordstrom, présent lors de l’entrevue, la répéta autour de lui, et au fil du temps, elle se transforma en
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