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Essais sceptiques

Essais sceptiques

Titel: Essais sceptiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bertrand Russell
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dialogue platonicien journalier ». Pour ces hommes cela consistait à cultiver des idéaux, et tout en se consacrant à l’érudition pure, ils se préoccupaient d’une grande influence sociale : car chaque génération se préparait à exercer des fonctions publiques. À certains moments de la carrière de Russell, cette influence se fait jour, chargée d’autorité et du sens de la responsabilité, héritage refusé à des hommes sans maturité.
    À Cambridge, il prit la tête d’une nouvelle école de philosophie
    Un collègue de Russell, qui allait devenir l’un de ses amis les plus intimes, G.E. Moore, bien qu’il fût son cadet de quelques années, était le représentant typique de l’ancienne école. C’était un humaniste, le type même du gentleman cultivé, un homme de conversation s’il en fut, un maître du dialogue et aussi un être doué d’un grand charme. L’érudition classique implique nécessairement une connaissance approfondie de la philosophie antique. Après le dîner, au Collège, venait un moment consacré aux débats, et Moore avait l’habitude d’engager de longues discussions avec un penseur pittoresque, excentrique, mais aussi très subtil : John McTaggart. Entre autres thèmes philosophiques, McTaggart cherchait à démontrer l’irréalité du temps. Moore entra en conflit avec lui. Russell, bien que préparant un certificat de mathématiques, fut tellement fasciné par ce dialogue, qu’il ne tarda pas à y prendre part. C’était surtout la défense du sens commun de Moore qui le séduisait. Non seulement il persuada Moore de se consacrer sérieusement à la philosophie, mais il découvrit qu’il était attiré dans la même direction. Avant même d’entrer à Cambridge, il avait étudié John Stuart Mill, dont il avait fait pour un temps son « pape ». (Ce n’est que beaucoup plus tard qu’il apprit que Mill avait été un ami intime de ses parents.) Tout en étant attiré par l’empirisme de cet écrivain, il garda cependant la conviction que les vérités des mathématiques sont à l’abri des critiques empiriques. Il fut diplômé en 1894 (
Moral Science Tripos
(2) ) ; immédiatement après, il se plongea dans les études philosophiques. Désormais Moore et Russell, malgré des différences de vues et de tempérament bien marquées, prirent la tête d’une nouvelle école de philosophie à Cambridge. Elle devait plus tard bouleverser la pensée du monde anglo-saxon, et il est intéressant de noter que le Cercle de Vienne, qui, par la suite exerça une telle influence sur la pensée britannique, doit beaucoup à Russell dans ses débuts.
    À moins de se contenter simplement de retracer l’histoire des idées, un homme ne se tourne généralement vers la philosophie que mû par un impératif personnel ; celui-ci peut naître de son embarras devant un problème resté pour lui sans solution. Russell, lui, se demandait quelles étaient l’essence et la place de la vérité mathématique. Si, comme le croyaient les empiristes, notre connaissance provient uniquement des impressions des sens, comment pouvons-nous parvenir aux vérités des mathématiques ? Comment, même, de telles vérités peuvent-elles être ? Car on ne peut ni les prouver ni les expliquer par les
data
des sens, bien que Mill soit persuadé du contraire. Elles tiennent de l’intemporel et de l’éternel. Les arguments de McTaggart concernant l’irréalité du temps ne devaient pas être rejetés à la légère. Il ne suffisait pas de soutenir avec Moore qu’à notre
connaissance
le temps est une réalité de sens commun : car nous savons aussi, par une intuition non moins sûre, que les mathématiques ont leurs vérités indépendamment du Temps. Il n’est pas surprenant que Russell, ayant écrit un article sur « les fondements de la géométrie » pour sa thèse d’agrégation, l’ait dédié à McTaggart. En outre en 1893, le philosophe F.H. Bradley, d’Oxford, publia son grand ouvrage
Appearance and Reality
(Apparence et Réalité). On devait par la suite le considérer, avec le propre ouvrage de McTaggart
The Nature of Existence
(La Nature de l’Existence), comme un bastion de l’idéalisme britannique. Le mérite de Bradley fut d’allier de grands pouvoirs analytiques à une spéculation hardie sur la nature de la réalité. Russell, plus convaincu lorsque Bradley détruisait par l’analyse les notions couramment admises, que lorsqu’il rejetait tout dans

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