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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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restait dans la forêt, Jeannette ne le quittait pas des yeux. Elle lui trouvait des ressemblances avec un saint Michel peint sur le mur de la chapelle de Bermont, près de Greux. Un jour, elle s’était enhardie et lui avait offert le cordon d’amour qu’elle venait de tresser. Il avait rougi, murmuré un timide merci et, remontant à cheval, était reparti sans se retourner.
    – Sotte ! dit Mengette. Tu l’as vexé. Il reviendra plus. Pourquoi as-tu fait ça ?
    – Parce qu’il ressemble à saint Michel, dit Jeannette, et qu’il va mourir.
     
    Jeannette s’était bien gardée de raconter à ses compagnes que l’archange était venu à plusieurs reprises la visiter et que les dames de la nuit, Catherine et Marguerite, semblaient jalouses de l’ascendant qu’il avait pris auprès de la pucelle.
    Sa première visite remontait à plusieurs mois. C’était à l’église, à la tombée de la nuit, peu après l’angélus, alors que la nef était déserte. Aux derniers mots de sa prière, elle avait senti en elle un bourdonnement et sa vue se brouiller. Elle avait voulu se lever, mais un fardeau de silence et d’ombre lui pesait aux épaules, tandis qu’autour d’elle se formait une sorte de nuage vaguement coloré et qu’une odeur étrange s’en dégageait, comme celle qui avait enveloppé les dames qui lui étaient apparues la nuit de son escapade au Bois-Chenu. Elle avait vu apparaître sur cet écran de brouillard ou de fumée une image flottante et lumineuse : celle d’un chevalier portant cuirasse et levant sa lance pour transpercer à ses pieds un magma d’où jaillissait la tête monstrueuse d’un serpent.
    Elle n’avait pas eu de peine à reconnaître saint Michel : il était la réplique de celui qui figurait dans la chapelle de Bermont et dans celle du mont Sombar. Il était le saint patron des ducs de Bar et des Valois.
    L’archange n’avait pas soufflé mot, mais il avait fait une nouvelle apparition quelques jours plus tard.
    Un matin, alors que, seule dans le courtil, elle versait du petit-lait dans l’auge des nourrains, Jeannette avait senti derrière elle une présence. Poussée par une volonté qui lui était étrangère, elle abandonna sa tâche, s’agenouilla sous le pommier et se mit en prière. C’est alors qu’elle le vit, debout contre le mur de l’église dans sa cape de lumière et d’étoiles : il lui parla, cette fois-ci, lui dit qu’elle était Fille Dieu et qu’elle allait bientôt recevoir des révélations sur sa destinée.
    Le saint reparut peu de temps après. Son image était plus précise et sa voix plus nette. Il lui dit que Dieu l’aimait, qu’Il veillait sur elle, que lui, saint Michel, la guiderait vers un grand destin. On la retrouva inanimée, allongée dans l’herbe, sous le pommier. Elle jeûnait depuis deux jours.
     
    – Qu’est-ce qu’elle peut bien avoir, cette petite garce ? gémissait Jacques. Je ne la reconnais plus ! Parfois on dirait qu’elle est absente, que rien ne peut la toucher, que nous ne comptons plus pour elle. Une heure après, on la surprend à rire et à plaisanter. Zabelle, en as-tu parlé au curé ?
    – Le pauvre homme... il est dépassé ! Quand notre Jeannette se confesse à lui, c’est pour des bagatelles qui ne méritent pas un Ave . Ce qui m’inquiète davantage, c’est qu’elle n’ait pas ses fleurs. À quinze ans, ça n’est pas normal.
    Jacques revenait à son projet : la marier dès que possible. Il avait son idée. Un petit procureur de Toul avait tourné autour des jupes de l’adolescente aux dernières fêtes de Vaucouleurs ; il avait pignon sur rue, des biens au soleil, et ce n’était pas un béjaune – il avait une dizaine d’années de plus qu’elle. Ils avaient fait connaissance, vidé un pichet de cidre, et, à la façon dont cet homme regardait sa fille, Jacques avait compris qu’il avait des vues sur elle.
    – Elle se placerait bien, notre Jeannette, dit-il. Un beau mariage lui remettrait les pieds sur terre.
     
    Cette fois-ci, l’affaire paraissait sérieuse.
    À la mi-juillet, Antoine de Vergy avait rassemblé sous les murs de Commercy une troupe destinée à aller porter la guerre dans le Barrois, avec comme objectifs principaux Vaucouleurs et Neufchâteau. Il fallait s’attendre à une vraie campagne.
    C’est Joseph Birkenwald qui vint annoncer la nouvelle aux gens de Domrémy et de Greux.
    – Nous l’attendons de pied ferme, dit Jacques. Il trouvera à qui parler.
    – Tu

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