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Eugénie et l'enfant retrouvé

Eugénie et l'enfant retrouvé

Titel: Eugénie et l'enfant retrouvé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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dois reprendre mon poste.
    Pour cette dernière portion du trajet, elle accepta de prendre son bras.

    *****
    Morne et froid, l’hiver tint la ville dans un étau pendant des semaines. Le passage du 21 mars n’apporta aucun signe avant-coureur du printemps. Pour Eugénie, cela parut un très mauvais présage. Attendre ne servait plus à rien.
    Profitant de l’absence de son mari de la maison, elle composa le numéro du cabinet du docteur Caron en posant un doigt sur le crochet du combiné. Si elle reconnaissait la voix d’Elise, elle couperait tout de suite la communication. Le timbre tout frêle à l’autre bout du fil la rassura.
    — Mademoiselle, pouvez-vous me mettre en communication avec le docteur Picard ?
    — Elle se trouve présentement avec une patiente.
    — Je me nomme Eugénie Dupire. Demandez-lui de me rappeler dès que possible.
    — Très bien, madame, je fais le nécessaire.
    Elle resta près du téléphone, certaine que la gravité de son état lui vaudrait des égards. Cela se vérifia. À peine quelques minutes plus tard, la sonnerie la fit sursauter, elle décrocha très vite.
    — Docteur ?
    — Madame Dupire, votre situation a-t-elle... évolué?
    Le mot « empiré » lui paraissait trop cruel.
    — Si vous voulez dire par là une respiration un peu plus haletante, une toux sèche, une lourdeur au côté droit, mon état a évolué.
    La liste des symptômes parut tout de suite terrible à Thalie.
    — Je peux passer chez vous tout à l’heure, à la fin de mes consultations.
    — Mais après un examen sommaire, vous voudrez sans doute confirmer votre diagnostic avec des radiographies.
    — ... Sans doute.
    — Dans ce cas, je souhaite me rendre directement au Jeffrey Haie pour cette étape. Nous nous rencontrerons ensuite.
    Quelques semaines plus tôt, Eugénie préférait encore ne pas affronter un verdict cruel. En ce Jeudi saint, sa détermination semblait inébranlable. Thalie imagina une motivation religieuse.
    — Je serai à l’hôpital mardi prochain. Je vais m’arranger pour vous voir tout de suite après l’examen. Je m’occupe de prendre votre rendez-vous. Je vous donnerai l’heure exacte dès que possible.
    — Merci, docteur.
    — D’ici là, puis-je faire quelque chose pour vous ?
    — A moins d’être qualifiée pour les miracles, vous ne pouvez rien, n’est-ce pas ?
    Sans attendre la réponse, la femme pesa doucement sur la fourche pour interrompre la communication, puis posa le combiné. Elle se tenait dans le bureau de Fernand.
    Celui-ci avait quitté la maison un peu après midi, aussi Élise n’avait pas pris la communication au cabinet du docteur Caron. La coïncidence ne la surprenait pas.
    Les yeux clos, la respiration haletante, la tête appuyée contre le rembourrage du fauteuil, Eugénie resta sans bouger, tous les sens à l’affût, comme pour percevoir l’ombre noire devenue familière à l’hôpital. Pour les prochains mois,
    ce
    serait
    sans
    doute
    sa
    seule
    compagne.
    Deviendrait-elle une amie ?

    Chapitre 22

    Après avoir nié pendant quelques semaines l’apparition des symptômes, Eugénie passait à un nouvel état d’âme. Si son temps s’avérait compté, elle entendait régler certains comptes avec l’existence. Une brève conversation téléphonique lui avait
    permis
    de
    prendre
    un
    rendez-vous
    avec
    Elisabeth Trudel, devenue Picard par son mariage. L’autre accepta après une brève hésitation.
    La belle-mère choisit de la recevoir le 29 mars, le Vendredi saint, en après-midi. La rencontre pouvait être orageuse. L’intérêt de fixer l’entretien ce jour-là tenait à la désertion de la maison de chambres. La majorité des notables logés rue Sainte-Geneviève et les étudiants de la rue Saint-Denis avaient rejoint leur famille pour le congé pascal.
    La visiteuse agita le heurtoir un peu avant trois heures.
    Le hasard amena Jeanne à répondre. Elle passait juste à ce moment devant la réception; laisser une autre employée venir de la cuisine pour ouvrir lui parut mesquin. Quand elles furent face à face, les deux femmes demeurèrent interdites.
    L’ancienne domestique fat la première à reprendre sa contenance.
    — Bonjour, madame Dupire.
    — Bonjour... Jeanne.
    Le recours au prénom servait à rappeler le rapport hiérarchique passé. Et de toute façon, la visiteuse ne connaissait pas le nom du nouvel époux de Jeanne.
    — Je désire voir votre maîtresse, continua-t-elle.
    — Il s’agit de mon employeur,

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