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Eugénie et l'enfant retrouvé

Eugénie et l'enfant retrouvé

Titel: Eugénie et l'enfant retrouvé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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préciser :
    — Des valeurs, des propriétés... quelque chose pour garantir l’emprunt.
    Le chef d’atelier découvrait l’un des mystères de la conduite des affaires : si l’on n’en avait pas besoin, la banque se montrait disposée à avancer de fortes sommes. Dans le cas contraire, commençait-il à deviner, les choses se présentaient différemment.
    — Vous connaissez le solde de mon livret d’épargne. Je possède aussi une maison dans la 3e Rue.
    — Je sais, je suis passé devant à midi, en revenant au bureau.
    Gérard Langlois ne négligeait rien pour juger de la pertinence d’une opération. Cela lui valait de bonnes notes de la part de ses supérieurs.
    — En comparaison avec la somme demandée, ce ne sera pas suffisant. Aucune action, aucune obligation d’épargne, aucune hypothèque sur des édifices, des terrains ?
    Au fil de l’énumération, le visiteur secouait la tête de droite à gauche.
    — Ecoutez, monsieur Létourneau, je ne peux pas vous prêter la somme demandée. Même si nous imaginons que vous doublerez le taux de profit moyen des trois dernières années, cela ne suffira pas. Et si une faillite survenait, la banque aurait du mal à retrouver son compte.
    — Mais je sais que je peux faire fonctionner ces ateliers.
    Voilà trente ans que j’en suis le responsable...
    L’expérience, le travail acharné, tout cela ne pesait pas bien lourd dans la balance d’un homme d’argent. Cela n’enlevait rien à l’empathie dont pouvait témoigner Gérard Langlois.
    — Lors de la fermeture, que vous arrivera-t-il ?
    — Picard m’offre un poste de chef de rayon.
    — Mais c’est très bien, cela. Acceptez.
    — Vous ne comprenez pas. Je veux laisser quelque chose à mon fils.
    Surtout, lui laisser l’image d’une petite réussite. Tout jeune, son garçon ouvrait de grands yeux devant la grande bâtisse de la Pointe-aux-Lièvres. Il se souvenait surtout de la déception dans son regard quand il avait découvert qu’il ne possédait pas tout cela.
    — Je comprends très bien, je vous assure, car j’en ai deux. Alors pourquoi ne pas troquer votre demeure pour l’un de ces édifices de trois étages ?... Cela se paie tout seul, et au moment de votre retraite, vous en tirerez un revenu.
    Ce serait un héritage plus que convenable.
    L’image de Mathieu Picard passa dans l’esprit du banquier. Il venait
    de
    répéter
    exactement
    les
    arguments
    de
    celui-ci.
    — Si vous ne voulez pas vous engager, dit Fulgence, vous pouvez sans doute me conseiller une autre source de fonds.
    — Je ne comprends pas...
    — Dans votre métier, vous savez qui a de l’argent à prêter.
    Une pareille naïveté ne s’inventait pas. Langlois secoua la tête de droite à gauche. Le quémandeur demeura un court instant immobile, puis il se leva en disant:
    — Je ne prendrai pas plus de votre temps. Je vous remercie de m’avoir reçu.
    Le banquier quitta son siège pour le raccompagner à la porte.
    — Ce n’est rien, je vous assure. Je vais vous rendre cela.
    Il lui rendit le plan d’affaires. Inutile de le garder. Même après dix relectures, sa décision demeurerait la même.
    — Je vous souhaite bonne chance, monsieur Létourneau.

    *****
L’habitude de Fulgence de s’attarder au travail presque tous les soirs l’amenait à consulter les journaux avec quelques heures de retard. Aussi, à son lever le samedi matin, il s’absorba dans la lecture de l’exemplaire de la veille du journal La Presse. Dans la rubrique « Occasions d’affaires », des annonces de prêteurs, tout comme celles d’individus disant rechercher des «partenaires pour une entreprise prometteuse», le firent rêver un moment.
    Thérèse s’activait devant la cafetière. Peut-être ne se serait-elle pas donné cette peine pour son époux, mais Jacques devait lui aussi profiter d’un petit déjeuner hâtif avant de se rendre au service de livraison du magasin PICARD. Elle ne comptait jamais ses gentillesses.
    — Tu crois que c’est sérieux, ce genre de proposition ?
    demanda le garçon en se penchant sur l’épaule de son père afin de voir ce qu’il lisait.
    — Je ne sais pas.
    De la main, l’homme lui fit signe de se taire. La maîtresse de la maison ignorait toujours ce qui se passait du côté de la Pointe-aux-Lièvres. Us terminèrent leur repas en silence, puis se levèrent en même temps pour se diriger vers la porte avant, tout en adressant des souhaits de bonne journée à Thérèse.
    Ils

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