Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Eugénie et l'enfant retrouvé

Eugénie et l'enfant retrouvé

Titel: Eugénie et l'enfant retrouvé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
dit-il.
    Jacques ne savait trop si ce constat le désolait ou non.
    Mais ce développement témoignait de la grande faculté d’adaptation de sa mère.

    *****
    Jacques et Germaine se montrèrent d’abord bien mal à l’aise.

    Leur rencontre se déroula près du kiosque, là où un orchestre amateur se produisait pour la dernière fois de la saison.
    Après qu’il se furent serré la main de façon maladroite, le garçon proposa :
    — Nous pouvons nous asseoir sur ce banc près de la rivière. Nous entendrons la musique.
    Elle donna son assentiment d’un signe de la tête, puis le suivit. Avec le temps maintenant un peu plus frais, le cours d’eau ne répandait plus son odeur d’égout. Germaine n’était pas assise depuis plus de dix secondes quand elle déclara :
    — Votre invitation m’a prise au dépourvu, tout à l’heure.
    Je ne pensais plus entendre parler de vous, après toutes ces semaines.
    — La vie m’a réservé toute une surprise.
    — Oui, la mort de votre père a été très soudaine, murmura-t-elle.
    — Oh! Je ne parlais pas de ça... Enfin, pas seulement de ça.
    Il posa les yeux sur son joli profil. En ce début d’automne, elle avait abandonné son chapeau de paille pour un autre plus seyant, en feutre. Les traits réguliers et les cheveux bruns un peu ondulés dépassant sous le bord l’incitèrent à se confier. Auparavant, il entendait tout de même prendre ses précautions.
    — Pouvez-vous garder un secret, vraiment ne rien répéter si je vous confie quelque chose? Je veux bien me livrer à vous, mais pas à toute la paroisse.
    Le ton très sérieux troubla la jeune femme. Un moment, elle craignit une maladie incurable, puis elle chassa tout de suite cette pensée : cela ne cadrait pas avec la bonne mine de ce garçon. Toutefois, il paraissait vraiment préoccupé.

    — Je ne dirai pas un mot, vous avez ma parole.
    Tout comme elle avait gardé secrète sa tentative de l’entraîner dans le buisson, elle ne livrerait pas ses confidences.
    — Ni Thérèse ni Fulgence ne sont mes vrais parents.
    La vérité pénétra lentement dans son esprit, au point de se surprendre d’abord de l’entendre utiliser les prénoms.
    — J’ai été adopté à la naissance, précisa-t-il.
    Elle posa la main sur son avant-bras. Du kiosque, il leur venait un air de valse.
    — J’aurais dû deviner, continua-t-il, je ne leur ressemble pas du tout.
    Un bref instant, leurs yeux se croisèrent.
    — Oui, tout de même un peu à votre mère, murmura-t-elle.
    — Tout le monde dit cela, moi aussi je le répétais, parce qu’elle est blonde. Mais non, je ne lui ressemble pas. J’ai regardé des photos d’elle à l’âge de vingt ans. Nous ne sommes pas apparentés.
    Elle secoua la tête, sceptique.
    — Je n’ai jamais rien entendu à ce sujet dans la paroisse.
    Pourtant, ce genre de chose est commenté par tout le monde.
    — Pour commenter, il faut d’abord savoir. Le couple n’a rien révélé, tout simplement.
    — Même quand on se tait, cela ne signifie pas que les voisins ignorent la situation. Vos parents habitaient déjà la 3e Rue, au moment de votre naissance.
    Germaine avait raison. Les paroissiens étaient prompts à remarquer un ventre se gonflant, que la femme se targue ou non de son «état intéressant». Si un bébé apparaissait dans une maison sans aucun signe avant-coureur, chacun tirait ses propres conclusions, même si les heureux parents n’admettaient rien.

    — Elle a toujours été grosse. Dans ces cas-là...
    « Une grossesse peut passer inaperçue », compléta mentalement la jeune femme.
    — Comment avez-vous su ? Votre mère vous l’a dit au moment du décès ?
    — Même pas. Je crois qu’elle serait morte avec son secret. J’ai deviné, puis elle a confirmé la chose.
    — Que voulez-vous dire ?
    — En fouillant dans les vieux papiers de papa, je suis tombé sur des lettres...
    Il s’interrompit, résolu à ne pas confier que ses parents recevaient de l’argent pour s’occuper de lui. Cet aspect de la transaction lui paraissait un peu honteux.
    — La correspondance d’un notaire, précisa-t-il. Selon ces lettres, un homme de la Haute-Ville cherchait une bonne famille catholique pour élever un enfant. Le sort est tombé sur les Létourneau. Ma mère me l’a confirmé ensuite.
    La jeune femme murmura :
    — Bien sûr, je vous crois... Personne n’inventerait une pareille histoire.
    Elle attendit un moment qu’il la contredise. Son compagnon

Weitere Kostenlose Bücher