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Eugénie et l'enfant retrouvé

Eugénie et l'enfant retrouvé

Titel: Eugénie et l'enfant retrouvé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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commissure de ses yeux.
    — Tu te souviens de mes... problèmes, l’été dernier?
    Ce sang tient à une masse dans mon ventre. Le médecin va l’enlever.
    La femme jugeait le mot «utérus» inconvenant pour des oreilles de onze ans.
    — ... C’est quoi?
    L’inquiétude dans la voix la toucha. Elle était assez désemparée pour accepter la compassion comme un substitut de l’amour.
    — Cela touche les femmes assez souvent. Selon mon médecin et mon chirurgien, je devrais être débarrassée de ce problème après une assez longue convalescence, et même de cette fatigue qui m’accable si souvent.
    — Quel jour aura lieu l’opération ?
    — Mardi de la semaine prochaine.
    — Je vais prier pour toi... et mes amies aussi.
    Avec une certaine brusquerie, Eugénie pressa sa fille contre elle. Le geste prit l’enfant par surprise, elle se raidit dans les bras maternels. Le trio revint ensuite vers le couvent par l’allée centrale. La femme s’arrêta près des voitures en disant :
    — Je vais m’asseoir dans l’automobile, je me sens fatiguée. Ton père va te reconduire au couvent.
    De nouveau, elle tint à prendre la gamine contre son cœur. Cette fois, Béatrice s’abandonna de meilleure grâce.
    — Je te souhaite bonne chance, maman.
    — Merci, ma grande. Je suis certaine que tes prières vont m’aider.
    Un instant plus tard, elle regardait le père et la fille gravir l’escalier. Fernand avait posé un bras léger sur ses épaules, un geste familier entre eux. Elle aurait aimé entendre leur conversation.
    En arrivant en haut des marches, Béatrice réussit à articuler :
    — Tu crois qu’elle va mourir ?
    — Elle t’a dit la vérité, tu sais. J’ai parlé aussi à son chirurgien. L’opération est assez fréquente, les patientes se remettent très bien, elles mènent ensuite une vie normale.
    — Il va lui ouvrir le ventre.
    Lorsqu’elle pénétra dans l’institution d’enseignement, de grosses larmes coulaient de ses yeux.
    — À ce moment, elle dormira, tu sais. Elle ne se rendra compte de rien.
    — Cette... masse, tu as une idée de sa grosseur?
    L’homme secoua la tête pour dire non, peu désireux de préciser que tout l’utérus, les ovaires et les trompes seraient retirés de l’abdomen de sa femme.
    — Cela ne doit pas être très gros, le docteur Picard a dit qu’elle ne sentait rien au bout de ses doigts.
    Elle hocha la tête et renifla un bon coup, au point que son père lui tendit son mouchoir. Après avoir soufflé dedans, elle le lui rendit.
    — Je sais bien que ton imagination a tendance à envisager le pire. Essaie de ne pas la laisser s’emballer. Tu sais que je ne te mens jamais ?
    Elle le contempla de ses grands yeux bleus, puis hocha la tête.
    — Le médecin ne s’inquiète pas outre mesure, et c’est une personne compétente. Nous qui ne le sommes pas, nous allons essayer de prendre cela avec calme.
    De nouveau, la fillette acquiesça. Elle se laissa enlacer puis murmura à l’intention du bouton de la veste :

    — Je crois que je vais monter.
    Elle préférait éclater en sanglot dans l’intimité du dortoir.
    — Je comprends, ma grande. Je te souhaite une bonne semaine. Nous nous verrons dimanche prochain.
    — Tu ne vas pas aller la reconduire ?
    — Oui, et je viendrai tout de suite après.
    Avec une certaine brusquerie, elle s’éloigna de lui pour regagner le pied de l’escalier, s’engagea dans les marches puis se retourna un instant pour le saluer de la main. En poursuivant vers l’étage, elle fut prise d’un hoquet qui lui secoua les épaules. Guère meilleur maître de ses émotions, Fernand sortit.
    La directrice de l’établissement le rejoignit devant la porte.
    — Monsieur Dupire ?
    L’homme se retourna pour voir qui l’interpellait.
    — Oui, ma mère ?
    — Il se passe quelque chose que je devrais savoir.
    Ce n’était même pas une question. Comme elle s’occupait de ces
    adolescentes
    toute
    la
    semaine,
    elle
    entendait
    connaître les événements dramatiques de leur vie.
    — Sa mère doit subir une intervention chirurgicale mardi de la semaine prochaine.
    — Grave ?
    — La grande opération.
    L’autre hocha la tête d’un air entendu. Certaines de ses sœurs éprouvaient ces difficultés.
    — Je vais veiller sur elle. De votre côté, tenez-moi au courant de la situation.
    — Entendu, ma mère. A bientôt.
    Comme il s’apprêtait à descendre les marches, elle l’interpella encore :

    — Monsieur,

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