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Eugénie et l'enfant retrouvé

Eugénie et l'enfant retrouvé

Titel: Eugénie et l'enfant retrouvé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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qu’il monte l’escalier avant de commenter :
    — Je ne veux pas médire, mais cette jeune fille n’est pas faite pour mon garçon.
    Charmin évita d’exprimer le fond de sa pensée : aux yeux de cette femme, aucune personne ne serait jamais digne de son adorable rejeton. S’il se mettait en tête de trouver une candidate capable de recevoir la bénédiction maternelle, il mourrait célibataire.
    —Pour ce que j’en sais, il s’agit d’une bonne jeune fille, dit-il doucement.
    — Je n’en doute pas, Armel. Mais mon garçon achève son cours classique.
    L’homme hocha la tête, comme si cela donnait au garçon des qualités surhumaines.
    — Maintenant, vous pourriez descendre votre appareil, afin que j’entende le son sortant de cette boîte.
    Les objections soulevées un instant plus tôt étaient oubliées. Le pensionnaire dissimula son étonnement. Cette femme ne perdait aucune occasion d’améliorer son sort.
    Elle prit une longue inspiration en se mettant bien droite, ce qui eut pour effet de soulever et projeter vers l’avant son opulente poitrine.
    — Je reviens tout de suite, dit l’homme en quittant son siège.
    Une heure plus tard, Thérèse alla faire du thé. Quand elle revint avec un plateau, elle dut avouer que cet appareil ajoutait vraiment à sa qualité de vie.

    *****
    Même après avoir pris un calmant, dormir dans un hôpital n’était pas une mince affaire, surtout dans l’attente d’une opération. On lui avait imposé une batterie de tests la veille.
    Le mardi matin, il s’agissait de passer aux choses sérieuses.
    Le docteur Kenneth Brown se présenta à la chambre d’Eugénie un peu avant huit heures, toujours en vêtements de ville, au même moment que deux infirmières poussant une civière.
    — Alors, madame Dupire, nous avons rendez-vous ce matin.
    Il n’hésitait pas à utiliser ses quelques connaissances du français, surtout que dans son état de nervosité, la patiente mobiliserait avec difficulté les bribes d’anglais apprises chez les ursulines.
    — Je ne peux pas dire que j’y trouve le moindre plaisir, murmura-t-elle.
    — Je comprends très bien. Si cela peut vous rassurer, vous ne serez pas la première à subir ce genre d’intervention. La procédure se déroulera très bien, je vous assure.
    L’engagement ne lui coûtait rien, car si les choses tournaient mal, la patiente ne se trouverait plus en état de lui reprocher cet optimisme. Eugénie fit mine de se lever pour prendre place sur la civière.
    — Non, madame, intervint une infirmière. Aujourd’hui, nous sommes à votre service pour vous éviter tout effort.

    A deux, elles passèrent les mains sous la patiente pour la faire glisser du lit vers l’étrange chariot à roulettes.
    — Nous nous reverrons tout à l’heure, madame, précisa le docteur Brown. Je porterai un masque, mais ce sera bien moi !
    La femme se priva d’une allusion aux personnes commettant leur forfait en dissimulant leurs traits. Le moment ne prêtait pas à l’humour, surtout mauvais. L’homme s’esquiva et les
    infirmières,
    l’une
    poussant,
    l’autre
    tirant,
    lui
    firent parcourir un long corridor.
    Étendue sur le dos, la malade apprécia médiocrement le singulier voyage. De sa position, elle contempla le défilement du plafond, les lampes à intervalle régulier, la partie supérieure des portes des chambres. Les quelques personnes croisées en chemin jetaient sur elle d’étranges regards, un peu mal à l’aise, mais surtout curieux. Personne n’osa toutefois lui demander ce dont elle souffrait, pourquoi on allait lui ouvrir le ventre.
    La civière pénétra dans une petite pièce encombrée.
    Les murs étaient couverts de céramique blanche, une énorme lampe placée au bout d’un bras articulé dominait la salle.
    — Nous allons de nouveau vous changer de lit, dit une infirmière en actionnant du pied un petit levier à la base de la civière.
    Soigneusement, elle évitait de prononcer les mots « table d’opération». Par à-coups, Eugénie s’éleva à la hauteur voulue, puis on la glissa sur la surface plane, assez haute pour permettre à un homme de travailler confortablement.
    Sous son dos et ses fesses nues, elle sentit la surface froide.
    Depuis son réveil, toutes ses sensations prenaient une acuité particulière.

    Les deux employées s’esquivèrent en emportant la civière. La patiente prit conscience d’une autre présence dans la pièce : une femme portant un long vêtement

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