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Fatima

Fatima

Titel: Fatima Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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Messager, comme l’appellent ceux qui l’aiment. Ô Puissant et Clément Seigneur, Toi qui peux tout, laisse-moi être son soutien, comme Abdonaï a su soutenir ma mère. Ô Rabb Tout-Puissant et Miséricordieux, ne me laisse pas devenir une fille sotte, une fille faible et inutile. Tu as pris mon frère Al Qasim. Ne T’oppose pas à ce que je le remplace. Tu as voulu mon corps de fille, mais Tu sais que je peux le rendre aussi courageux et puissant qu’un corps de garçon !
    Si le Seigneur voyait tout, comme l’affirmait son père, alors Il voyait l’urgence. Partout dans Mekka circulaient des paroles fielleuses envers Son Messager. Des menaces, aussi. Bientôt ceux qui les proféraient ne se contenteraient plus de mots. Bientôt, Fatima n’en doutait pas, il faudrait faire mieux que se taire et se détourner sous les insultes. Elle n’était pas la seule à s’en rendre compte.
     
    L’avant-veille, elle avait surpris un conciliabule entre trois des fidèles entre les fidèles de son père : Abu Bakr, Tamîn al Dârî et Abdonaï le Perse.
    Ces trois-là étaient fiables. Bien sûr, Abdonaï avait désormais les gencives aussi nues que son crâne. Ses poumons se transformaient en braise quand il fallait courir. Mais sa main valide savait encore manier la nimcha avec assez d’adresse pour en effrayer plus d’un, et son poignet de cuir pouvait toujours assommer un mouton.
    Tamîn al Dârî, on pouvait compter sur lui. Fatima connaissait son histoire. Tamîn lui-même la lui avait contée. Il avait rencontré son père bien des années auparavant au royaume de Ghassan, dans la cohue d’un marché. Il avait entendu parler de lui, de ce Muhammad ibn ‘Abdallâh qui n’était encore que le serviteur de la saïda bint Khowaylid. La rumeur disait qu’il avait, à lui seul et avec l’aide de vieilles chamelles, mis en fuite une razzia contre sa caravane. Tamîn en avait beaucoup ri et avait voulu entendre l’histoire de la bouche même de Muhammad.
    Leur rencontre avait pris un drôle de tour. Au lieu de se vanter de son exploit, Muhammad, apprenant que Tamîn croyait au Dieu unique des chrétiens, n’avait cessé de l’interroger sur ce Dieu. De même, il ne tarissait pas de questions sur les nombreux voyages de Tamîn plus au nord. Ainsi était née leur amitié, de question en réponse et de curiosité en curiosité.
    Aujourd’hui, Tamîn était riche. Il ne devait rien à personne, et le Rabb Clément et Miséricordieux dont parlait Muhammad lui était devenu infiniment plus aimable, simple et réel que celui des hommes du Nord et de Byzance. Jamais il ne craignait de montrer sa fidélité à « Muhammad le Démon ». Jamais il n’hésitait à répéter en public, et jusque sur l’esplanade de la Ka’bâ, les paroles et les messages de son Rabb.
    — Il n’est de dieu que Dieu, aimait-il clamer devant ceux qui doutaient. Muhammad ibn ‘Abdallâh est Son Envoyé.
    Le plus souvent, en réponse, les quolibets pleuvaient. Parfois aussi les coups. Selon les uns ou les autres, Tamîn riait ou frappait avec la même tranquillité d’âme.
    Quant à Abu Bakr, Fatima avait l’impression de l’avoir toujours connu. Depuis longtemps, sur les bancs de la mâla, la Grande Assemblée, aux entrepôts ou dans les ruelles de Mekka, on le surnommait « l’ombre de Muhammad ». Et Muhammad, qui l’aimait autant qu’un frère de sang, disait de lui :
    — Tu es ma troisième main !
     
    Donc, quand, l’avant-veille, Fatima était entrée dans la grande resserre des armes de la maison à la recherche du vieil Abdonaï, elle l’avait trouvé en train de chuchoter dans la pénombre avec Abu Bakr et Tamîn. Elle s’était aussitôt cachée pour les écouter.
    — Ils ne vont plus se retenir longtemps, grommelait Tamîn. La haine les démange. On les dérange trop. Je vous le dis : ils ne veulent plus seulement se moquer. Ils veulent tuer.
    Abu Bakr avait approuvé sèchement.
    — Tuer… ou nous faire fuir Mekka, avait-il marmonné. Comme si cette ville et ces maisons n’étaient pas les nôtres !
    Tamîn avait laissé fuser un petit rire aigre.
    — Autant de richesse pour eux s’ils pouvaient nous obliger à filer telles des poules devant le lynx ! Cela se voit comme le nez au milieu de la figure. Ils ne s’en cachent plus. Ils veulent ruiner Muhammad, ruiner le vieil Abu Talib et, si possible, nous ruiner avec eux. Autant de richesse pour leurs fontes pourries de menteurs et de

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