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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch
Autoren: Jean-Pierre Charland
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avec les enfants. Il en ira ainsi tous les jours. Je
    compte sur vous pour lui faire le meilleur accueil.
    Un silence obstiné lui répondit, alors que la grosse femme agitait la sauce dans son grand chaudron de fonte.
    — Je suis certain que je n'aurai jamais à revenir sur le sujet.
    Ces mots constituaient son dernier avertissement. Une récidive après cela, et ce serait la porte. Joséphine acquiesça d'un signe de tête.
    Un moment plus tard, Thomas Picard revenait vers l'entrée de la maison. Les deux sacs contenant les vêtements d'Elisabeth Trudel étaient disparus. Celle-ci devait maintenant prendre ses aises dans la petite pièce juste au-dessus.
    Dans le couloir, en face de la porte donnant sur le salon se trouvait la pièce de travail du commerçant, qui pénétra dans sa « bibliothèque ». Des livres et deux fauteuils confortables se trouvaient là, bien sûr. Mais c'étaient un large bureau et un siège capitonné de cuir qui attiraient surtout le regard. Picard y poursuivait parfois ses journées de travail jusque tard dans la nuit. Au fond de la pièce, une porte s'ouvrait sur un petit cagibi. En ce lieu, l'homme avait installé un lit étroit et une commode. Un miroir accroché au mur lui permit de revoir le nœud de sa cravate et de donner quelques coups de brosse à ses cheveux.
    il y avait quelques années, le médecin de la famille avait suggéré qu'il déserte le lit conjugal, car sa seule présence nuisait au sommeil de son épouse. Maintenant, il passait souvent directement de ses livres de comptes à la couchette de ce réduit sans fenêtre. Depuis la naissance difficile d'Édouard, la vie conjugale avait abandonné tous ses droits à la maladie.
    Dans les usines et les manufactures de la Basse-Ville de Québec, les travailleurs des deux sexes terminaient leur quart à six heures, les samedis comme les autres jours de la semaine, domine la plupart recevaient leur paie ce jour-là, de nombreuses personnes s'arrêtaient dans les magasins avant de rentrer chez eux. Aussi Marie Buteau, les jambes douloureuses pour avoir passé une dizaine d'heures debout, s'efforçait de sourire au moment de répondre aux retardataires. Des sociétés charitables réclamaient que les vendeuses puissent s'asseoir derrière leur comptoir quand aucun client ne se trouvait sur les lieux. Dans son état de fatigue actuel, la jeune fille trouvait leur revendication très séduisante. Malheureusement, Thomas Picard demeurait réfractaire à ce genre de demande.
    Un peu après sept heures, son patron immédiat, Alfred Picard, daigna se matérialiser devant elle.
    —    Tout s'est bien passé ? s'enquit-il en la rejoignant derrière le comptoir où se trouvait la caisse enregistreuse.
    —    Rien à signaler qui sorte de l'ordinaire. Votre frère a demandé à vous voir cet après-midi.
    Prononcés avec le sourire, ces mots contenaient le reproche le plus explicite que la jeune fille oserait exprimer pour avoir été laissée seule près de la caisse enregistreuse. Son interlocuteur ne s'en formalisa guère.
    —    Je suppose que notre Alexandre le Grand de la Basse-Ville, le conquérant du commerce de détail, a dû afficher une mine bien déçue en ne me trouvant pas.
    Le ton chargé d'ironie trahissait des relations familiales pas toujours au beau fixe.
    Engoncé dans un habit élégant, le cou serré par un col en celluloïd aux pointes droites, Alfred Picard faisait un peu trop dandy pour un chef de rayon, même si les clientes appréciaient son allure d'esthète. Aîné de la famille Picard, à trente-cinq ans il demeurait mince, plutôt grand. Ressemblant à son frère quant aux traits du visage, un observateur attentif aurait toutefois constaté qu'il affichait une expression bien différente. L'énergie confinait à la dureté chez Thomas. Alfred offrait plutôt un sourire toujours aimable et une langueur certaine. Son attitude laissait deviner de la mollesse de caractère. Théodule, le fondateur de la maison de commerce, avait dû tirer les mêmes conclusions, au point d'avoir confié les rênes de son entreprise à son cadet, quand la maladie l'avait contraint à abandonner les affaires.
    —    Par le plus grand des hasards, reprit le chef de rayon après une pause pour encaisser le prix d'une paire de gants, le patron n'a pas indiqué que le dîner familial des Picard prévu pour demain a été remis à la semaine des quatre jeudis ?
    —    ... Non, il n'a fait aucune allusion de ce
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