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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch
Autoren: Jean-Pierre Charland
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paille un peu incliné sur les yeux.
    D'ailleurs, les autres paroissiens ne s'y trompaient pas. Sur son passage, toutes les têtes se tournaient vers l'étrangère. Les murmures interrogatifs sur son identité se poursuivirent jusqu'à ce que le curé, précédé d'un petit peloton de servants de messe, apparaisse dans le chœur.
    Marie Buteau réfréna aussitôt sa curiosité pour fixer les yeux sur le petit homme qui dirigeait la chorale. Pendant l'heure suivante, son regard revint souvent au banc des Picard, à l'avant, parmi les notables. L'absence d'une épouse susceptible de montrer les plus beaux vêtements du grand magasin se trouvait en partie compensée par la tenue des deux enfants, une incarnation parfaite de la mode édouardienne. Eugénie jouait très bien son rôle de petite fille sage, un missel relié de cuir blanc dans ses mains gantées de dentelle fine. Même si elle ne savait pas lire, elle affectait de suivre la cérémonie. Son frère déguisait plus difficilement son ennui, tournant le regard dans toutes les directions, en particulier vers les zouaves pontificaux. Ces soldats d'opérette se trouvaient affublés d'un ridicule uniforme gris à pantalons bouffants. Réunis dans un banc de fonction à l'arrière du temple, ils devaient assurer l'ordre par leur présence martiale.
    Régulièrement, Elisabeth ramenait le garçon à Tordre, lui murmurant parfois quelques mots à l'oreille. A la fin, pour qu'il cesse de regarder vers l'arrière, elle posa la main gauche sur la nuque de l'enfant. Plutôt que de se rebiffer, celui-ci s'appuya légèrement contre le corps de la jeune femme, posant la tête sur sa hanche quand ils étaient debout, contre son épaule en position assise.
    Du coin de l'œil, le père appréciait la scène, heureux de ne pas avoir à s'en mêler.
    —    Tu devais te joindre à nous.
    En disant cela, Thomas Picard passait le doigt entre son col de celluloïd et son cou, agacé par la chaleur de la chambre de sa femme.
    —    Tu vois bien que c'est impossible.
    Alice se trouvait recroquevillée dans son fauteuil, son peignoir soigneusement fermé jusqu'au cou. Sur la petite table, à portée de la main, se trouvait un plat contenant de l'eau. La malade y trempait un morceau de tissu pour le poser ensuite sur son front.
    —    J'ai mal à la tête, ajouta-t-elle encore pour se justifier.
    L'homme fit mine de dire quelque chose, puis choisit de
    se taire. Il se retira, ferma la porte un peu plus fort que nécessaire. Alors qu'il s'engageait dans l'escalier, il s'arrêta puis revint sur ses pas pour frapper à la porte d'Elisabeth.
    —    Vous vous joindrez à nous pour le dîner.
    —    ... Je ne sais pas si je puis... Vous avez des invités.
    —Je désire que les enfants mangent en compagnie de leur grand-mère sans avoir à m'occuper d'eux sans cesse. Je dois parler affaires.
    —    Très bien, je serai là.
    —    Merci.
    Madame veuve Théodule Picard ne devait pas avoir plus de soixante ans, mais elle en affichait vingt de plus, au moins. Cela tenait en partie à ses vêtements. Veuve depuis cinq ans, elle s'était vouée au deuil perpétuel. Sa robe ample ressemblait à une cascade de dentelles noires.. Son collier de jais ajoutait une dureté minérale à l'ensemble. Surtout, un curieux bonnet de même couleur, passé de mode depuis au moins cinquante ans, couvrait ses cheveux blancs.
    —    D'où venez-vous, exactement? demanda-t-elle en guise de tout salut à Elisabeth, en l'examinant de ses yeux bleus très durs.
    —    ... Du couvent des ursulines.
    —    Vous n'êtes certainement pas née là !
    La répartie était venue après un rire bref qui sonnait comme une menace.
    —    De Saint-Prosper.
    —    De Beauce ?
    —    De Champlain.
    —    Il en faut du temps pour obtenir une information toute simple! Etes-vous sotte à ce point, ou faites-vous semblant?
    Les deux femmes se faisaient face dans le salon. La préceptrice avait cru bien faire en amenant les enfants rencontrer leur grand-mère, avant de passer à table. Ces derniers demeuraient peureusement contre sa jupe, alors que la question sur ses origines avait servi d'entrée en matière.
    —    Et vous croyez que quelques années au couvent vous rendent compétente pour vous occuper des enfants des autres? continua la visiteuse, sans attendre une réponse à la question précédente.
    —    J'ai terminé le cours normal.
    —    Dans ce cas, je
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