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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch
Autoren: Jean-Pierre Charland
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présume que mon fils se croit autorisé à vous faire confiance.
    Personne ne pouvait douter, dans la pièce, que la vieille dame ne partageait en rien pareille naïveté! Quant aux enfants, le soin qu'ils mettaient à se tenir loin de l'aïeule et près de la préceptrice traduisait bien leur appréciation de la question.
    —    La mère supérieure m'a assuré de la compétence de mademoiselle Trudel, intervint Thomas avec l'espoir de mettre fin à l'échange.
    —    Bien sûr, ces ventres secs, enfermés dans un cloître, s'y entendent pour l'éducation des gamins. J'aimerais bien voir l'une d'elles en fabriquer un.
    La vieille dame se trouvait dans l'un de ses mauvais jours, son rhumatisme devait la tenailler. Afin de réduire les dégâts, car l'action de mastiquer limiterait le nombre de paroles méchantes prononcées, le maître de la maison suggéra :
    —    Nous pourrions passer à table tout de suite.
    —    Nous n'attendons pas ta femme ?
    —    ... Elle ne descendra pas.
    Madame veuve Picard gardait encore un atome de bienséance, aussi elle ne parla pas. Mais son regard sur Elisabeth Trudel, qu'elle examina de nouveau des pieds à la tête, fut on ne peut plus éloquent.
    Thomas se dirigea vers la salle à manger en tenant sa mère par le bras. Alfred choisit ce moment pour s'extirper de son grand fauteuil. Parce qu'il lui tournait le dos, la jeune femme n'avait pas encore remarqué sa présence.
    —    Comme les usages de cette maison laissent à désirer, je vais devoir me présenter moi-même : Alfred, le fils du dragon femelle, le frère de votre patron.
    Il tendait la main, un large sourire sur le visage. La jeune femme la serra en disant son nom. Son air trahissait encore le désarroi que lui avait inspiré l'accueil de la veuve.
    —    Ne vous en faites pas, elle ne vient pas souvent ici. Ce genre d'attaque ne se répétera pas tous les dimanches. Sa santé n'est plus très bonne. Voyez-vous, je suis bien informé sur le sujet, elle vit avec moi... ou moi avec elle, selon son point de vue. Je n'ai pas encore quitté le nid familial.
    L'homme avait prononcé ces mots en laissant poindre son ironie habituelle. Il s'accroupit pour être à la hauteur des enfants, toujours empêtrés dans les jupes de leur préceptrice, puis commença sur un ton joyeux :
    —    Impératrice Eugénie, venez me faire la bise.
    La fillette consentit de bon cœur, posa les lèvres sur la joue de son oncle.
    —    Montre-moi ta robe, demanda-t-il encore en lui faisant signe du doigt de tourner sur elle-même.
    Elle obtempéra, montrant sa robe blanc ivoire, ceinturée d'un ruban bleu. Comme il convenait pour une personne de son âge, le vêtement atteignait tout juste les genoux. Au moindre mouvement, il révélait un pantalon blanc orné d'un foisonnement de dentelles.
    —    Adorable, commenta Alfred. Tu deviens une très jolie jeune fille. Et toi, jeune homme, tu seras bientôt aussi grand que moi. Viens ici.
    Edouard ne se fit pas prier pour se précipiter dans les bras de son oncle. En se relevant, celui-ci murmura :
    —    Allons les rejoindre avant que l'ogresse ne revienne pour nous dévorer.
    Elisabeth mettait les pieds pour la première fois dans la salle à manger. Au milieu de cette pièce sans âme se trouvait une grande table de bois sombre pouvant accueillir huit convives. Madame veuve Théodule se trouvait assise à une extrémité, son fils cadet à sa droite. Le couvert à sa gauche indiquait que l'aîné ne pourrait pas prendre ses distances. Il s'assit en laissant échapper un soupir un peu las.
    Un moment, la jeune employée se demanda où prendre place. Trois couverts avaient été placés à l'autre extrémité de la table, mais occuper l'endroit qui revenait à l'épouse lui paraissait de la dernière inconvenance.
    —    Au bout, indiqua Thomas. De toute façon, vous devrez découper la nourriture des enfants. Comme cela, les assiettes seront à votre portée.
    L'aïeule examinait la scène. Pour la première fois, ses yeux trahissaient un certain amusement. Un moment plus tard, Joséphine, affublée de sa robe du dimanche, servit la soupe. Au moment où le rôti arriva sur la table, Thomas Picard révéla ses plans :
    —    Nous pourrions fabriquer nous-mêmes certains vêtements, plutôt que de donner des profits à des manufacturiers.
    Alfred cessa un moment de mastiquer, puis rétorqua :
    —    Avoir nos propres ateliers de confection
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