Fausta Vaincue
gronda Maurevert en se mordant les poings, c’est à devenir fou ! Le démon m’échapperait encore !… Qui sait si Fausta ne me trahit pas ?… Qui sait si ce n’est pas moi qu’attend le traquenard ?…
Il essuya son front ruisselant de sueur, et comme Pardaillan avait disparu, il se leva, sortit de sa cachette et fit précipitamment quelques pas comme pour rentrer dans Paris.
– Mais non ! fit-il en s’arrêtant. Ce n’est pas possible. Fausta le hait… non pas autant que moi, certes ! mais il y va pour elle d’immenses intérêts !… Suis-je fou ?… Non !… Sans doute Fausta a changé son plan pendant mon absence !… Sans doute elle a oublié sa promesse de me faire assister au supplice du démon !… C’est elle qui vient de l’envoyer chercher… Parbleu ! J’y assisterai !…
Et à son tour, avec un éclat de rire, il s’élança vers l’abbaye…
Mais tandis qu’il cherchait à se rassurer, tandis qu’il s’affirmait qu’il courait au supplice de Pardaillan, il sentait, il devinait que ce n’était pas vrai, et son cœur battait à grands coups, son visage ruisselant se convulsait, et il étouffait des imprécations de rage.
Lorsque deux heures plus tard il redescendit les pentes de Montmartre, Maurevert pleurait… des larmes furieuses qui lui brûlaient les yeux et qu’il n’essuyait pas. La secousse était terrible. Il se sentait faible comme un enfant. Plus d’espoir. Tout était fini…
Comment eut-il l’idée de reprendre sa place dans ce buisson où il s’était abrité le matin ? Qu’espérait-il encore ?… Rien, sans doute. Peut-être voulait-il simplement attendre le retour de Fausta, la voir, lui parler… Quant à Pardaillan, il était sûr qu’il ne rentrerait pas dans Paris… Et tout à coup, il le vit qui marchait devant la litière !
Maurevert ne se demanda pas pourquoi Fausta et Pardaillan rentraient ensemble. Il ne chercha pas à calculer si une réconciliation avait pu se produire. Dès qu’il eu vu Pardaillan franchir la porte, il rentra dans Paris ; un héraut d’armes passait. Maurevert l’obligea à descendre de son cheval, sauta en selle, et ventre à terre prit le chemin de l’hôtel de Guise.
Le duc était en conférence dans son cabinet. Maurevert haletant, livide, renversa, écarta violemment gardes et domestiques, ouvrit la porte, s’avança précipitamment vers Guise stupéfait, et dit :
– Monseigneur, Pardaillan est dans Paris !
Guise qui s’apprêtait à rudoyer l’intrus pâlit à ces mots.
– Maurevert ! cria-t-il. Quoi ! c’est vous… Et vous dites ?…
– Je dis, monseigneur, que votre ennemi acharné, celui à qui vous devez votre défaite de Chartres, vient d’entrer dans Paris… Je l’ai vu de mes yeux… le sire de Pardaillan est entré par la porte Montmartre, seul, tranquille, et si monseigneur veut…
– Par la sembleu ! dit l’un des conseillers de Guise présent à cette scène.
– Par les boyaux du diable ! grommela un autre.
– Il faut saisir le drôle !
– Et l’empaler sur la flèche de la Sainte-Chapelle !…
– Paix, Maineville ! dit le duc de Guise. Silence, Bussi !… Voyons Maurevert, précise : quand, comment l’as-tu rencontré ?… Et d’abord, depuis quand es-tu de retour ?…
– Depuis une heure, monseigneur. Je me rendais ici tout à la douce, et j’étais passé par la rue Montmartre pour y prendre des nouvelles de Lartigues…
– Il est mort, dit Bussi, et le diable seul peut savoir qui lui a fourni ce coup de rapière dont il est trépassé.
– C’est ce qu’on m’avait dit, fit Maurevert d’une voix calme, et je voulais m’en assurer, donc, lorsqu’au moment d’entrer chez Lartigues, qu’est-ce que je vois ?… Pardaillan qui cheminait le plus paisiblement du monde, venant de la porte Montmartre qu’il venait de franchir. Ah ! monseigneur, vous pouvez croire que j’ai dû me faire violence pour ne pas provoquer sur-le-champ ce démon… mais j’ai pensé que ce gibier vous appartenait… Dès lors, j’ai oublié Lartigues pour accourir vous prévenir… Mais j’y songe ! Ne serait-ce pas le damné truand qui aurait occis notre pauvre ami ?… Vous savez que le drôle a juré la male mort contre tous vos plus fidèles…
Guise grinça des dents. Cette insolente audace de Pardaillan pénétrant dans Paris en plein jour et sans se donner la peine de se cacher l’humiliait et l’exaspérait.
– Il
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