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Fausta Vaincue

Titel: Fausta Vaincue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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Mais grâce à ce grand bel homme, les deux païennes n’ont pu se sauver… Ecoutez, maître Picouic, puisque tel est votre nom, bien que je ne le trouve pas aussi harmonieux que vous le dites…
    Picouic prit un air excessivement humilié et murmura :
    – J’en changerai, si cela peut vous plaire, ma digne sœur.
    – Non, non, c’est inutile. Mais écoutez. Je vois que je m’étais trompée sur votre compte. Vous êtes un homme de cœur, un homme considérable… un brave homme ! d’autant que vous avez de la religion et que vous chantez à ravir…
    – Ma sœur… vous me rendez confus… vous m’accablez…
    – Non, je fais réparation. Enfin, en arrêtant ces deux malheureuses hérétiques au moment où elles s’enfuyaient, vous avez rendu à la Révérende supérieure, Mme de Beauvilliers, un service qu’elle ne saurait oublier… Je vais de ce pas lui en parler, et vous serez récompensés.
    – Et quelle sera notre récompense, ma sœur ?… si toutefois cette question ne vous semble pas indiscrète…
    – Je ferai en sorte que vous soyez choisis comme chantres de notre chapelle, bien qu’on n’y dise plus guère la messe qu’aux jours de fêtes et dimanches…
    – Ma sœur, dit Picouic, excusez encore cette question : quel est le payement que vous accordez à vos chantres en ce couvent ?
    – Nous ne les payons pas, dit Mariange avec dignité ; les ressources du couvent sont trop réduites pour le moment ; mais le couvent ne saurait manquer de devenir très riche dans un peu de temps… dès qu’un grand événement qui se prépare sera accompli… Alors, vous serez payé double pour le temps où vous aurez chanté au lutrin… et en attendant, vous aurez mérité la faveur du ciel et la mienne.
    – Tenez, ma sœur, fit Picouic, j’aime autant vous le dire tout de suite : je suis d’une modestie dont vous n’avez pas idée, je souffre d’avance à l’idée de recevoir les éloges de la sainte et révérende mère abbesse… je vous en prie, ne lui parlez pas de nous.
    – Vraiment ? fit Mariange qui, d’ailleurs, chargée de veiller sur Violetta, ne tenait nullement à raconter à l’abbesse la tentative de fuite due à sa négligence.
    – C’est tel que je vous le dis. Ni mon ami M. Croasse, ni moi-même, nous ne voudrions accepter les hautes fonctions de chantres, dont nous ne sommes pas dignes. Nous nous contenterons de ce que vous venez de nous promettre, c’est-à-dire la faveur du ciel, et la vôtre…
    – Ah ! s’écria Croasse, nous ne vous quittons plus ! Je me suis toujours senti un faible pour la vie de couvent.
    – Comment, vous ne nous quittez plus ! s’écria sœur Mariange interloquée.
    – Mon Dieu oui, nous nous installons ici… Ne craignez rien, ma sœur ! vous serez amplement dédommagée de l’hospitalité que vous allez nous donner. D’abord, nous cultiverons pour vous ; ensuite, nous surveillerons étroitement les deux païennes, et enfin, nous aurons pour vous les bonnes manières auxquelles vous avez droit…
    Croasse jeta sur Philomène un regard incendiaire. Mais Philomène était tout acquise à la proposition de l’hercule à la belle voix. Elle en palpitait, la pauvre vieille fille ! Quant à sœur Mariange, en quelques rapides réflexions, elle entrevit tout le parti qu’elle pouvait tirer de deux serviteurs fidèles qu’elle aurait toujours sous la main, qui feraient sa besogne, et surtout qui deviendraient deux geôliers pour les drôlesses hérétiques dont elle avait la garde.
    – C’est dit ! fit-elle tout à coup.
    – Quoi ! s’écria Picouic, vous consentez à nous donner l’hospitalité ?
    – Certes… et de grand cœur…
    – Et à… nous… nourrir ?
    – Sans aucun doute !…
    Picouic eut un coup d’œil d’admiration pour Croasse qui avait eu l’idée de cette aubaine inespérée, invraisemblable, ou du moins qui lui paraissait telle. Philomène et Croasse nageaient dans la joie, Croasse à l’idée de manger tous les jours, Philomène à la pensée amoureuse qui faisait battre son cœur.
    – Venez, dit sœur Mariange aux deux hercules ravis.
    Toute la bande se dirigea alors vers le pavillon voisin de la brèche, et y entra.
    – Voilà, reprit Mariange, vous habiterez là ; ce soir, à la nuit, avec sœur Philomène, nous vous apporterons votre lit, c’est-à-dire une demi-douzaine de bottes de bonne paille fraîche, que nous prendrons dans les écuries de l’abbesse…

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