Fausta Vaincue
ce cas, dit Picouic, j’aviserai d’autre manière ; il faut que je voie la petite Violetta et que je l’interroge… J’ai toujours pensé que cette petite était de haute famille. Qui sait si cette famille ne la cherche pas ?… Je te dis que Violetta, c’est notre fortune, Croasse !… il faut ici faire un coup de génie et nous emparer de cette petite…
– Veux-tu que j’aille la chercher et que je l’amène ? fit superbement Croasse…
Picouic haussa les épaules.
– Non, dit-il. Ne te mêle de rien. Laisse-moi faire. Tu m’aideras seulement quand il en sera temps… d’ici là, puisque nous sommes en pays de cocagne, contente-toi d’engraisser un peu, tu en as besoin.
– Au fait, dit Croasse, il fait bon vivre ici… et la venaison de sœur Philomène vaut bien les glands de la porte Montmartre et les cailloux de Belgodère.
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Chapitre 7 MARIE DE MONTPENSIER
J acques Clément, rentré à Paris, se dirigea tout droit vers son couvent situé dans le haut de la rue Saint-Jacques. L’idée ne lui fût pas venue de s’attarder hors du monastère quand rien ne l’y obligeait. Et il avait hâte d’être seul dans sa cellule pour examiner avec lui-même la situation qui lui était faite. Mais il lui fallait d’abord rendre compte au prieur Bourgoing du résultat de son voyage. Il n’avait d’ailleurs aucune appréhension de cette entrevue. Le prieur des Jacobins s’était toujours montré pour lui d’une extrême affabilité et lui avait accordé une liberté dont les autres moines étaient bien loin de jouir.
Il était sept heures du soir lorsqu’il arriva devant la porte du couvent, ayant accompli dans sa journée les vingt lieues qui séparent Chartres de Paris. Son cheval – le cheval qu’il tenait de la générosité de ceux qui devaient l’occire !… – était blanc d’écume.
– Ayez donc soin de cette noble bête, dit-il au frère portier, faites-la conduire dans les écuries de notre abbé qui sera fort aise de cette acquisition : c’est un présent des Philistins !…
Le frère portier obéit sans répliquer, car Jacques Clément jouissait dans le couvent d’une considération et d’une autorité dues à la bienveillance particulière dont l’honorait le prieur. Il appela donc deux frères lais qui remplissaient l’office de valets d’écurie et leur remit le cheval emprunté au roi… Jacques Clément, s’étant assuré que sa monture était placée dans une bonne litière et qu’elle avait bonne provision d’avoine, se dirigea vers l’appartement de l’abbé – appartement fastueux, très mondain, nullement ascétique.
Le prieur Bourgoing était à table. Il lisait et relisait une lettre qui venait de lui être remise il y avait un quart d’heure à peine, et fronçait les sourcils, donnant des signes d’une vive agitation, ce qui ne l’empêchait pas de faire honneur à l’excellent repas que le frère sommelier et deux autres frères lui servaient avec un respectueux empressement.
Bourgoing n’aimait pas beaucoup qu’on le dérangeât dans une aussi importante occupation que le dîner. Mais lorsqu’il sut que le frère Clément était dans son antichambre, il replia vivement la lettre qu’il lisait, donna l’ordre d’introduire le jeune moine et, d’un signe, renvoya ses serviteurs.
– Quoi, mon frère ! s’écria Bourgoing en apercevant Jacques Clément. Dans ce costume si peu conforme aux règles de notre ordre !… Que signifie ?…
Jacques Clément, on s’en souvient, s’était débarrassé de son froc dans l’auberge du
Chant du Coq.
Mais vingt fois, déjà, le prieur l’avait vu dans ce costume de cavalier sans en témoigner ni de la surprise, ni surtout l’indignation qu’il manifestait à ce moment. Le moine demeura donc stupéfait de la question.
– Ce n’est pas tout, reprenait déjà le prieur. Voilà cinq jours que vous êtes absent du monastère et que je vous fais chercher partout dans Paris !… C’est là une étrange manière de remplir vos devoirs !… Vous n’êtes pas frère quêteur, ni prédicateur… vous n’avez reçu aucune mission qui puisse expliquer une si longue absence…
– Pardon,
Reverendissime
Seigneur, dit froidement Jacques Clément, ou vos esprits sont frappés d’un trouble que je ne conçois pas, ou vous devez vous souvenir…
– Je ne me souviens de rien ! interrompit violemment le prieur.
– Quoi ! vénérable père… vous ne m’avez pas vous-même
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