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Fausta Vaincue

Titel: Fausta Vaincue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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veux traiter… ne refusez pas, ce m’est un grand plaisir et une sainte joie que de dîner en tête à tête avec le plus pieux de nos religieux…
    Elle accentua ces mots d’un clignement si malicieux et d’une coulée de regard si fascinante que Jacques Clément, éperdu, se laissa tomber plutôt qu’il ne s’assit sur le siège qu’elle lui désignait.
    La table était admirablement servie en mets et friandises de haut goût, en vins généreux dont les sombres rubis étincelaient dans des carafes de cristal. Nul n’était là pour servir les deux convives : c’était la duchesse elle-même qui avec une dextérité savante et gracieuse découpait pâtés, venaison de chevreuil et pigeonneaux, remplissait les verres de ses blanches mains chargées de diamants.
    C’était comme un rêve qu’eût fait le jeune homme. Il mangeait et buvait sans s’en apercevoir, et peu à peu l’ivresse montait à son cerveau. Mais cette ivresse provenait surtout du spectacle merveilleusement impur qu’il avait sous les yeux.
    En effet, Marie de Montpensier portait un costume que lui eût envié quelque opulente ribaude. C’était à peine si les gazes légères qui flottaient autour d’elle dissimulaient ses formes délicates. Ses bras un peu graciles, mais admirablement modelés et d’un rose léger, ses bras étaient nus. Son corsage, largement et profondément échancré, laissait voir ses seins de neige et son cou flexible qu’ornait un collier de perles d’une inestimable valeur.
    Il eût été impossible à Jacques Clément de détacher son regard de cette femme qu’il adorait d’un amour mystique, d’un amour religieux, et qui s’ingéniait à éveiller en lui l’amour le plus temporel. Une flamme ardente, peu à peu, brillait dans les yeux de la tentatrice, et Jacques Clément se sentait devenir tantôt pourpre et tantôt très pâle. Alors il buvait, il vidait d’un trait le verre que la noble et jolie ribaude lui remplissait sans cesse.
    Ces vins, ces mets savamment épicés, ces parfums, la vue de cette adorable femme, tout contribuait à pousser le moine au vertige du péché mortel dont, jusqu’à ce jour, il avait pu sauver et sa chair et son âme…
    Un rire pervers, une volonté malicieuse de faire enfin succomber cette chair étincelaient dans les yeux de Marie de Montpensier. Cependant, dès l’instant où ils s’étaient assis, ils s’étaient mis à causer de choses fort intéressantes sans doute, mais qui ne se rattachaient pas à leur principale pensée en ce moment – pensée de séduction chez la duchesse, pensée de délire, d’enivrement et de défense chez le moine. Toute la scène était pour la séduction. Les paroles n’étaient là qu’un prétexte. Et pourtant, ces paroles elles-mêmes avaient une certaine gravité pour Jacques Clément.
    – Je suis bien heureuse, disait en effet Marie de Montpensier, que vous soyez revenu à la vie et à la santé. Vous voici maintenant hors d’affaire. Mais depuis neuf jours que vous êtes ici… que de fois j’ai tremblé !…
    – Neuf jours !… Il y a neuf jours, madame, que je suis dans cet hôtel ?…
    – Sans doute !… Ne vous en souvenez-vous plus ?… Au surplus, la fièvre a dû vous faire oublier…
    – Je ne me souviens de rien, madame…
    – Quoi ! vous ne vous souvenez même pas de l’instant où je vous ai trouvé à demi mort…
    – Vous m’avez trouvé ? balbutia Jacques Clément.
    – Dans la Cité, derrière Notre-Dame. Il était environ dix heures du soir. Je regagnais mon hôtel en sortant d’une maison que vous connaissez… Soudain, un de mes porte-torches s’écria qu’il y avait un gentilhomme évanoui ou mort sur la chaussée. Je me penchai de ma litière… Je vous reconnus… alors j’éprouvai je ne sais quelle vive douleur au cœur…
    Jacques Clément eut un soupir qui ressemblait à un cri d’espérance insensée.
    – Je descendis, continua Marie en l’examinant malicieusement. Et comme je me penchais sur vous, vous revîntes au sentiment, et vous me dites que des truands vous avaient attaqué et laissé pour mort…
    – Je vous ai dit ?… je vous ai vue ?… je vous ai parlé ?
    – La preuve, c’est que je vous fis placer dans ma litière et transporter ici…
    Jacques Clément était stupéfait. Mais au fond, il admettait sans discussion l’événement, le miracle. L’ange l’avait enlevé du cachot de pénitence et déposé sur la route où Marie de

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