Favorites et dames de coeur
Sa vie matérielle était toutefois fort agréable ; elle appréciait les belles robes et les bijoux, possédait une maison à Versailles, rue de la Pompe 126 , un hôtel à Saint-Germain-en-Laye, racheté à Louvois, et une petite maison champêtre au bord de la Seine, à Carrières : elle y menait une vie rustique et simple l’été avec des amis.
Personnellement désintéressée, Louise ne sut jamais distinguer parmi les innombrables solliciteurs qui, sachant son crédit, quémandaient des places, des faveurs ou des passe-droits. À cette foire aux honneurs, son frère fut le plus acharné (ah, la famille !), mais des « amis » et même quelques-uns de ses domestiques n’eurent aucun scrupule à réclamer des avantages indus. En 1674, ses dettes s’élevaient à 150 000 livres, qu’elle régla grâce à un « prêt » analogue du petit comte de Vermandois.
Louise écrivain
Elle rima ces vers mélancoliques durant son abandon progressif :
[…]
Des désirs d’un grand roi rien n’arrête le cours ;
Ce qui plaît aujourd’hui déplaît en peu de jours ;
Cette inégalité ne saurait se comprendre.
Tous ces défauts, grand roi, font tort à vos vertus ;
Vous m’aimiez toutefois, mais vous ne m’aimez plus.
Mes sentiments, hélas ! diffèrent bien des vôtres !
[…]
Dans un autre registre, un libraire de la rue Saint-Jacques publia les Réflexions sur la miséricorde de Dieu par une dame pénitente (juin 1680), ouvrage anonyme qui connut un grand succès : il y en eut trente-quatre éditions ! Nous savons aujourd’hui que Louise le rédigea, puis qu’il fut édité par le soin d’une de ses amies, à qui elle avait confié le manuscrit après son entrée au Carmel.
L’avidité de Jean-François de La Vallière
Né en 1642, le marquis profita de façon éhontée de la position de sa sœur. Dès 1663, ce mousquetaire du roi obtint une pension de 4 000 livres et le grade de cornette, équivalent de sous-lieutenant, dans la prestigieuse compagnie des chevau-légers du dauphin : cette charge valait 50 000 livres et n’était ordinairement attribuée qu’à un officier éprouvé. La même année, le roi signa son contrat de mariage avec une riche héritière. L’arriviste Jean-François se convertit même au vice italien pour complaire à Monsieur, mais cette brigue n’eut pas le succès escompté.
S’il trafiquait et maquignonnait, au moins fut-il un officier courageux. Capitaine-lieutenant de sa compagnie, avec rang de mestre de camp 127 , il fut félicité par Louis XIV après s’être distingué au combat, et reçut 12 000 livres de récompense (février 1666). La somme lui parut mesquine et il réclama de nouveaux subsides.
Bien que sa familiarité déplacée déplût fortement au roi, qui le lui fit vertement savoir, le marquis de La Vallière obtint le grade de brigadier 128 avant l’invasion des Pays-Bas espagnols (mai 1667). Il n’avait pourtant pas l’âge ni les états de service justifiant une telle promotion. L’éternel quémandeur finit gouverneur du Bourbonnais et mourut en 1676, à l’âge de trente-quatre ans.
FRANÇOISE DE MONTESPAN
« Paroles et regards, tout est charme dans vous. » (Jean de La Fontaine)
Née le 3 octobre 1640 à Lussac-lès-Château 129 . Troisième enfant de Gabriel de Rochechouart, marquis de Mortemart, et de Diane de Grandseigne. Mariée le 6 février 1663 à Louis-Henry de Pardaillan de Gondrin, marquis de Montespan, elle en eut Marie-Christine (1663-1675) et Louis-Antoine (1665).
Elle donna sept enfants à Louis XIV, tous légitimés à l’exception du premier : X…, resté inconnu (1669-1672), Louis-Auguste (1670), Louis-César (1672-1683), Louise-Françoise (1673), Louise-Marie-Anne (1674-1681), Françoise-Marie (1677), Louis-Alexandre (1678).
Des qualités innées
Réputée pour son esprit, la maison de Rochechouart, l’une des plus prestigieuses de la noblesse française, remontait sa filiation certaine à 980 : presque aussi ancienne que la maison de France 130 et que celle des Montmorency, « premiers barons de la chrétienté », elle en tirait une légitime fierté. Les parents de Françoise exerçaient tous deux des charges au Louvre.
Françoise fut d’abord instruite au couvent de Saintes, puis devint demoiselle d’honneur de la jeune reine Marie-Thérèse (1660). Mince, blonde et jolie, les yeux bleus, la dentition parfaite, de caractère agréable, gai quoique volontiers moqueur, elle fut vite
Weitere Kostenlose Bücher