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Favorites et dames de coeur

Favorites et dames de coeur

Titel: Favorites et dames de coeur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pascal Arnoux
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seconde dans les affections de Sa Majesté. Le roi veilla à ce qu’une apparente concorde régnât entre les « dames de la faveur » et les traita sur le même pied. Mais également possessives, Louise et Françoise se répandaient en crises de jalousie dans l’intimité. Supérieurement intelligente, la seconde abreuva sa rivale de piques et d’humiliations, que la cour se complut à amplifier. Écœurée, Louise se retira au Carmel. Ce choix effraya Mme de Montespan, qui y lut le reproche de sa vie dissolue. Par l’intermédiaire de Mme Scarron, elle tenta vainement de dissuader Mlle de La Vallière des vœux perpétuels et des mortifications (1674). Françoise crut néanmoins triompher après ce départ, car le roi l’honora par de grandes fêtes, et lui fit construire le charmant château de Clagny 136 .
    Sa charge de dame d’honneur lui rapportait chaque année 6 000 livres de pension. Elle recevait aussi 150 000 livres pour l’éducation de ses enfants. Elle émargeait de surcroît sur la cassette royale pour des sommes difficiles à évaluer.
    Le roi lui paya exceptionnellement ses dettes de jeu et lui constitua une riche cassette de bijoux. Françoise sembla plus reine que la véritable souveraine : le capitaine des gardes du corps devait porter sa traîne quand un simple page portait celle de Marie-Thérèse. Chagrinée, la reine reprit une antienne déjà utilisée du temps de Mlle de La Vallière et qui était, on en conviendra, d’un style plus fleuri que royal : « Cette poute mé féra mourir ! » Mais bien qu’elle donnât régulièrement des enfants au roi, que celui-ci légitimait, la marquise vécut dès 1675 sous la menace constante d’une disgrâce.
    Une lutte constante
    La première attaque vint du clergé, pour qui la favorite était un objet de péché. Bossuet et le père de La Chaize, confesseur du roi, avaient sollicité du Très Chrétien l’accomplissement de ses devoirs religieux qu’il négligeait depuis plusieurs années. Françoise voulut aussi se confesser, mais fut tancée par le vicaire de l’église de Versailles : « Est-ce là cette Mme   de Montespan qui scandalise toute la France ? Allez, madame, cessez vos scandales et vous viendrez vous jeter aux pieds des ministres de Jésus-Christ ! » (10 avril 1675). Furieuse, elle se plaignit au roi. Mais celui-ci ne put intervenir, car la hiérarchie fit bloc : le curé soutint son vicaire, et reçut l’appui de l’éloquent Bossuet. Plutôt que de se mettre le clergé à dos, le roi accepta de quitter Mme de Montespan. Le bruit de sa disgrâce courut et Françoise se réfugia à Clagny. Le père de La Chaize ne fut qu’à demi rassuré : « Dieu serait plus satisfait si Clagny était à quarante lieues de Versailles », dit-il à Louis XIV. Celui-ci réussit à maintenir sa favorite à distance plus de quinze mois, bien qu’il la vît quotidiennement dans l’exercice de sa charge à la cour. Il « craqua » fin juillet 1676 : elle redevint maîtresse de ses sens « et il en advint Mme   la duchesse d’Orléans et M.   le comte de Toulouse 137  » .
    La seconde attaque vint d’une femme que Mme de Montespan avait instituée gouvernante de ses enfants et dont il était difficile de croire qu’elle devrait la redouter : veuve du poète Paul Scarron, Françoise d’Aubigné élevait ces bâtards avec soin et affection. Mais des disputes au sujet de leur éducation opposèrent les deux femmes, et Mme Scarron réclama l’arbitrage du père : le roi, qui avait eu l’occasion d’apprécier son dévouement au point de la créer marquise de Maintenon (1675), fut marri de ces querelles, car il ne pouvait donner tort à la gouvernante ni désavouer sa favorite. Mme de Montespan ragea du discret soutien du roi à la nouvelle marquise, comme si sa noblesse huit fois séculaire ne comptait pas face à une bourgeoise tirée du néant ; dénué de préjugés, Louis XIV appréciait la compagnie paisible de l’ex-Mme Scarron, dont le bon sens, le savoir et la conversation honnête le reposaient des aigres scènes de jalousie d’Athénaïs.
    Bien que Mme de Sévigné rapportât que sa beauté était une « chose surprenante » (juillet 1676), Françoise de Montespan n’était plus la mince jeune femme qui avait tant charmé Monsieur quinze ans plus tôt ; ses maternités assorties d’un solide coup de fourchette lui donnaient désormais l’allure d’un modèle de Rubens. Cet

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