FBI

Randolph Hearst, enquête sur une autre des victimes de Bulger. Un soir, dans un bar, un homme s’assoit à côté de lui et se présente : « Salut, fils de pute ! Je suis Whitey Bulger et je tue des gens. » Bulger sort de sa poche un papier et lit à voix haute : l’adresse du journaliste, son numéro de sécurité sociale, la plaque d’immatriculation de sa voiture, celle du véhicule de sa femme, l’adresse de la halte-garderie où va sa fille et l’heure à laquelle il l’y dépose tous les matins. Puis Bulger se lève et s’en va… Le journaliste en parle à l’un de ses amis policiers, qui lui avoue son impuissance : « On sait qu’il a commis au moins cinquante assassinats, mais on ne peut rien contre lui. » Le flic lui conseille : « Il n’y a qu’une chose à faire. Tu as des contacts au sein de la Mafia : va les trouver et essaie de voir s’ils ne peuvent pas t’aider. » Aussitôt dit, aussitôt fait, mais, là encore, même son de cloche : « Whitey est fou, dit le parrain contacté par le journaliste ; on ne peut rien y faire. »
    Whitey Bulger ne tuera pas le journaliste, mais uniquement parce qu’il a des choses bien plus importantes à faire en cet automne 1980.
     
    Lawrence Sarhatt, le nouveau SAC de Boston, est bien décidé à mettre fin aux carrières d’informateurs de Whitey Bulger et de Stephen Flemmi. Son analyse est que le jeu n’en vaut plus la chandelle. John Morris et John Connolly sont effondrés : ils viennent de placer des micros dans les bureaux du chef de la Mafia de la ville, Gennaro Jerry Angiulo, et son arrestation n’est plus qu’une question de temps. Une fois le chef de la Mafia hors circuit, ceux que Connolly nomme « mes Irlandais » seront les maîtres du crime organisé dans la ville. Mais, pour que Bulger et Flemmi puissent régner sur le crime à Boston et dans ses environs, ils doivent continuer à bénéficier de la protection que leur offre leur statut d’informateurs. Pour impressionner le SAC de Boston, le 20 novembre 1980, Whitey et « Porte-Flingue » se rendent au quartier général de la famille Angiulo, au 98, Prince Street, pour une discussion d’affaires. Peu importe ce qui s’y dit, seul compte le fait que la conversation est enregistrée grâce aux micros installés par les techniciens du FBI. Quelques heures plus tard, l’Agent spécial Connolly rédige un long rapport et souligne l’importance de ses deux informateurs, à même de discuter d’égal à égal avec les chefs de la Mafia. Mais cela ne suffit pas. Cinq jours après, Bulger rencontre le SAC dans une suite d’un des hôtels de l’aéroport de Boston. Whitey plaide sa cause durant près de quatre heures. Il commence par ses relations avec H. Paul Rico, l’agent qui, en l’arrêtant en 1956, l’a remis dans le « droit chemin ». Dans son compte rendu, le SAC rapporte les propos de Bulger : « L’Agent spécial Rico était un gentleman et a été tellement aidant que lui, l’informateur, s’est mis à ne plus haïr les représentants de la loi. En outre, il a des sentiments très profonds pour l’Agent spécial John Connolly, car ils ont grandi dans le même quartier de Boston, ont rencontré les mêmes problèmes durant leur enfance, et partagent une même haine envers la Cosa Nostra. »
    Whitey Bulger reconnaît avoir été informé de la présence d’un micro dans les bureaux du garage de Lancaster Street. Mais il dit que sa source était un policier d’État qu’il refuse de nommer.
    À l’issue de la rencontre, le SAC de Boston n’est toujours pas convaincu : pour une fois, le charme de Bulger n’a pas opéré. Le SAC accepte toutefois de laisser une tierce personne décider du maintien de Whitey et de « Porte-Flingue » dans le programme Top Echelon Informant . Son choix se porte sur le procureur responsable de la lutte contre le crime organisé à Boston. C’est un ami de John Connolly, qui n’a aucun mal à convaincre le SAC de reconduire les informateurs. Whitey et « Porte-Flingue » ont eu chaud ; Connolly et Morris aussi.
    La deuxième phase de l’opération peut commencer : les chefs de la mafia de Boston, les frères Angiulo, sont arrêtés le 13 septembre 1983. Désormais, Whitey Bulger a les coudées franches. Boston devient la ville dont le prince est un tueur…
    Paul Rico et Jai Alai
     
    Jai Alai est une version américaine de la pelote basque. Importé au début du siècle, ce sport a pris son