FBI
Hoover et Tolson descendent en Floride où, depuis une suite d’un hôtel de luxe, ils dirigent des rafles « contre le vice ». La presse se gausse…
À New York, les journaux surnomment J. Edgar Hoover le « détective du Storke Club », par référence au night-club qu’il fréquente. Situé à l’est de la 5 e Avenue, 3 East 53 e Rue, le club est une institution new-yorkaise lancée en 1933 par un ex-bootlegger, Sherman Billingsley. J. Edgar Hoover y a sa table. Le « Premier ministre » de la Mafia, Frank Costello, aussi. Les deux hommes s’observent ; bientôt ils se croiseront en d’autres hauts lieux de la vie new-yorkaise, alimentant la chronique mondaine. D’autres ennemis de J. Edgar Hoover – mais déclarés, ceux-là – fréquentent aussi régulièrement l’endroit. Parmi eux, deux personnalités surveillées par le FBI en tant que « communistes » : Ernest Hemingway et Charlie Chaplin. Le Directeur y croise les Kennedy, Gloria Vanderbilt, les Roosevelt. Il lui arrive de parler affaires dans la partie « privée » du lieu, la « Cub Room », dont l’accès est étroitement contrôlé par un portier surnommé Saint-Pierre.
Parfois, J. Edgar Hoover se fait prendre en photo au Storke Club en tenue de soirée, un chapeau de papier sur la tête, mains en l’air, faisant mine d’être arrêté par des stars comme la toute jeune Shirley Temple. Il fait même preuve d’une rare inconscience. Un 1 er janvier particulièrement joyeux, alors qu’il fête à son habitude son propre anniversaire et le Premier de l’an, il accepte la proposition faite par ses amis Walter Winchell et Sherman Billingsley de poser, pour une photo, en train d’arrêter un convive. Hoover regarde dans la salle et repère à une table voisine un individu à la mine patibulaire. Lequel décline et s’en va sans demander son reste. Walter Winchell et Sherman Billingsley poussent un soupir de soulagement. Contrairement au directeur du FBI, ils ont reconnu l’individu : c’est un tueur de la Mafia poursuivi pour extorsion de fonds et pour s’être fait passer pour… un agent du FBI ! Finalement, c’est le champion de boxe James Braddock qui posera pour la photo.
Premières armes contre les nazis
Février 1938 : J. Edgar Hoover hérite d’une très grosse affaire d’espionnage, sans doute la plus importante aux États-Unis depuis la Première Guerre mondiale. Elle aurait dû être traitée par le Département d’État ou par celui de la Guerre. Mais ils n’en voulaient pas et ont repassé le dossier à Hoover, qui a été contraint de l’accepter.
Depuis 1917, le Bureau a son mot à dire en matière de contre-espionnage. Au début, ses enquêtes étaient limitées et sujettes à l’appréciation du Département d’État. En 1936, l’administration Roosevelt autorise le Bureau à enquêter à sa guise sur les réseaux communistes, fascistes et nazis implantés aux États-Unis. Le FBI n’a pour ainsi dire pas d’expérience en la matière, et ne dispose pas d’enquêteurs spécialisés dans le contre-espionnage.
J. Edgar Hoover confie le dossier à Leon Turrou, considéré alors comme le meilleur de ses agents. Après s’être distingué dans l’affaire de l’enlèvement du bébé de l’aviateur Charles Lindbergh, Leon Turrou a travaillé sur un des dossiers les plus emblématiques du Bureau : le massacre de Kansas City, au cours duquel un agent fédéral a trouvé la mort. Dans la foulée, Turrou a enquêté avec succès sur une tentative de sabotage visant un dirigeable. Cerise sur le gâteau, il parle plusieurs langues, dont l’allemand.
Leon Turrou commence par interroger un suspect arrêté par la police new-yorkaise, Günther Rumrich, Américain d’origine autrichienne. C’est un déserteur de l’armée américaine qui travaille pour l’Abwehr, les services secrets de l’armée allemande. Günther Rumrich passe aux aveux. Il rêve d’être un espion allemand depuis qu’il a lu les mémoires du légendaire colonel Nicolaï, chef des services secrets allemands pendant la Première Guerre mondiale. N’ayant aucune idée de la manière dont il pourrait contacter les Allemands, Rumrich a envoyé une lettre à Nicolaï aux bons soins du journal allemand Völkischer Beobachter . Se présentant comme un haut gradé de l’armée américaine, il a offert ses services à l’Allemagne. Si Nicolaï était intéressé, il devait répondre par un message dans les
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