FBI
armes du Département de la Justice, une pierre tombale marque la dernière demeure de J. Edgar Hoover. Non loin de là repose aussi Clyde Tolson, directeur associé du FBI.
Amusant : Hoover et Tolson sont les Roux et Combaluzier, voire les Roméo et Juliette, de la lutte contre le crime. La rumeur en a fait des amants : elle est increvable. Mais annoncer une enquête sur cette police vieille de plus d’un siècle oblige à prendre en compte la « femme en rouge », surnom donné à Hoover en référence à ses tendances supposées à jouer les drag queens avant l’heure… Retrouver Hoover et Tolson voisins dans la mort pratiquement aux côtés d’un des pionniers de la cause homosexuelle, en un haut lieu de la cause gay, aurait de quoi faire rêver, si la réalité n’était, à son habitude, un tantinet plus retorse…
Cartha DeLoach a longuement enquêté sur les rumeurs courant sur l’homosexualité supposée de son boss. Quand Cartha évoquait à mots couverts le thème du mariage, J. Edgar Hoover lui disait : « Les gens me demandent pourquoi je ne me suis jamais marié. Je suis sorti avec des femmes, j’en ai connu. Mais si je m’étais marié à la mauvaise femme, ma carrière aurait été ruinée. Et je ne pouvais pas me faire à cette idée. Je suis marié à ma carrière, et je le serai toujours. » Quand il était particulièrement en verve, Hoover se laissait aller à des explications plus inquiétantes, justifiant son célibat par le fait que « Dieu a créé des femmes comme Eleanor Roosevelt ». J. Edgar Hoover haïssait l’épouse du président Franklin Delano Roosevelt parce qu’elle aimait trop les Noirs et les communistes.
Comme pour se rassurer, DeLoach énumère les conquêtes de son boss : la star du cinéma muet Dorothy Lamour, ou encore Lela Rogers, mère de l’actrice Ginger Rogers. DeLoach sait qu’il n’est de meilleur sujet de cancans, dans un Washington prude, bigot et hypocrite, qu’un homme redouté de tous, célibataire ayant vécu chez sa mère jusqu’à la mort de cette dernière en 1938, qui a forgé une organisation uniquement masculine (les femmes n’ont eu droit de devenir agent spécial qu’à la mort de J. Edgar) et qui ne s’affiche qu’avec son plus proche collaborateur, Clyde Tolson.
Physiquement, Clyde Tolson, grand, fort et beau, est l’anti-Hoover. Originaire du Missouri, il débarque au Bureau en 1928, frais émoulu de l’université George Washington, avec en poche un diplôme de droit, tout comme J. Edgar onze ans plus tôt. Tolson est son cadet de cinq ans. Entre les deux hommes, le courant passe, et Tolson devient le collaborateur de Hoover. Plus proche que nul ne le sera jamais. En un temps record, il est le numéro deux du Bureau. Désormais, il va là où va son patron. Chaque matin, les deux hommes se rendent au bureau ensemble ; ils travaillent, mangent, voyagent et partent en vacances ensemble.
Il y a une photo prise en légère contre-plongée dans ce qui ressemble à un patio. En arrière-plan, on devine des palmiers et un parasol, c’est les vacances. Clyde Tolson est assis de trois quarts sur la margelle de ce qui pourrait être un bassin. Il est habillé sport chic : un pull clair à même la peau, un pantalon sans doute en lin. Il a pris nonchalamment appui sur sa main gauche ; son bras droit tombe sur son genou droit. Une pose de séducteur, à la limite du langoureux. Face à lui, un J. Edgar rayonnant, lui aussi vêtu façon Miami années 1930, armé d’un appareil photo. Un cliché peu banal pour un drôle de duo. On hésite à dire que la pose fait maniéré. Elle étonne, car on ne s’attend pas à voir un directeur du FBI et son numéro deux posant ainsi. Il y a dans l’attitude des deux hommes beaucoup d’affection. Trop, pour deux des hommes les plus puissants de Washington. Elle témoigne d’une relation complexe, décrite par certains historiens comme une sorte de « mariage » entre deux célibataires endurcis. Mariage sans doute jamais consommé. De leurs étreintes improbables naît toutefois un beau bébé, la plus célèbre des polices de la planète : le FBI.
Que cache cette relation « particulière » ? Qu’était Tolson pour Hoover ? Son alter ego ? Son confident ? Peut-être même parfois le vrai dirigeant du FBI, mais pas plus, si l’on en croit Cartha DeLoach. « Clyde était d’excellente compagnie les dimanches de pluie, explique-t-il. Mais je doute qu’il
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