FBI
FBI. Des journalistes amis du Bureau sonnent la charge et insistent sur le fait que le FBI a grandement contribué à la lutte contre la Mafia en fournissant des informations aux différentes polices locales américaines. Mais l’éditorialiste du Herald Tribune de New York se demande : « Que fait le directeur du FBI alors que le crime organisé se développe en toute impunité ? » Au sein du FBI, c’est le sauve-qui-peut. Hoover est furieux, les blâmes et les punitions vont tomber. Comme ses collègues basés à Washington, Neil Welch réorganise son emploi du temps afin d’être le moins possible au « Siège du Gouvernement » et de ne pas croiser son directeur, de plus en plus furieux. De son côté, le SAC d’Albany se couvre en faisant remarquer qu’Appalachin n’est pas sur son territoire, mais sur celui du bureau de Buffalo. Le SAC de Buffalo proteste.
« Avant même que les géographes du Bureau se penchent sur la question, Albany reconnaît qu’Appalachin est sur son district, raconte Neil Welch. Le SAC explique que si la réunion a eu lieu sur son territoire, c’est parce qu’il y avait éradiqué le crime organisé et qu’il était donc considéré comme neutre. »
J. Edgar Hoover accepte l’excuse, mais finit par désigner un coupable : Al Belmont, chef de la division « Enquêtes » du FBI. C’est sur lui que retombe la responsabilité. Dans les couloirs, on dénonce à haute voix l’injustice : Al Belmont n’est coupable que d’avoir suivi les instructions du Directeur !
Comme à son habitude, J. Edgar Hoover redoute que le Bureau ne soit embarrassé par cette affaire. Le chef des enquêteurs de la Commission d’investigation sur le racket dans le monde du travail, présidée par le sénateur McClellan, débarque au « Siège du Gouvernement » : il s’appelle Robert Kennedy, dit Bobby, et c’est un des fils de Joseph Kennedy. Hoover ne l’aime pas, il le trouve trop arrogant. Bobby Kennedy réclame copie de tout ce que le Bureau possède sur les participants au sommet d’Appalachin. Puis il repart avec quelques coupures de presse. Inquiet, Hoover note que Bobby Kennedy effectue une démarche similaire auprès du Bureau fédéral des narcotiques, avec plus de succès. Le FBN possède un dossier sur chacun des participants. « Le FBI ne savait rien sur ces gens qui étaient les principaux gangsters des États-Unis », déclarera par la suite Bobby Kennedy5.
Paniqué, J. Edgar Hoover se tourne vers Lou Nichols, le magicien des médias au sein du Bureau. Plus que jamais, il a besoin de lui. Mais Nichols n’est plus qu’à quelques jours de la retraite, et s’apprête à travailler pour… un milliardaire réputé pour ses connexions avec la criminalité organisée. Hoover fait alors appel au chef de la section Recherche et Analyse, William C. Sullivan, homme compliqué, retors, mais sur qui il peut compter. « N’ayant rien à voir avec la Section criminelle, se souvient Sullivan, quelle ne fut pas ma surprise quand Hoover me convoqua pour me parler de la Mafia ! Il fut encore plus surpris quand j’acceptai son offre de procéder à une recherche sur la criminalité organisée. On aurait dit un homme en train de se noyer, en quête de toute l’aide disponible pour éviter de couler. »
William C. Sullivan lance toutes ses troupes dans la bataille. Ils prennent connaissance de tous les rapports, lisent tous les livres (on en compte plus de deux cents référencés), épluchent les archives du New York Times depuis le début du siècle. En un temps record, ils pondent une « Histoire de la Mafia » en deux volumes que Sullivan envoie directement à Hoover en court-circuitant sa propre hiérarchie. Hoover les parcourt avant de noter : « Pas la peine de lire deux gros bouquins pour comprendre que la Mafia existe aux États-Unis ! »
Pour William C. Sullivan, c’est une marque de reconnaissance pour son travail. Le Directeur reconnaît enfin officiellement l’existence de la criminalité organisée sur tout le territoire des États-Unis. Fier de sa production, Sullivan en fait tirer vingt-cinq exemplaires qu’il fait porter un matin, par coursier, aux grandes administrations américaines et aux hommes politiques concernés. Au retour de son déjeuner avec Clyde Tolson à l’hôtel Mayflower, Hoover apprend l’envoi de la monographie. Après l’avoir à nouveau feuilletée, il réalise l’étendue du danger : l’étude de Sullivan
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